S. m. (Histoire des Drogues, Matière médicale, Pharmacie) suc résineux et gommeux, fort connu des anciens, et qui distille d'une plante férulacée. C'est le chêne des Arabes, le de Dioscoride, le , chalbane des Hébreux, mot tiré de chalbanah, qui signifie gras, onctueux, gommeux ; et c'est aussi bien clairement du mot grec ou hébraique latinisé, que le terme français prend son origine.

Cette gomme-résine entrait dans la composition du parfum qui devait être brulé sur l'autel d'or. Le Seigneur dit à Moyse, prenez des parfums, du stacte, de l'onix, du galbanum odoriférant, avec de l'encens le plus pur, et que tout soit du même poids ; vous ferez un parfum composé avec soin du mélange de toutes ces choses. Exode ch. xxx. vers. 34. Ce parfum ne déplairait point aujourd'hui à nos femmes hystériques, et à nos hommes hypochondriaques ; peut-être ne serait-il pas difficîle de trouver les mêmes causes analogiques qui le rendaient autrefois agréable ou nécessaire au peuple juif, par son influence sur leur genre nerveux, également affoibli comme le nôtre : mais cette discussion me menerait trop loin.

Le galbanum est une substance grasse, ductîle comme de la cire, à demi-transparente, brillante, dont la nature tient en quelque manière le milieu entre la gomme et la résine ; car elle s'allume au feu comme la résine, se dissout dans l'eau, le vin, le vinaigre, comme les gommes, et point ou difficilement dans les huiles, sa couleur est blanchâtre et presque transparente lorsqu'elle est récente, ensuite jaunâtre ou rousse, d'un goût amer, acre, d'une odeur forte.

On trouve deux espèces de galbanum chez les droguistes et dans les boutiques d'apothicaires ; l'un est en larmes, l'autre en pains ou en masse.

Le premier est le meilleur ; on l'estime quand il est récent, pur, gras, médiocrement visqueux, inflammable, formé de grumeaux blanchâtres et brillans, d'un goût amer et d'une odeur forte. Le galbanum en masse doit être choisi le plus net qu'il sera possible, sec, et d'une odeur forte. On jette celui qui est brun, sordide, mêlé de matières étrangères, de sable, de terre, de bois, ou autres parties de la plante qui le produit. Il parait cependant ne différer du galbanum en larmes, qu'à cause de la négligence et du peu de soin qu'on a eu à le recueillir. Pour le nettoyer, on le met dans l'eau bouillante ; et quand il est fondu, on en ôte facilement les ordures qui surnagent. On l'adultère quelquefois avec de la résine, des feves blanches concassées, et de la gomme ammoniaque. Le meilleur moyen d'éviter cette sofistiquerie est de le tirer de bonne main.

Les anciens Grecs ont connu cette larme. Dioscoride dit qu'elle découle d'une certaine férule, qui s'appelait métopion. En effet elle découle d'elle-même ou par incision, d'une plante férulacée ou ombellifère que M. de Tournefort a rapportée au genre d'oreoselinum, par la structure de son fruit, et dont voici les synonymes :

Oreoselinum africanum galbaniferum, frutescens, anisi folio, I. R. H. 319. Ferula africana, galbaniferae, ligustici foliis, et facie, Par. Bat. 163. Raii, hist. 3. 252. Boerh. Ind. alt. 65. Till. Hort. pis. 61. Anisum africanum frutescens, folio et caule colore coeruleo tinctis, Pluk. Phytog. 12. f. 12. Anisum fruticosum africanum, galbaniferum, hist. oxon. 3. 297. Oreoselinum anisoides, arborescens, ligustici foliis et facie, flore luteo, capitis Bonae-spei, Breyn. prod. 2. 79. Ferula galbanifera syriaca, offic.

Cette plante est toujours verte. Sa racine est grosse, ligneuse, pâle, partagée en quelques branches ou fibres. Les tiges sont de la grosseur d'un pouce ; elles s'élèvent à la hauteur de plus de deux ou trois coudées ; elles subsistent et sont ligneuses, rondes, genouillées, remplies d'une moelle blanchâtre un peu dure, et partagées en quelques rameaux. Chaque espace entre les nœuds des tiges et des rameaux, est couvert d'un feuillet membraneux, d'où sortent les feuilles semblables à celles de l'anis, mais plus amples, plus fermes, et découpées plus aigu, de couleur de verd de mer, d'une saveur et d'une odeur acres. Les tiges, les rameaux et les feuilles sont couverts d'une rosée de la même couleur.

Les fleurs naissent au sommet des tiges, disposées en parasol ; elles sont petites, à cinq pétales, en rose de couleur jaune. Quand elles sont tombées, il leur succede des graines presque rondes, aplaties, d'un brun roussâtre, cannelées et bordées tout-autour d'une aîle mince et membraneuse ; elles ont un goût acre, aromatique et piquant ; elles ressemblent aux graines de la livêche, hormis qu'elles ne sont pas sillonnées si profondément, et qu'elles ont une poudre membraneuse que n'ont point les graines de livêche.

Toute cette plante est remplie d'un suc visqueux, laiteux, clair, qui se condense en une larme, qui répond au galbanum par tous ces caractères ; il découle de cette plante en petite quantité par incision, et quelquefois de lui-même, des nœuds des tiges qui ont trois ou quatre ans : mais on a coutume de couper la tige à deux ou trois travers de doigt de la racine, et le suc découle goutte-à-goutte ; quelques heures après il s'épaissit, se durcit, et on le recueille.

Cette plante croit en Arabie, en Syrie, dans la Perse, et dans différents pays de l'Afrique, surtout dans la Mauritanie.

