adj. (Logique) l'universel en Logique, est une chose qui a rapport à plusieurs, unum versus multa, seu unum respiciens multa. On en distingue principalement de deux sortes ; savoir l'universel in essendo, et l'universel in praedicando.

L'universel in essendo est incréé ou créé. L'incréé est une nature propre à se trouver dans plusieurs, dans un sens univoque, et d'une manière indivisible. Telle est la nature qui se multiplie dans le Père, le Fils et le S. Esprit, sans se diviser, ni se partager.

L'universel in essendo créé, est une nature propre à se trouver dans plusieurs, dans un sens univoque et d'une manière divisible. Telle est la nature humaine qui, à mesure qu'elle se multiplie dans tous les hommes, se divise.

L'universel in praedicando est pareillement de deux sortes, ou incréé, ou créé. L'incréé est un attribut propre à être dit dans un sens univoque de plusieurs, et cela sans se diviser ; tels sont tous les attributs de Dieu. Le créé est un attribut qui se divise, à mesure qu'il se dit de plusieurs, et cela dans un sens univoque ; tels sont ces mots homme, cercle, triangle.

Ce qui distingue l'universel in essendo d'avec l'universel in praedicando, c'est que le premier s'exprime par un nom abstrait, et le second par un nom concret.

Ce double universel se divise en cinq autres universaux, qui sont le genre, l'espèce, la différence, le propre et l'accident.

Le genre se définit une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dit de plusieurs comme la partie la plus commune de l'essence.

Il se divise d'abord en genre éloigné, et en genre prochain. Le genre éloigné est celui qui est séparé de l'espèce par un autre genre, qui est interposé entre eux deux. Telle serait, par exemple, la substance par rapport à Dieu, laquelle ne se dit de cet être suprême, que moyennant l'esprit qui en est le genre prochain.

On en distingue encore de trois sortes ; savoir le genre suprême, le genre subalterne et le genre infime. Le genre suprême, qu'on appelle aussi transcendental, ne reconnait aucun genre au-dessus de lui ; tel est l'être. Le genre subalterne se trouve placé entre des genres dont les uns sont au-dessus de lui et les autres au-dessous ; et le genre infime, est celui qui n'en a point sous lui : il est le même que le genre prochain.

Ce qui est genre par rapport à un autre genre moins universel, n'est plus qu'une espèce par rapport à celui qui est plus étendu que lui. Ainsi la substance qui est genre par rapport à l'esprit et au corps, n'est qu'une espèce de l'être en général.

Tout ce qui se trouve dans le genre, à son universalité près, se trouve aussi dans tous ses inférieurs ; mais cela n'est pas réciproque de la part des inférieurs par rapport à leur genre. On peut bien dire de l'esprit qu'il est substance ; mais on ne dira pas de la substance en général, qu'elle est esprit.

La différence se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme la partie la plus stricte ; je veux dire la plus propre, la moins étendue de l'essence. Voici les trois fonctions qu'on lui donne ; 1°. de diviser le genre, c'est-à-dire de le multiplier ; 2°. de constituer l'espèce ; 3°. de la distinguer de toute autre : essentielle à l'espèce qu'elle constitue, elle est contingente au genre qu'elle multiplie.

On en distingue de plusieurs sortes ; savoir la différence générique, la différence spécifique, et la différence numérique.

La différence générique est un attribut, par exemple, qui étant commun à des êtres même de différente espèce, sert néanmoins à les distinguer d'autres êtres dont l'espèce est plus éloignée. Ainsi l'intelligence convenant à Dieu, aux anges et aux hommes, qui sont tous de différente espèce, sert à les distinguer des corps qui n'en sont pas susceptibles.

La différence spécifique est le degré qui constitue l'espèce infime, et qui la distingue de toutes les autres espèces. Cette différence renferme deux propriétés ; la première est de distinguer une chose d'avec toutes celles qui ne sont pas de la même espèce ; et la seconde d'être la source et l'origine de toutes les propriétés qui constituent un être.

