S. m. (Histoire naturelle) castanea, genre d'arbre qui porte des chatons composés de plusieurs étamines qui sortent d'un calice à cinq feuilles, et attachées à un axe fort mince. Les fruits qui sont en forme de hérisson, naissent séparément des fleurs sur le même arbre ; ils sont arrondis et s'ouvrent en quatre parties, et renferment des chataignes. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)

Le chataigner (Jardinage) est un grand arbre dont on fait beaucoup de cas ; bien plus cependant pour l'utilité qu'on en retire à plusieurs égards, que pour l'agrément qu'il procure. Il croit naturellement dans les climats tempérés de l'Europe occidentale, où il était autrefois plus commun qu'à présent. Il devient fort gros, et prend de la hauteur à proportion ; souvent même il égale les plus grands chênes. Sa tige est ordinairement très-droite, fort longue jusqu'aux branchages, et bien proportionnée ; les rameaux qui forment la tête de l'arbre ont l'écorce lice, brune, et marquetée de taches grises ; ils sont bien garnis de feuilles oblongues, assez grandes, dentelées en façon de scie, d'une verdure agréable, et qui donnent beaucoup d'ombrage. Il porte au mois de Mai des chatons qui sont de la longueur du doigt, et d'un verd jaunâtre. Les fruits viennent ordinairement trois ensemble, et séparément des chatons, dans une bourse hérissée de pointes, qui s'ouvre d'elle-même sur la fin de Septembre, temps de la maturité des chataignes.

Cet arbre par sa stature et son utilité, a mérité d'être mis au nombre de ceux qui tiennent le premier rang parmi les arbres forestiers ; et on est généralement d'accord que ce n'est qu'au chêne seul qu'il doit céder. Quoiqu'à quelques égards il ait des qualités qui manquent au chêne, l'accroissement du chataigner est du double plus prompt ; il jette plus en bois ; il réussit à des expositions et dans des terrains moins bons, et il est moins sujet aux insectes.