Quelques curieux la font venir aussi dans des serres, et elle a poussé heureusement durant quelques années dans le jardin royal de Paris. Pour réussir dans sa culture, il faut semer sa graine d'abord après qu'elle est mûre, dans un pot de bonne terre, qu'on placera dans un lit chaud durant l'hiver pour la préserver du froid. On transportera ensuite la plante dans de plus grands pots, à mesure qu'elle s'élevera, ce qu'on exécutera dans le mois de Septembre. On la tiendra toujours en hiver dans une serre ; on l'arrosera fréquemment en été, et alors on lui procurera de l'air autant qu'il sera possible. Au reste tous ces soins ne sont que pour la curiosité, car cette férule ne donne de larme que dans les lieux de sa naissance.

La plante que Lobel appelle ferula galbanifera, Lob. icon. 779. est bien différente de celle dont il s'agit ici ; car la férule de Lobel, malgré le nom qu'il lui a imposé, ne produit point le galbanum, comme M. de Tournefort l'a observé, mais une autre sorte de gomme fort rouge, et dont l'odeur n'est point forte.

Le galbanum se dissout dans le vin, le vinaigre et dans l'eau chaude ; mais difficilement dans l'huile, ou l'esprit-de-vin. Il abonde en sel tartareux, et en une huîle épaisse, fétide, que l'esprit-de-vin, comme trop délié, n'extrait qu'à peine, tandis qu'elle s'enlève et se dégage avec le vinaigre, le vin, et l'eau chaude.

Les auteurs modernes n'ont fait que copier ce que Dioscoride a dit de ses vertus, dont il a parlé fort au long et en général assez bien contre son ordinaire. Sa saveur est acre, amère, nauséabonde ; son odeur forte et desagréable, dépendantes de son huîle et de son sel tartareux, indiquent que ses propriétés sont analogues à celles des autres gommes de son espèce, le bdellium, l'opopanax, le sagapenum, l'assa foetida et la gomme ammoniaque, qui sont échauffantes, pénétrantes, stimulantes, résolutives, propres pour les maladies froides du genre nerveux. Cependant le galbanum est plus faible que la gomme ammoniaque pour purger ; mais il resserre ensuite un peu davantage.

On l'emploie intérieurement et extérieurement. Il faut en user avec réserve pour l'intérieur. Sa dose en substance est depuis un scrupule jusqu'à demi-dragme : on le mêle comme on veut avec les autres gommes et purgatifs, et on en fait des pilules, dont je donnerai tout-à-l'heure des exemples.

Le galbanum est un très-bon médicament en qualité d'anti-hystérique, d'emmenagogue et de fondant, quand il n'y a point d'inflammation, et qu'il est besoin d'échauffer, de stimuler, de dissoudre une pituite tenace, glutineuse, abondante, qui cause des obstructions dans les intestins, dans l'utérus, et dans les autres parties du corps ; ce qui est fort commun dans les pays septentrionaux.

En ce cas on peut prendre galbanum, gomme ammoniaque, de chacun deux onces ; vitriol de mars de rivière demi-once ; diagrede trente grains ; du sirop de nerprun, s. q. faire d'abord une masse de pilules dont la dose sera depuis cinq grains jusqu'à vingt, quand il s'agira de fondre des humeurs, de desobstruer, d'exciter les règles, etc. Ou bien alors dans les mêmes cas, prenez galbanum, assa foetida, myrrhe, de chacun une dragme ; camphre, sel de succin, de chacun demi-scrupule ; borax deux scrupules ; sirop d'armoise s. q. faire d'abord une masse de pilules, dont la dose sera d'un scrupule. S'il est besoin d'agir plus puissamment, prenez galbanum un scrupule ; succin pulvérisé douze grains ; scammonée dix grains ; formez-en un bol avec conserve de fleurs de chicorée, s. q. En un mot on peut diversifier le mélange du galbanum avec les autres gommes et purgatifs à l'infini, suivant les vues qu'on se propose.

Le galbanum s'emploie extérieurement sans danger et sans limites ; il incise, il attire puissamment, il amollit, et fait mûrir : c'est pour cela qu'on le mêle dans la plupart des emplâtres émolliens, digestifs et résolutifs. Appliqué sur la région du bas-ventre en manière d'emplâtre, il adoucit quelquefois les maladies hystériques, et les mouvements spasmodiques des intestins. C'est dans la même intention qu'on prend parties égales de galbanum, d'assa foetida, de castoreum, dont on forme des trochisques, pour en faire des fumigations dans les accès hystériques.

On peut aussi dissoudre le galbanum dans l'huîle d'aspic, et en faire un liniment nervin. On se sert aussi beaucoup de l'emplâtre de galbanum dans plusieurs cas, et du galbanetum de Paracelse dans des commencements de paralysie. Or voici comme on prépare le galbanetum de Paracelse, qui passe pour un bon remède externe dans la contraction des nerfs et la suspension de leur action. Prenez une livre de galbanum, demi-livre d'huîle de térébenthine, deux onces d'huîle d'aspic ; digérez le tout pendant deux ou trois jours ; distillez-le ensuite dans la cornue, et gardez la liqueur distillée dans un vase bien bouché pour l'usage.

On emploie le galbanum dans la thériaque, le mithridat, le diascordium, l'onguent des apôtres, l'onguent d'althaea, le diachylon avec les gommes, l'emplâtre de mucilage, le manus-Dei, le divin, l'oxicroceon, le diabotanum et autres ; car cette larme gommeuse n'est d'usage qu'en Médecine. Il en arrive du Levant chaque année trente ou quarante quintaux, par la voie de Marseille en France, dont elle fait en partie la consommation, et en partie la vente dans les pays étrangers. (D.J.)