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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Gymnastique
S. f. (Médecine, Gymnastique) c'est l'action de nager, sorte de mouvement progressif dont est susceptible un grand nombre d'animaux qui s'en servent pour transporter leur corps d'un lieu à un autre sur la surface ou au-travers des eaux sans aucun appui solide, de façon qu'ils se meuvent dans le fluide comme les oiseaux se meuvent et courent dans les espaces de l'air.

Cependant il y a cette différence entre l'action de voler et celle de nager, que pour se soutenir dans les airs, les animaux volatiles ont besoin d'une force très-grande, à cause que leur corps est d'une gravité spécifique beaucoup plus considérable que celle du fluide dans lequel ils ont à se soutenir suspendus ; au lieu que les animaux qui nagent naturellement n'ont point à employer de forces pour se soutenir suspendus dans l'eau ou sur la surface, parce que leur corps est moins pesant qu'un égal volume de ce fluide dont d'ailleurs la consistance leur sert de soutien.

Ce qui le prouve, c'est que si les animaux terrestres, les oiseaux même tombent dans l'eau, et y sont plongés fort avant, ils reviennent d'eux-mêmes sur l'eau comme un morceau de bois ; ils sont, pour ainsi dire, repoussés du fond vers la surface avec une sorte d'effort, comme pour être lancés au-dessus, sans qu'il y ait aucun mouvement tendant à cet effet de la part de l'animal.

Il n'est personne qui étant dans le bain, n'ait éprouvé qu'en étendant horizontalement les pieds et les mains, on sent que dès qu'on ne fait pas un continuel effort pour s'appesantir et se fixer au fond du vase, l'eau soulève d'elle-même tout le corps jusqu'à ce qu'il y en ait une partie qui surnage.

Ainsi lorsqu'un animal quadrupede ou volatîle est jeté vivant, ou se jette dans l'eau, de quelque manière que cela se fasse, il revient toujours sur la surface, après avoir plongé plus ou moins avant, en sorte qu'il reparait bientôt une grande partie de son corps qui surnage ; c'est constamment la partie supérieure, puisque tandis qu'il a le ventre toujours plongé, le dos et la tête restent au-dessus de l'eau, et il conserve l'attitude qui lui est naturelle en marchant, parce que le centre de gravité de l'animal répond au milieu du bas-ventre qui est toujours tourné en bas comme un pendule, et que la poitrine, le dos et la tête sont moins pesans que le reste du corps.

Il n'en est pas de même par rapport à l'homme, attendu qu'il a la tête, tout étant égal, beaucoup plus pesante que celle d'aucun autre animal, parce qu'il a la masse du cerveau d'un beaucoup plus grand volume ; qu'il lui est par conséquent difficîle de tenir la tête élevée hors de l'eau ; ce qu'il ne peut faire que par l'action de ses pieds et de ses mains, qui en pressant par reprises l'eau de haut en bas, en imitant en quelque sorte l'effet des rames, font faire à son corps incliné, de la tête aux pieds, comme des élancements, des sauts du dedans au dehors de l'eau, qui se répètent avec assez de promptitude pour tenir toujours la tête au-dessus de ce fluide ; ce qui se fait sans aucune peine à l'égard des quadrupedes laissés à eux-mêmes, et sans aucun mouvement de leur part.

C'est ainsi que les poissons se soutiennent, se reposent même et dorment à la surface des eaux, ayant le dos au-dessus et seulement le ventre plongé ; ils ne peuvent s'enfoncer qu'en se rendant plus pesans par la compression de l'air de la vessie qu'ils ont particulièrement destinée à cet usage ; voyez POISSON, et les autres animaux ne peuvent aussi plonger que par l'action musculaire des organes avec lesquels ils nagent, ou en s'efforçant de tendre vers le fond de l'eau, ou par le moyen de quelque corps pesant dont ils se saisissent pour ajouter à leur pesanteur naturelle. Voyez PLONGEUR.

Il suit donc de ce qui vient d'être dit de la comparaison des animaux terrestres et des volatiles avec l'homme par rapport à la disposition respective de leur corps dans l'eau, que celle de l'homme s'oppose à ce qu'il puisse nager naturellement, comme le font tous les autres animaux, parce qu'il n'a pas l'avantage comme eux, que par l'effet de la gravité spécifique, les parties nécessaires à la respiration restent hors de l'eau, et empêchent par ce moyen la suffocation qu'il ne peut éviter, à moins qu'il ne sache industrieusement se soutenir la tête hors de l'eau ; ce que les animaux quadrupedes font par la disposition naturelle de leurs parties, surtout de leur tête, qui, outre qu'elle est plus légère, est figurée de manière que par l'allongement, l'élévation du museau, ils ont beaucoup de facilité pour conserver la respiration.