Le bois du chataigner est de si bonne qualité qu'il fait regretter de ne trouver que rarement à-présent des forêts de cet arbre, qui était autrefois si commun. Nous voyons que les charpentes de la plupart des anciens bâtiments sont faites de ce bois, surtout des poutres d'une si grande portée, qu'elles font juger qu'il aurait été extrêmement dispendieux et difficîle de les faire venir de loin, et qu'on les a tirées des forêts voisines. Cependant on ne trouve plus cet arbre dans les forêts de plusieurs provinces, où il y a quantité d'anciennes charpentes de chataigner. Mais à quoi peut-on attribuer la perte de ces arbres, si ce n'est à l'intempérie des saisons, à des hivers longs et rigoureux, ou à des chaleurs excessives accompagnées de grande sécheresse ? Ce dernier incident parait plus probablement avoir été la cause de la perte des chataigners dans plusieurs contrées. Cet arbre se plait sur les croupes des montagnes exposées au nord, dans les terrains sablonneux, et surtout dans les plants propres à retenir ou à recevoir l'humidité : ces trois circonstances indiquent évidemment que de longues sécheresses et de grandes chaleurs sont tout ce qu'il y a de plus contraire aux forêts de chataigner. Si l'on objectait à cela qu'il se trouve encore à-présent une assez grande quantité de ces arbres dans des pays plus méridionaux que ceux où l'on présume que les chataigners ont été détruits, par la quantité qu'on y voit des charpentes du bois de cet arbre, et que par conséquent ce ne doit être ni la chaleur ni la sécheresse qui les aient fait périr : on pourrait répondre que ces pays plus près du midi où il se trouve à-présent des chataigners, tels que les montagnes de Galice et les Pyrenées en Espagne, les Cévennes, le Limosin, le Vivarès, et le Dauphiné en France, et les coteaux de l'Appennin en Italie, sont plus à portée de recevoir de la fraicheur et de l'humidité, que le climat de Paris par exemple, quoique beaucoup plus septentrional ; par la raison, que les neiges étant plus abondantes, et séjournant plus longtemps sur les montagnes des pays que nous venons de nommer, que par-tout ailleurs, entretiennent jusque bien avant dans l'été l'humidité qui est si nécessaire aux chataigners. Mais, dira-t-on, si ces arbres avaient été détruits par telles influences ou intempéries que ce puisse être, pourquoi ne se seraient-ils pas repeuplés par succession de temps, et dans des révolutions de saisons plus favorables, comme nous voyons qu'il arrive aux autres arbres de ce climat, qui s'y multiplient de proche en proche par des voies toutes simples ? Les vents, les oiseaux, et quelques animaux, chassent, transportent, et dispersent les semences ailées, les baies, les glands, etc. et concourent plus efficacement que la main d'homme à étendre la propagation des végétaux. Mais je crois qu'on peut encore rendre raison de ce que la nature semble se refuser en effet au repeuplement du chataigner. Il faut à cet arbre une exposition et un terrain très-convenable, sans quoi il s'y refuse absolument ; ce qui arrive beaucoup moins aux autres arbres de ce climat, qui viennent presque dans tous les terrains indifféremment, avec cette différence seulement qu'ils font peu de progrès dans ceux qui leur conviennent moins ; au lieu que le chataigner en pareil cas dépérit sensiblement, même malgré les secours de la culture. A quoi on peut ajouter que les végétaux ont, comme l'on sait, une sorte de migration qui les fait passer d'un pays à un autre, à mesure qu'ils se trouvent contrariés par les influences de l'air, par l'intempérie des saisons, par l'altération des terrains, ou par les changements qui arrivent à la surface de la terre : en effet, c'est peut-être surtout par les grands défrichements qui ont été faits, qu'en supprimant quantité de forêts, les vapeurs et les rosées n'ayant plus été ni si fréquentes, ni si abondantes, il en a résulté apparemment quelque déchet dans l'humidité qui est si favorable à la réussite et au progrès des chataigners. On voit cependant que dans quelques provinces septentrionales de ce royaume, la main d'homme est venue à-bout d'élever plusieurs cantons de chataigners, qui ont déjà réussi, ou qui promettent du progrès. Cet arbre mérite la préférence sur tant d'autres, qu'il faut espérer qu'on s'efforcera de le rétablir dans tous les terrains qui pourront lui convenir.

Exposition, terrain. La principale attention qu'on doive donner aux plantations de chataigners, est de les placer à une exposition et dans un terrain qui leur soient propres ; car si ce point manque, rien ne pourra y suppléer. Cet arbre aime les lieux frais, noirs, et ombrageux, les croupes des montagnes tournées au nord ou à la bise ; il se plait dans les terres douces et noirâtres ; dans celles qui, quoique fines et legeres, ont un fond de glaise ; et mieux encore dans les terrains dont le limon est mêlé de sable ou de pierrailles. Il se contente aussi des terrains sablonneux, pourvu qu'ils soient humides, ou tout au moins qu'ils aient de la profondeur : mais il craint les terres rouges, celles qui sont trop dures, et les marécages. Enfin il se refuse à la glaise et à l'argile, et il ne peut souffrir les terres jaunâtres et salées.

Lorsque ces arbres se trouvent dans un sol convenable, ils forment les plus belles futaies ; ils deviennent très-grands, très-droits, et extrêmement gros ; ils souffrent d'être plus serrés entr'eux que les chênes, et ils croissent du double plus promptement. Le chataigner est aussi très-bon à faire du bois taillis ; il donne de belles perches, et au bout de vingt ans il forme déjà de joli bois de service.