La différence numérique consiste en ce qu'un individu n'est pas un autre individu. Ceux qui voient par-tout dans les genres, dans les espèces, dans les essences et dans les différences, autant d'êtres qui vont se placer dans chaque substance, pour la déterminer à être ce qu'elle est, verront aussi dans la différence numérique je ne sais quel degré, enté, pour ainsi dire, sur l'espèce infime, et qui la détermine à être tel individu. Ce degré d'individuation sera, par exemple, dans Pierre la pétréité, dans Lentulus la lentuléité, &c.

L'espèce se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme toute l'essence commune. Ainsi l'espèce résulte du genre et de la différence.

Il y a deux sortes d'espèces, l'une subalterne et l'autre infime ; la subalterne est genre par rapport aux espèces inférieures, et espèce par rapport à ce qui est plus étendu et plus universel qu'elle ; l'espèce infime ne reconnait sous elle que des individus.

Le propre se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme une propriété qui découle de leur nature ; ce qui le distingue de l'accident, qui ne se trouve dans plusieurs et n'est dit de plusieurs, qu'à titre de contingence.

Les Philosophes ont quelquefois étendu plus loin ce nom de propre, et en ont fait quatre espèces. La première est celle-ci, quod convenit omni, soli et semper ; ainsi c'est le propre de tout cercle, et du seul cercle, et cela dans tous les temps, que les lignes tirées du centre à la circonférence soient égales. La seconde, quod convenit omni, sed non soli ; comme on dit qu'il est propre à l'étendue d'être divisible, parce que toute étendue peut être divisée, quoique la durée, le nombre et la force le puissent être aussi. La troisième est, quod convenit soli, sed non omni ; comme il ne convient qu'à l'homme d'être médecin ou philosophe, quoique tous les hommes ne le soient pas. La quatrième, quod convenit omni et soli, sed non semper ; comme, par exemple, d'avoir de la raison.

Il y a des contestations fort vives et fort animées entre les Thomistes et les Scotistes, pour savoir si l'universel existe à parte rei, ou seulement dans l'esprit ; les Scotistes soutiennent le premier, et les Thomistes le second. Ce qui cause tous les débats où ils sont les uns avec les autres, c'est la difficulté de concilier l'unité avec la multiplicité, deux choses qui ne doivent point être séparées quand il est question des universaux.

Les Thomistes disent des Scotistes qu'ils donnent trop à la multiplicité, et pas assez à l'unité ; et les Scotistes à leur tour leur reprochent de sacrifier la multiplicité à l'unité. Mais pour bien entendre le sujet de leur dispute, il faut observer qu'il y a deux sortes d'unités : l'une d'indistinction, autrement numérique, et une unité d'indiversité ou de ressemblance. Les Thomistes soutiennent que l'unité de similitude ou de ressemblance n'est pas une vraie unité, et qu'elle ne peut par conséquent constituer l'universel. Voici comment ils conçoivent la chose. Tous les hommes ont une nature parfaitement ressemblante ; or ce fond de ressemblance qui se trouve dans tous les hommes, fournit à l'esprit une raison légitime pour se représenter, d'une manière abstraite, dans tous les hommes une nature qui soit la même d'une unité numérique, laquelle unité, selon eux, peut s'allier avec l'universel. Or la chose étant ainsi exposée, il est évident que l'universel n'existe pas à parte rei, mais seulement dans l'esprit, puisque la même nature numérique ne se trouve pas dans deux hommes. Les Scotistes au contraire prétendent que l'unité de similitude ou de ressemblance est une vraie unité, et qu'elle est la seule qui puisse s'associer avec la multiplicité. Dans la persuasion où ils sont que tous les êtres sont du-moins possibles de la manière dont ils les conçoivent, ils tournent en ridicule les Thomistes pour admettre dans l'unité numérique une multiplicité qui y est formellement opposée. Les Thomistes à leur tour leur rendent bien la pareille, en se moquant de toutes ces idées réalisées de genres, d'espèces, de différences, qui vont comme autant d'êtres se placer dans les substances pour les déterminer à être ce qu'elles sont. Qui croirait, par exemple, que la nature humaine en Pierre fût distinguée positivement de lui ? Or c'est cependant ce que reconnaissent, et ce que doivent reconnaître dans leurs principes les Scotistes. La nature de Pierre, qui d'elle même est universelle, se trouve contractée et déterminée à être telle qu'elle est, par je ne sais quel degré d'être qui lui survient, et qu'ils appellent pétréité. Oh ! pour cela ce sont d'admirables gens que ces Scotistes. Il se dévoîle à leurs yeux une infinité d'êtres qui sont cachés au reste des hommes ; ils voient encore où les autres ne voient plus.

