Pour faire le régule jovial, il faut mettre dans un creuset une partie de régule martial d'antimoine ; placer le creuset dans un fourneau, le couvrir, et faire du feu autour. Lorsque le régule sera fondu, on y ajoutera deux parties d'étain fin ; et l'étain étant fondu, on remuera avec une verge de fer, ensuite on retirera le creuset du feu, et on versera dans un mortier chauffé.

Lorsque ce régule jovial sera refroidi, on le mettra en poudre fine, et on le mêlera avec autant de nitre purifié et bien sec ; ensuite on mettra dans un creuset rougi entre les charbons ardents une petite cuillerée de ce mélange environ un gros. Il se fera une détonation qu'on laissera passer entièrement, attendant que la matière paraisse fondue dans le creuset, pour y mettre une nouvelle cuillerée du mélange.

Tout étant employé, on laissera la matière en fusion pendant environ un quart-d'heure ; ensuite on la retirera du feu, et on la versera dans de l'eau bouillante. On laissera tremper quelques heures, ensuite on agitera le tout, et on versera par inclination l'eau blanche ; ce qu'on réitérera jusqu'à ce que l'eau ne blanchisse plus, et qu'il ne reste que des grumeaux au fond. Enfin on laissera toutes ces lotions sans y toucher ; il se déposera au fond une poudre grise. On versera l'eau claire qui surnage, et on reversera de nouvelle eau sur la poudre pour la dessaler entièrement ; ensuite on la fera sécher : ce sera l'anti-hectique de la Poterie.

Il y en a qui ne veulent pas prendre le régule martial pour faire le régule jovial ; cependant on doit le préférer à tout autre pour cela, comme faisait l'auteur. Il faut seulement avoir soin de choisir le régule martial fort beau ; et il n'en faut mettre qu'une partie avec deux parties d'étain.

On s'attache trop aujourd'hui à une couleur bleue qu'on veut qu'ait l'anti-hectique de la Poterie ; de sorte que souvent, pour conserver cette couleur, on ne décompose pas assez l'étain. Celui que faisait l'auteur avait d'abord une couleur grise cendrée ; ensuite il le calcinait à un feu de réverbere, ce qui lui donnait une couleur bleuâtre : le feu de réverbere peut tirer des couleurs des chaux métalliques.

Si on ne commençait pas cette opération par faire le régule jovial, une partie de l'étain tomberait au fond du creuset.

L'anti-hectique de la Poterie est une espèce de diaphorétique minéral ; et il en a aussi les vertus : il est même à préférer au diaphorétique ordinaire, lorsqu'il y a complication d'hémorrhagie ou de faiblesse de poitrine. Voyez DIAPHORETIQUE, MINERAL, ÉTAIN.

La Poterie donnait son anti-hectique pour la plupart des maladies qui viennent d'obstruction, pour le scorbut, les écrouelles, et surtout pour l'éthisie.

La méthode dont il se servait pour le faire prendre, était d'en donner le premier jour quatre grains ; et il faisait augmenter chacun des jours suivants d'un ou de deux grains ; de sorte qu'il en faisait prendre jusqu'à quarante, et quelquefois jusqu'à cinquante grains.

On peut dire en général que, dans les maladies longues, dans lesquelles il est nécessaire de faire un long usage des remèdes pour guérir, c'est une très-bonne méthode de les faire prendre d'abord en petite dose, l'augmentant de jour en jour jusqu'à une quantité proportionnée à la force de la maladie et du malade ; et après avoir fait continuer quelques jours cette même quantité, il est bon de diminuer, comme on a augmenté ; et il ne faut pas juger qu'un remède est sans effet, parce qu'il ne guérit pas les maladies dans les premiers jours du régime. Le traitement des maladies doit être différent, selon les différentes maladies : on ne doit pas traiter des maladies longues qu'on appelle chroniques, comme il faut traiter les maladies vives qu'on appelle aiguës. On est longtemps à guérir ou à mourir des maladies longues ; et au contraire on guérit ou on meurt promptement des maladies vives. On doit mettre, pour guérir une maladie, un temps proportionné à celui qu'elle a été à se former ; les maladies longues s'étant formées lentement, ne peuvent et ne doivent point être guéries ou traitées promptement. Tout le monde convient que toutes les maladies viennent plus promptement qu'elles ne passent ; et cependant presque tout le monde fait l'injustice aux Médecins de trouver mauvais qu'ils ne guérissent pas les maladies plus promptement qu'elles n'ont été à se former. Les amis des malades, en les plaignant de leur état, négligent presque toujours de les encourager à faire constamment ce qu'il faut pour guérir ; et ils n'affermissent point leur confiance en la Médecine, au contraire. D'ailleurs, comme les maladies longues se forment d'abord sans qu'on s'en aperçoive, leur guérison est de même insensible ; de sorte que le malade se fatigue de prendre des remèdes, ne croyant pas en recevoir de soulagement ; et le médecin s'ennuie de s'entendre dire que tout ce qu'on fait suivant ses conseils, est inutîle : le malade et le médecin se dégoutent l'un de l'autre, et ils se séparent. C'est ainsi qu'il arrive souvent qu'on regarde comme incurables, des maladies que les Médecins guériraient, si le malade n'était pas impatient, et le public injuste. Voyez CHIMIE MEDICINALE. (M)