Semence des chataignes. On peut les mettre en terre dans deux temps de l'année ; en automne, aussi-tôt qu'elles sont en maturité ; ou au printemps, dès qu'on peut cultiver la terre. Ces deux saisons cependant ont chacune leur inconvénient ; si on seme les chataignes en automne, qui serait bien le temps le plus convenable, elles sont exposées à servir de nourriture aux rats, aux mulots, aux taupes, etc. qui en sont très-friands, et qui les détruisent presque entièrement, surtout lorsqu'elles ont été semées en sillon, ce qui est néanmoins la meilleure pratique. Ces animaux suivent toutes les traces de la terre fraichement remuée, et n'y laissent rien de ce qui peut les nourrir ; c'est ce qui détermine souvent à ne semer les chataignes qu'au printemps ; et dans ce cas il faut des précautions pour les conserver jusqu'à cette saison. Si on n'en veut garder qu'une médiocre quantité, on les étend d'abord sur un grenier, où on les laisse pendant quinze jours suer et dissiper leur humidité superflue ; on les met ensuite entre des lits de sable alternativement dans des caisses ou manequins, qu'il faut resserrer dans un lieu sec et à couvert des gelées, d'où on ne les retirera que pour les semer aussitôt que la saison le permettra, dans le mois de Février ou au commencement de Mars : en différant davantage, les germes des chataignes deviendraient trop longs, tortus, et seraient sujets à se rompre en les tirant des manequins ou en les plantant. Mais si l'on veut en garder une quantité suffisante pour de grandes plantations, comme il serait embarrassant en ce cas de les resserrer dans des manequins, on pourra les faire passer l'hiver dans un conservatoire en plein air : on les étendra d'abord pour cet effet dans un grenier, comme nous l'avons déjà dit, à mesure qu'on les rassemblera, pendant trois semaines ou un mois : pour se débarrasser après cela de celles qui sont infécondes, bien des gens veulent qu'il faille les éprouver en les mettant dans un baquet d'eau, où toutes celles qui surnageront seront rejetables, quoiqu'il soit bien avéré par l'expérience qui en a été faite, que de celles-là même il en a réussi le plus grand nombre. On fera rapporter sur un terrain sec un lit de terre meuble de deux ou trois pouces d'épaisseur, et d'une étendue proportionnée à la quantité des semences ; on y mettra ensuite un lit de chataignes de même épaisseur, et ainsi alternativement un lit de terre et un lit de chataignes, sur lesquelles il doit y avoir enfin une épaisseur de terre de six pouces au moins, pour empêcher la gelée, dont on se garantira encore plus surement en répandant de la grande paille par-dessus.

Plantations en grand. Sur la façon de faire ces plantations, nous rapporterons ce que Miller en a écrit. " Après avoir fait, dit-il, deux ou trois labours à la charrue pour détruire les mauvaises herbes, vous ferez des sillons à environ six pieds de distance les uns des autres, dans lesquels vous mettrez les chataignes à dix pouces d'intervalle, et vous les recouvrirez d'environ trois pouces de terre : quand les chataignes auront levé, vous aurez grand soin de les nettoyer des mauvaises herbes ; et après trois ou quatre ans, si elles ont bien réussi, vous en enleverez plusieurs au printemps, et ne laisserez que les plants qui se trouveront à environ trois pieds de distance dans les rangées. Cet intervalle leur suffira pendant trois ou quatre ans encore, après lesquels vous pourrez ôter un arbre alternativement pour laisser de l'espace aux autres, qui se trouveront par ce moyen à six pieds de distance. Ils pourront rester dans cet état jusqu'à ce qu'ils aient huit ou dix ans, et qu'ils soient assez gros pour faire des cerceaux, des perches de houblonnière, etc. à quoi on doit l'employer préférablement à tous autres arbres. Alors vous couperez encore jusqu'auprès de terre une moitié de vos plants, en choisissant alternativement les plus faibles ; et tous les dix ans on pourra y faire une nouvelle coupe qui payera l'intérêt du terrain et les autres charges accessoires, sans compter qu'avec cela il restera une bonne quantité d'arbres destinés à venir en futaie, qui continueront de prendre de l'accroissement, et enfin assez de volume pour que l'espace de douze pieds en carré ne leur suffise plus : ainsi lorsque ces arbres seront de grosseur à en pouvoir faire de petites planches, vous porterez la distance à vingt-quatre pieds carrés, en abattant alternativement un arbre ; ce qui leur suffira alors pour les laisser croitre, et pour donner de l'air au taillis, qui par ce moyen profitera considérablement ; et les coupes qu'on en fera payeront avec usure les dépenses faites pour la plantation, l'intérêt du terrain, et tous autres frais ; de sorte que tous les grands arbres qui resteront seront en pur profit. Je laisse à penser à tout le monde quel grand bien cela deviendrait pour un héritier au bout de quatre-vingt ans, qui est le temps où ces arbres auront pris leur entier accroissement ".