Par la manière dont je viens d'exposer cette fameuse dispute, qui fait tant de bruit dans les écoles, il est aisé de juger combien toute cette question des universaux est frivole et ridicule. Cependant quelque mépris qu'on en fasse dans le monde, elle se maintient toujours fièrement dans les écoles. Voici le jugement qu'en porte la logique de Port-Royal. " Personne, Dieu merci, ne prend intérêt à l'universel à parte rei, à l'être de raison, ni aux secondes intentions ; ainsi on n'a pas lieu d'appréhender que quelqu'un se choque de ce qu'on n'en parle point, outre que ces matières sont si peu propres à être mises en français, qu'elles auraient été plus capables de décrier la philosophie que de la faire estimer ". Dagoumer a beau se récrier contre cette décision, logique pour logique, nous en croirons plutôt celle de Port-Royal que la sienne, parce que les vaines subtilités de l'une ne peuvent balancer dans notre esprit le choix judicieux des questions qu'on y traite avec toute la force et la solidité du raisonnement. Ce n'est pourtant pas qu'il ne s'y trouve certaines questions dignes des écoles ; mais il faut bien donner quelque chose au préjugé et au torrent de la coutume.

UNIVERSEL, (Théologie) les catholiques romains ne conviennent pas entr'eux sur le titre d'évêque universel, que les papes se sont arrogés ; quoique quelques-uns d'eux n'aient pas voulu l'accepter. Baronius soutient que ce titre appartient au pape de droit divin ; et néanmoins S. Grégoire, à l'occasion de cette même qualité donnée par un concîle en 586, à Jean, patriarche de Constantinople, assurait expressément qu'elle n'appartenait à aucun évêque, et que les évêques de Rome ne pouvaient ni ne devaient le prendre ; c'est pourquoi S. Léon refusa d'accepter ce titre, lorsqu'il lui fut offert par le concîle de Chalcédoine, de peur qu'en donnant quelque qualité particulière à un évêque, on ne diminuât celle de tous les autres, puisque l'on ne pourrait pas admettre d'évêque universel sans diminuer l'autorité de tous les autres. Voyez EVEQUE, OECUMENIQUE, PAPE, etc.

Nous avons expliqué sous le mot OECUMENIQUE, les divers sens dans lesquels on peut prendre ce terme qui est synonyme à universel, quel est celui dans lequel on doit dire que le pape est pasteur universel, et quel est le sens abusif dans lequel ce titre ne lui convient pas, selon la doctrine de l'église gallicane. Voyez OECUMENIQUE.

UNIVERSEL, adj. (Physique) ce qui est commun à plusieurs choses, ce qui appartient à plusieurs choses, ou même à toutes choses en général. Voyez GENERAL.

Il y a des instruments universels pour mesurer toutes sortes de distances, de hauteurs, de longueurs, etc. que l'on appelle pantomètres et holomètres ; mais pour l'ordinaire ces instruments, à force d'être universels, ne sont d'usage dans aucun cas particulier. Chambers.

UNIVERSEL, adj. (Gnomonique) cadran solaire universel est celui par lequel on peut trouver l'heure en quelque endroit de la terre que ce sait, ou sous quelque élévation de pôle que ce puisse être. Voyez CADRAN.