S. f. (Histoire naturelle, Lithologie) smaragdus, pierre précieuse transparente, de couleur verte, sans mélange d'aucune autre couleur, et à-peu-près de même dureté que le crystal. Par ces caractères il est aisé de distinguer l'émeraude de toute autre pierre verte, et même du diamant qui aurait une couleur verte aussi belle que l'émeraude. De quelque couleur que le diamant puisse être, on le reconnait aisément à son éclat et à sa dureté. Voyez DIAMANT. L'aigue marine est d'une couleur mêlée de verd et de bleu. Voyez AIGUE MARINE. Le péridot est d'une couleur mêlée de verd et de jaune. Voyez PERIDOT. L'émeraude est la seule de toutes les pierres précieuses occidentales et orientales, qui soit verte sans mélange d'autre couleur, si ce n'est le blanc qui se trouve dans les émeraudes imparfaites ; car il y a des crystaux d'émeraude qui sont en partie blancs et en partie verts, ou qui ont différentes teintes de verd plus ou moins foncé. Les crystaux d'émeraude ont, comme ceux du crystal de roche, la figure d'une colonne à six faces : mais au lieu d'avoir une pointe à chaque bout, elles sont terminées par une face hexagone.

Presque tous les auteurs distinguent les émeraudes en orientales et en occidentales. Ils disent que l'orientale est d'un verd gai ; qu'elle a une grande dureté, et un grand éclat qui se soutient à l'ombre et à la lumière de la chandelle. Aujourd'hui on ne voit aucune émeraude orientale ; s'il y en a, elles sont d'une rareté extrême. Les auteurs qui en parlent, ne conviennent point du lieu où elles se trouvent : les uns disent que c'est en Arabie, les autres en Perse, en Egypte, etc. Voyez la Biblioth. orientale. Tavernier dans son traité des pierres de couleur qui se trouvent aux grandes Indes, prétend qu'il n'y a jamais eu de mines d'émeraudes dans aucun lieu des grandes Indes ; et que toutes celles qu'on y a vues ou qui en sont venues, y avaient été apportées du Pérou par la mer du Sud. Ce voyageur croyait que les Américains avaient eu commerce, même avant la découverte de l'Amérique, avec les habitants des îles de l'Inde orientale appelée aujourd'hui Philippines, et qu'ils y avaient porté une grande quantité d'émeraudes. Comme on ne trouve à-présent aucune émeraude dont la dureté soit égale à celle des pierres orientales, on est en droit de douter de l'existance des émeraudes de cette nature. Il y a près de quatre-vingt ans que de Rosnel disait dans son Mercure indien, que l'on ne rencontrait presque plus d'émeraudes orientales ou de vieille roche, parce que la mine était épuisée, ou cachée dans un lieu inaccessible.

L'émeraude occidentale, qui est la seule que nous connaissions aujourd'hui, vient de l'Amérique et de quelques endroits de l'Europe. L'émeraude d'Amérique se trouve au Perou : elle est bien plus belle que celle de l'Europe ; sa couleur est d'un beau verd-foncé. Il y avait autrefois une mine de cette espèce d'émeraude dans la vallée de Manta, dépendante de Porto-Viejo. Cette mine en fournissait beaucoup avant la conquête du Pérou, et de très-belles, au rapport de Garcilasso de la Vega, Histoire des Incas, tome I. Les Espagnols ne purent jamais la retrouver ; mais ils rapportèrent de ce pays une si grande quantité d'émeraudes, que le prix de cette pierre baissa beaucoup en Espagne, et de-là il s'en répandit partout. Les émeraudes d'Amérique se trouvent aujourd'hui dans la vallée de Tunca ou Tomana, assez près de la nouvelle Carthage, et entre les montagnes de Grenade et de Popayan ; c'est de-là qu'on en transporte à Carthagène une si grande quantité tous les ans. Les émeraudes de l'Europe viennent d'Italie, de Chypre, d'Allemagne, d'Angleterre, etc. L'émeraude est une pierre fort estimée ; celle de l'Amérique, lorsqu'elles sont parfaites, se vendent aussi cher que les pierres orientales. On a cru pendant longtemps que l'émeraude venait de la pierre que l'on appelle prime d'émeraude ; mais cette pierre est fort différente de l'émeraude. Voyez PRIME D'EMERAUDE.

Théophraste rapporte qu'un roi de Babylone présenta au roi d'Egypte une émeraude dont la longueur était de quatre coudées, et la largeur de trois ; et qu'en même temps il y avait en Egypte un obélisque composé de quatre émeraudes, qui avait quarante coudées de haut, quatre de large en quelques endroits, et deux dans d'autres. Il est impossible qu'il y ait jamais eu des émeraudes de cette grandeur : on a pris pour émeraudes des choses d'une autre nature. L'histoire de la déesse Emeraude, rapportée par Garcilasso de la Vega, me parait plus vraisemblable. Cet auteur dit que les peuples de la vallée de Manta au Pérou, adoraient une émeraude grosse comme un œuf d'autruche ; on la montrait les jours de grande fête, et les Indiens accouraient de toutes parts pour voir leur déesse, et pour lui offrir des émeraudes. Les prêtres et les caciques donnaient à entendre que la déesse était bien-aise qu'on lui présentât ses filles, et par ce moyen ils en amassèrent une grande quantité. Les Espagnols, dans le temps de la conquête du Pérou, trouvèrent toutes les filles de la déesse ; mais les Indiens cachèrent si bien la mère, qu'on n'a jamais pu savoir où elle était. D. Alvarado et ses compagnons brisèrent la plus grande partie des émeraudes sur des enclumes, parce qu'ils croyaient que si elles étaient fines, elles ne devaient pas se casser. Voyez PIERRES PRECIEUSES. (I)

EMERAUDE, (Pharmacie) c'est une des pierres qu'on appelle en Pharmacie fragment précieux. Voyez FRAGMENT PRECIEUX.