Il y a encore une façon de faire de grandes plantations de chataigners, que l'on pratique à-présent assez ordinairement, et dont on se trouve mieux que de semer les chataignes dans des sillons. On fait des trous moyens à des distances à-peu-près uniformes, et qui se règlent selon la qualité du terrain ; on plante ensuite trois ou quatre chataignes sur le bord de chaque trou, dans la terre meuble qui en est sortie : deux ou trois ans après, on peut faire arracher les plants faibles et superflus, et en hasarder la transplantation dans les places vides, où il faudra les couper ensuite à un pouce au-dessus de terre. La raison qui a fait imaginer et préférer cette méthode, est sensible. Les plantations de chataigner se font ordinairement dans des terrains sablonneux, comme les plus convenables en effet, et ceux en même temps qui ont le plus besoin qu'on y ménage l'humidité possible ; les chataignes d'ailleurs veulent trouver quelque facilité la première année pour lever et faire racine. Les trous dont on vient de parler, réunissent ces avantages ; la terre meuble qui est autour fait mieux lever les chataignes ; et le petit creux qui se trouve à leur portée, favorise le progrès des racines qui cherchent toujours à pivoter, et leur procurer de la fraicheur en rassemblant et en conservant l'humidité.

Semence des chataignes en pepinière, transplantation. Quand on n'a que de petites plantations à faire, qui peuvent alors être mieux soignées, on seme les chataignes en rayon dans de la terre meuble, préparée à l'ordinaire et disposée en planches ; on laisse six pouces de distance entre les rayons, et on y met les chataignes à quatre pouces les unes des autres, et à trois de profondeur. En leur supposant ensuite les soins usités de la culture, on pourra au bout de deux ans les mettre en pepinière, en rangées de deux à trois pieds de distance, et les plants au moins à un pied l'un de l'autre. Le mois d'Octobre sera le temps le plus propre à cette opération dans les terrains secs et legers ; et la fin de Février, pour les terres plus fortes et un peu humides. Les dispositions qui doivent précéder, seront d'arracher les plants avec précaution, d'étêter ceux qui se trouveront faibles ou courbes, et de retrancher le pivot à ceux qui en auront un. La culture que ces plants exigeront ensuite pendant leur séjour dans la pépinière, sera de leur donner un leger labour au printemps, de les sarcler au besoin dans l'été, de leur retrancher peu-à-peu les branches latérales, et de receper à trois pouces au-dessus de terre ceux qui seront rafaux ou languissants, pour les faire repousser vigoureusement. Après trois ou quatre ans, on pourra les employer à former des avenues, à faire du couvert, ou à garnir des bosquets. Ces arbres, ainsi que le chêne et le noyer, ne gagnent jamais à la transplantation, qu'il faut éviter au contraire si l'on se propose de les laisser croitre en futaie ; parce que le chataigner a le pivot plus gros et plus long qu'aucun autre arbre ; et comme il craint de plus le retranchement des branches un peu grosses, on doit se dispenser autant qu'il se peut de les étêter en les transplantant.

Greffe. Si l'on veut cultiver le chataigner pour en avoir de meilleur fruit, il faut le greffer ; et alors on l'appelle marronnier. La façon la plus en usage d'y procéder, a été pendant longtemps la greffe en flute ; parce qu'en effet cette greffe réussit mieux sur le chataigner que sur aucun autre arbre : mais comme l'exécution en est difficîle et souvent hasardée, la greffe en écusson est à-présent la plus usitée pour cet arbre, sur lequel elle réussit mieux à la pousse qu'à oeil dormant. On peut aussi y employer la greffe en fente, qui profite très-bien quand elle reprend ; mais cela arrive rarement.

Le chataigner peut encore se multiplier de branches couchées ; cependant on ne se sert guère de ce moyen, que pour se procurer des plants d'arbres étrangers de son espèce.

