S. m. (Jurisprudence) ce terme a dans cette matière plusieurs significations différentes.

Dixième, selon l'article 6. de la coutume de Saint-Omer, est le dixième denier qui est dû au seigneur pour vente, donation, ou autre acte translatif de propriété d'un héritage féodal. (A)

DIXIEME DENIER des revenus du royaume, est une imposition extraordinaire que le roi lève quelquefois sur ses sujets, dans les besoins pressants de l'état, comme pour fournir aux frais de la guerre.

Le plus ancien exemple que l'on trouve d'une imposition de cette quotité au profit du roi, est celle que Charles Martel fit sur le clergé, pour la guerre qu'il préparait contre les Lombards.

Il y en eut une autre semblable sous Philippe-Auguste en 1188. Lorsque ce prince partit pour aller délivrer Jérusalem des mains de Saladin, soudan d'Egypte, qui s'en était emparé, on leva pour cette expédition sur les ecclésiastiques le dixième de leurs revenus ; et sur les laïcs qui ne feraient point le voyage, le dixième de leurs meubles et de leurs revenus. Cette imposition fut appelée la dixme ou décime saladine.

Plusieurs des levées qui furent faites pour les autres croisades, soit contre les infidèles, soit contre les hérétiques et excommuniés, et pour les autres guerres de religion, retinrent aussi le nom de dixième ou décimes, quoiqu'elles fussent souvent moindres de la dixième partie des revenus. C'est ce que l'on voit dans quelques anciennes ordonnances de 1365, et des années suivantes jusqu'en 1458. Voyez ci-devant au mot DECIMES.

Pour ce qui est du dixième proprement dit, il fut levé sur les nobles en 1529, pour contribuer à la rançon des deux fils de François 1er.

Depuis ce temps, on ne trouve point que le dixième ait été imposé jusqu'en 1710, qu'il fut établi par une déclaration du 14 Octobre 1710, registrée en vacations. On attendait un secours si prompt de cette imposition, que le 2 Décembre suivant il y eut une autre déclaration pour l'emprunt de trois millions, dont le remboursement fut assigné sur les deniers qui proviendraient de la levée du dixième. Il fut dit que ceux qui préteraient 100000 liv. sur ces 3 millions, seraient réputés nobles ; qu'à cet effet il leur serait expédié des lettres de noblesse ; mais ces noblesses acquises à prix d'argent, ne furent pas de longue durée, d'autant plus que les prêteurs étaient bien dédommagés par l'intérêt de leur argent qu'on leur payait au denier dix.

Le clergé obtint au mois d'Octobre 1711 une déclaration du Roi, qui déclara les biens ecclésiastiques exempts du dixième à perpétuité, tant pour le passé que pour l'avenir.

Cette imposition qui avait commencé d'être perçue à compter du premier Octobre 1710, fut ôtée par l'édit du mois d'Aout 1717, à commencer du premier Janvier 1718, à l'exception du dixième des pensions.

La guerre qui fut déclarée au mois d'Octobre 1733 donna lieu à rétablir l'imposition du dixième, par une déclaration du 17 Novembre suivant. L'arrêt d'enregistrement fixa le commencement de cette imposition à compter du 1 Janv. 1734. Il fut supprimé par arrêt du conseil du premier Janvier 1737, à compter dudit jour.

Comme la déclaration du 17 Novembre 1733, assujettissait à la levée du dixième tous les sujets du Roi privilégiés ou non-privilégiés, le clergé pour se rédimer de cette imposition, paya au Roi par forme de don gratuit une somme de douze millions, pour tenir lieu du dixième ; en sorte que l'exemption qui semblait lui avoir été accordée à perpétuité, en 1733 n'eut pas lieu.

La dernière occasion où le dixième a été rétabli, a été lors de la guerre qui fut déclarée en 1741 ; il fut imposé par une déclaration du 29 Aout 1741, à compter du premier Octobre suivant.

Par un édit du mois de Décembre 1746, le Roi ordonna la levée des deux sous pour livre du dixième, pour commencer au premier Janvier 1747, et finir au dernier Décembre 1756.

Par un autre édit du mois de Mai 1749, le Roi ordonna que l'on cesserait de percevoir le dixième, à compter du premier Janvier 1750 ; mais par le même édit, il ordonna la levée du vingtième au lieu du dixième, sans préjudice des deux sous pour livre du dixième, établis par l'édit du mois du Décembre 1746. Ces deux impositions se perçoivent actuellement.

Pour avoir une idée de la manière dont se percevait le dixième, il suffit de rappeler les principales dispositions de l'édit de 1741.

Il ordonne que tous propriétaires nobles ou roturiers, privilégiés ou non, même les apanagistes ou engagistes, payeront le dixième du revenu de tous les fonds, terres, prés, bois, vignes, marais, paccages, usages, étangs, rivières, moulins, forges, fourneaux, et autres usines ; cens, rentes, dixmes, champarts, droits seigneuriaux, péages, passages, droits de ponts, bacs et rivières, droits de canaux, et généralement pour tous autres droits et biens de quelque nature qu'ils soient, tenus à rente, affermés ou non affermés.