Usages du bois. C'est un excellent bois de charpente et le meilleur de tous après le chêne, dont il approche néanmoins de fort près pour la masse, le volume, et la qualité du bois, quoique blanc et d'une dureté médiocre ; on y distingue tout de même le cœur et l'aubier. Pour bien des usages, il est aussi bon que le meilleur chêne ; et pour quelques cas, il est même meilleur, comme pour des vaisseaux à contenir toutes sortes de liqueurs : car quand une fois il est bien saisonné, il a la propriété de se maintenir au même point sans se gonfler ni se gerser, comme font presque tous les autres bois. Celui du chataigner est d'un très-bon usage pour toutes sortes de gros et menus ouvrages ; on l'emploie à la menuiserie, on en fait de bon mairrein, des palissades, des treillages, et des échalas pour les vignes, qui étant mis en œuvre même avec leur écorce, durent sept ans, au lieu que tout autre bois ne s'y soutient que la moitié de ce temps : on en fait aussi des cercles pour les cuves et les tonneaux ; on s'en sert pour la sculpture ; enfin on peut l'employer à faire des canaux pour la conduite des eaux : il y résiste plus longtemps que l'orme et que bien d'autres arbres. Mais ce bois n'est pas comparable à celui du chêne pour le chauffage, pour la qualité du charbon, et encore moins pour celle des cendres. Le bois du chataigner petille au feu et rend peu de chaleur ; son charbon s'éteint promptement, ce qui a néanmoins son utilité pour les ouvriers qui se servent des forges ; et si on emploie ses cendres à la lessive, le linge en est taché sans remède.

Chataignes. Le fruit de cet arbre est d'une très-grande utilité ; le climat contribue beaucoup à lui donner de la qualité, et surtout de la grosseur. Les chataignes de Portugal sont plus grosses que les nôtres, et celles d'Angleterre sont les plus petites. On prétend que pour qu'elles se conservent longtemps, il faut les abattre de l'arbre avant qu'elles tombent d'elles-mêmes. La récolte n'en est pas égale chaque année ; ces arbres ne produisent abondamment du fruit que de deux années l'une : on le conserve en le mettant par lits dans du sable bien sec, dans des cendres, dans de la fougère, ou en le laissant dans son brou. Les montagnards vivent tout l'hiver de ce fruit, qu'ils font sécher sur des claies, et qu'ils font moudre après l'avoir pelé pour en faire du pain, qui est nourrissant, mais fort lourd et indigeste. Voyez ci-après CHATAIGNES.

Feuilles. Une belle qualité de cet arbre, c'est qu'il n'est nullement sujet aux insectes, qui ne touchent point à ses feuilles tant qu'ils trouvent à vivre sur celles des autres arbres ; apparemment parce que la feuille du chataigner est dure et seche, ou moins de leur gout. Les pauvres gens des campagnes s'en servent pour garnir les lits au lieu de plume ; et quand on les ramasse aussitôt qu'elles sont tombées de l'arbre et avant qu'elles soient mouillées, on en fait de bonne litière pour le bétail.

On connait encore d'autres espèces de cet arbre, et quelques variétés.

Le marronnier n'est qu'une variété occasionnée par la greffe, qui perfectionne le fruit en lui donnant plus de grosseur et plus de goût : du reste l'arbre ressemble au chataigner. Les marronniers ne réussissent bien en France que dans les montagnes de la partie méridionale, comme dans les Cévennes, le Vivarès, et le Dauphiné, d'où on les porte à Lyon ; c'est ce qui les fait nommer marrons de Lyon. Voyez MARRON.

Le marronnier à feuilles panachées ; c'est un fort bel arbre dans ce genre, pour ceux qui aiment cette sorte de variété, qui n'est occasionnée que par une espèce de maladie de l'arbre ; aussi ne s'éleve-t-il dans cet état jamais autant que les autres marronniers. On peut le multiplier par la greffe en écusson, et encore mieux en approche sur le chataigner ordinaire. Il lui faut un terrain sec et leger pour faire durer la bigarrure de ses feuilles, qui fait tout son mérite : car dans un meilleur terrain, l'arbre reprend sa vigueur, et le panaché disparait peu-à-peu.

Le petit chataigner à grappes : on croit que ce n'est qu'une variété accidentelle du chataigner ordinaire, et non pas une espèce distincte et constante. Miller dit qu'il ne vaut pas la peine d'être cultivé ; et au rapport de Ray, sa chataigne qui n'est pas plus grosse qu'une naisette, est de mauvais gout.

Le chataigner de Virginie ou le chinkapin. Le chinkapin, quoique très-commun en Amérique, est encore fort rare, même en Angleterre, où cependant on est si curieux de faire des collections d'arbres étrangers : aussi je n'en parlerai que d'après Catesby et Miller ; ce n'est pas que cet arbrisseau soit délicat ou absolument difficîle à élever : mais sa rareté vient du défaut de précaution dans l'envoi des graines qu'on néglige de mettre dans du sable, pour les conserver pendant le transport. Le chinkapin s'élève rarement en Amérique à plus de seize pieds, et pour l'ordinaire il n'en a que huit ou dix ; il prend par proportion plus de grosseur que d'élévation : on en voit souvent qui ont deux pieds de tour. Il croit d'une façon fort irrégulière ; son écorce est raboteuse et écaillée ; ses feuilles d'un verd foncé en-dessus et blanchâtres en-dessous, sont dentelées et placées alternativement : elles ressemblent d'ailleurs à celles de notre chataigner, si ce n'est qu'elles sont beaucoup plus petites. Il porte au printemps des chatons assez semblables à ceux du chataigner ordinaire. Il produit une très-grande quantité de chataignes d'une figure conique, de la grosseur des noisettes, et de la même couleur et consistance que les autres chataignes ; l'arbrisseau les porte par bouquets de cinq ou six qui pendent ensemble, et qui ont chacune leur enveloppe particulière : elles mûrissent au mois de Septembre, elles sont douces et de meilleur goût que nos chataignes ; les Indiens qui en font grand usage, les ramassent pour leur provision pendant l'hiver. Le chinkapin est si robuste, qu'il résiste en Angleterre aux plus grands hivers en pleine terre ; il craint au contraire les grandes chaleurs qui le font périr, surtout s'il se trouve dans un terrain fort sec ; il se plait dans celui qui est médiocrement humide ; car si l'eau y séjournait longtemps pendant l'hiver, cela pourrait le faire périr. Il n'est guère possible de le multiplier autrement que de semences qu'il faut mettre en terre aussitôt qu'elles sont arrivées ; et si l'hiver qui suivra était rigoureux, il sera à-propos de couvrir la terre avec des feuilles, du tan, ou du chaume de pais, pour empêcher la gelée d'y pénétrer au point de gâter les semences. On a essayé de le greffer en approche sur le chataigner ordinaire ; mais il réussit rarement par ce moyen.

Le chataigner d'Amérique à larges feuilles et à gros fruit. La découverte de cet arbre est dû. au P. Plumier, qui l'a trouvé dans les établissements français de l'Amérique. Cet arbre n'est point encore commun en France, et il est extrêmement rare en Angleterre : on peut s'en rapporter à Miller, qui n'a parlé de cet arbre que dans la sixième édition de son dictionnaire, qui a paru en 1752, où il dit qu'il n'a encore Ve que trois ou quatre jeunes plants de cet arbre qui n'avaient fait qu'un très-petit progrès ; qu'on peut faire venir de la Caroline, où il croit en abondance, des chataignes, qu'il faudra semer comme celles de chinkapin, et soigner de même, et qu'elles pourront réussir en plein air dans une situation abritée : qu'au surplus, cet arbre ne diffère du chataigner ordinaire, que parce qu'il y a quatre chataignes renfermées dans chaque bourse ; au lieu que l'espèce commune n'en a que trois : que la bourse ou enveloppe extérieure qui renferme les quatre chataignes, est en effet très-grosse et si épineuse, qu'elle est aussi incommode à manier que la peau d'un hérisson ; et que ces chataignes sont très-douces et fort saines, mais pas si grosses que les nôtres. (c)