On devait aussi payer le dixième du revenu des maisons de toutes les villes et fauxbourgs du royaume, louées ou non ; et de celles de la campagne, qui étant louées procurent un revenu au propriétaire ; même pour les parcs et enclos de ces maisons étant en valeur : de manière que le dixième ne devait être levé qu'eu égard au revenu, déduction faite des charges sur lesquelles les propriétaires ne pouvaient pas retenir le dixième. A l'égard des forges, étangs, et moulins, le dixième ne se payait que sur le pied des trois quarts du revenu.

L'édit portait aussi que le dixième du revenu de toutes les charges, emplois, et commissions, soit d'épée ou de robe ; des maisons royales, des villes, de police, ou de finance, compris leurs appointements, gages, remises, taxations, et droits y attribués de quelque nature qu'ils fussent, continuerait d'être perçu sur tous ceux sur qui on le percevait alors, et encore actuellement ; qu'il serait pareillement levé sur ceux sur qui on aurait oublié de le percevoir, ou qui en auraient été exempts, le Roi dérogeant pour cet effet à toute loi contraire.

Il ordonnait aussi la retenue du dixième de toutes les rentes sur le clergé, sur les villes, provinces, pays d'états, et autres, à l'exception des rentes perpétuelles et viageres sur l'hôtel de ville de Paris et sur les tailles ; des quittances de finances, portant intérêt à deux pour cent, employées dans les états du Roi, et des gages réduits au denier cinquante.

Le dixième se levait aussi sur toutes les rentes à constitution sur des particuliers, des rentes viageres, douaires, et pensions créées et établies par contrats, jugements, obligations, ou autres actes portant intérêts, et aussi sur tous les droits, revenus, et émoluments de quelque nature qu'ils fussent, attribués tant aux officiers royaux qu'autres particuliers ; corps ou communautés, soit qu'ils leur eussent été aliénés ou réunis. Il en était de même des octrais et revenus patrimoniaux, communaux, et autres biens et héritages des villes, bourgs, villages, hameaux, et communautés ; droits de messageries, carosses, et coches, tant par terre que par eau, et généralement de tous les autres biens, de quelque nature qu'ils fussent, qui produisent un revenu.

Et comme les propriétaires des fonds et héritages, maisons et offices, qui devaient des rentes à constitution, rentes viageres, douaires, pensions, ou intérêts, payaient le dixième de la totalité du revenu des fonds sur lesquels les rentiers, pensionnaires, et autres créanciers avaient à exercer, ou pouvaient exercer leurs créances ; le dixième dû par ces rentiers, pensionnaires, ou autres créanciers, était à la décharge des propriétaires des fonds, à l'effet de quoi ils étaient autorisés en payant les arrérages de rentes, pensions, ou intérêts, d'en retenir le dixième, en justifiant par eux de la quittance du payement du dixième des revenus de leurs fonds.

Il en était de même des particuliers, officiers, corps et communautés qui jouissent des droits, revenus et émoluments, octrais, revenus patrimoniaux, communaux, et autres biens et héritages, et droits de messageries, carrosses, coches et autres : comme ils payaient le dixième de la totalité du revenu, il leur était aussi permis de retenir le dixième des charges.

Les particuliers commerçans et autres dont la profession est de faire valoir leur argent, devaient aussi payer le dixième de l'industrie, c'est-à-dire à proportion de leurs revenus et profits.

Les rôles du dixième, lorsqu'il a lieu, sont arrêtés au conseil, et le dixième est payable en quatre termes égaux, aux quatre quartiers accoutumés de l'année, par préférence à toutes autres créances, même aux autres deniers du roi.

Les fermiers, locataires, receveurs et autres qui exploitent les biens d'autrui, ne peuvent vider leurs mains de ce qu'ils doivent aux propriétaires, qu'en justifiant par ceux-ci du payement du dixième, si mieux n'aiment les propriétaires consentir que leurs fermiers, locataires et autres débiteurs paient le dixième en leur acquit.

Pour fixer le montant du dixième dû. on oblige chaque particulier de donner au bureau de l'intendant sa déclaration des biens et droits qu'il possède sujets au dixième, à peine de payer le double, et même le quadruple en cas de fausse déclaration.

Lors de l'assemblée du clergé qui fut faite en 1742, le clergé prétendit que ses biens n'étaient point sujets à l'imposition du dixième : il accorda à cette occasion au roi un don gratuit de 12 millions, au moyen de quoi dans le contrat qui fut passé avec les commissaires du roi, ceux-ci déclarèrent que tous les biens ecclésiastiques et des communautés séculières et regulières de l'un et de l'autre sexe, fabriques, fondations, confrairies et des hôpitaux, n'avaient été ni pu être compris dans la déclaration du dixième, de sorte que tous les biens qui appartenaient alors à l'église, et tous ceux qui lui appartiendraient dans la suite, en demeureraient exempts à perpétuité, tant pour le passé que pour l'avenir. C'est à-peu-près la même chose que ce qui était porté par la déclaration de 1711, laquelle n'empêcha pas néanmoins que le clergé ne payât au roi en 1734 une somme de douze millions, pour tenir lieu du dixième. Voyez ce qui est dit aux mots DECIME, DON-GRATUIT, et au mot IMMUNITE.

A l'égard des hôpitaux, il fut ordonné par un arrêt du conseil du 2 Avril 1743, que tous propriétaires d'héritages, maisons, offices qui leur devaient des rentes, pensions et autres redevances de quelque nature qu'elles fussent, ne pourraient leur retenir le dixième ; que ceux qui l'auraient retenu, seraient obligés de le restituer ; et qu'en présentant leur requête, il leur serait tenu compte de ces dixiemes sur celui qu'ils payaient du revenu de leurs fonds, en justifiant par eux de la réalité desdites rentes et pensions, et en rapportant les contrats et autres titres nécessaires.

Il est permis en créant une rente foncière de stipuler qu'elle sera exempte de la retenue du dixième de la part du débiteur, parce que cette exemption est censée faire partie du prix du fond qui est arbitraire ; mais il n'en est pas de même des rentes constituées ; la clause par laquelle on les stipulerait exemptes de dixième serait usuraire, parce que dans le temps où le dixième a cours, la rente se trouverait payée à un denier plus fort que celui de l'ordonnance.

Plusieurs de ceux qui doivent des cens et rentes seigneuriales, prétendirent être en droit de retenir le dixième ; cette prétention fut même autorisée par un arrêt du parlement du 29 Janvier 1749, confirmatif d'une sentence du bailliage d'Angers du 22 Avril 1748 ; mais par un arrêt du conseil du 13 Octobre 1750, il fut dit que sans avoir égard à l'arrêt du parlement, les décisions du conseil concernant le dixième des cens et rentes seigneuriales, seraient exécutées ; en conséquence, que tous les débiteurs de cens et rentes seigneuriales, soit en argent, soit en nature, seront tenus de les payer sans aucune retenue du dixième ni du vingtième, et que les seigneurs auxquels ces droits seigneuriaux sont dû., continueront d'être imposés dans les rôles du vingtième, pour raison de ces droits seigneuriaux dont il sera fait déduction comme par le passé sur les revenus des débiteurs chargés de ces droits.

Ce n'est pas seulement en France que l'imposition du dixième a quelquefois lieu. On lit dans les états de Russie par Margeret, que le Czar a en tout temps le dixième en nature des chevaux qui se vendent, et encore par chaque cheval cinq sols pour cent ; qu'il a aussi le dixième de tout ce qui se demande par droit de justice. (A)

DIXIEME DENIER ou DEUX SOLS POUR LIVRE D'AUGMENTATION sur les revenus du roi. Ce droit fut établi d'abord pour une année, à commencer du premier Avril 1705 par déclaration du mois de Mars de ladite année sur tous les droits des fermes, et entr'autres sur les greffes appartenans au roi, et unis à la ferme de ses domaines ; et par une autre déclaration du 7 Juillet suivant, donnée en interprétation de la précédente, ce droit fut étendu nommément sur les greffes royaux, sur le contrôle des exploits, sur les insinuations laïques, petits sceaux et contrôle des actes des notaires, et ce, pour une année, à commencer du premier Aout lors prochain. La déclaration du 26 Décembre 1705, ordonna la levée de cette imposition sur tous les revenus des fermes royales, greffes, domaniaux et deniers de la capitation. Un arrêt du conseil du 18 Septembre 1706, ordonna que l'on continuerait la perception de ce droit jusqu'à ce qu'autrement il eut été ordonné ; ce qui fut confirmé par la déclaration du 11 Janvier 1707. Il y eut le 29 Octobre 1709, une déclaration pour la perception d'un dixième, par augmentation de tous les droits qui se lèvent dans la ville de Paris, pour employer les deniers qui en proviendraient en achat des bleds pour la subsistance des pauvres de l'hôpital général, jusques et compris le dernier Décembre 1710. Voyez DEUX SOLS POUR LIVRE, ATRE SOLS POUR LIVREIVRE. DIXIEME DE L'INDUSTRIE. Voyez ci-devant DIXIEME DENIER. (A)

DIXIEME DES PRISES, est un droit attribué à l'amiral sur les prises faites en mer. Voyez AMIRAL, CONSEIL DES PRISES et PRISES. (A)

DIXIEME DE RETENUE, est celui que le roi retient sur les pensions, gages, taxations, et que les particuliers débiteurs de rentes, pensions et intérêts peuvent pareillement retenir à leurs créanciers, à la différence du dixième d'imposition que le roi perçait sur tous ses sujets à proportion de leurs revenus. Voyez DIXIEME DENIER. (A).

DIXIEME SUR LES VINS ; il y avait un droit d'aides ainsi appelé, qui fut supprimé par l'édit du mois d'Aout 1717. (A)