Ainsi l'on voit pourquoi les animaux nagent comme par instinct, au lieu que c'est un art dans l'homme de pouvoir nager ; art qui suppose une adresse qui ne s'acquiert que par l'exercice propre à cet effet, pour apprendre à soutenir hors de l'eau la tête contre son propre poids, et à plier le cou en arrière pour élever le nez et éviter le défaut de respiration, qui arriverait infailliblement si son corps était abandonné à sa disposition naturelle et à son poids, selon les lois de la gravité spécifique, qui tend toujours à ce que la tête ne soit jamais la partie du corps qui surnage.

Ensorte que quelqu'un qui se noie, après avoir d'abord plongé, reparait ordinairement sur l'eau à plusieurs reprises ; mais rarement montre-t-il alors la tête, à moins que ce ne soit par l'effet des mouvements de ses bras étendus, qui lui servent dans ce cas comme de balancier, pour se tenir en équilibre avec le poids de l'eau et élever la tête au-dessus de la surface ; mais la force des bras ne pouvant le soutenir longtemps, lorsqu'il n'a pas l'habitude de nager, il retombe par son propre poids et replonge la tête à plusieurs reprises, jusqu'à ce que l'eau ayant pénétré dans la poitrine et rempli les voies de l'air, rend le corps plus pesant, et fait qu'il ne reparait plus sur l'eau que lorsqu'après avoir resté au fond un certain temps après la mort, la putréfaction qui s'ensuit développe de l'air dans les boyaux, et même dans la substance des parties molles dont la raréfaction augmente le volume du corps, sans augmenter le poids et le rend plus léger qu'un égal volume d'eau ; d'où résulte que le cadavre est soulevé et parait surnager. Voyez NOYE.

Ce n'est donc pas, selon le préjugé assez généralement reçu, la crainte de se noyer, qui fait que l'homme ne nage pas naturellement, comme les quadrupedes, mais le défaut de disposition dans les parties et dans la figure de son corps, puisque l'on voit des enfants et des imbéciles se jeter hardiment dans l'eau, qui ne laissent pas d'y périr faute de nager, et par conséquent par le seul défaut de disposition à se soutenir dans l'eau comme les animaux, sans y être exposés à la suffocation. Extrait de Borelli de motu animalium, part. I. cap. xxiij.

Quoiqu'on trouve peu dans les ouvrages de Médecine tant anciens que modernes, que l'action de nager soit mise au nombre des exercices utiles à la santé ; cependant il parait qu'elle peut y tenir un rang distingué par les bons effets qu'elle peut produire, étant employée avec les ménagements, les précautions convenables. En effet, il parait hors de doute que, outre l'action musculaire dans presque toutes les parties du corps, à laquelle donne lieu cette espèce d'exercice, comme bien d'autres, l'application de l'eau froide, dans laquelle on nage, contribue, non seulement par son poids sur la surface du corps, mais encore par sa qualité froide, qui ne cesse d'être telle, attendu le changement continuel qui se fait des surfaces du fluide ambiant, par une suite de la progression qu'opère l'action de nager, à condenser, à fortifier les fibres, à augmenter leur élasticité, et à rendre plus efficace leur action sur les fluides, dont il empêche aussi la dissolution et la trop grande dissipation en diminuant la transpiration, selon Sanctorius, Static. medic. sect. II. aphor. xiv. ce qui ne peut qu'être d'un grand avantage dans l'été, où les grandes chaleurs produisent un relâchement général dans les solides, et causent un grand abattement de forces ; voyez CHALEUR ANIMALE, pourvu que la natation ne succede pas à un exercice violent, comme le fait observer cet auteur.

D'où s'ensuit que l'action de nager dans un fleuve ou dans tout autre amas d'eau froide, bien pure, peut joindre le bon effet de l'exercice à celui du bain froid pourvu que cette action ne soit pas excessive, et qu'elle soit suivie des soins, des ménagements que l'on doit avoir, après cette sorte de bain. Voyez BAIN FROID, oecon. anim. Voyez aussi la dissertation de M. Raymond médecin à Marseille, sur le bain aqueux simple, qui a remporté le prix de l'académie de Dijon en 1755.

On observera ici, en finissant, qu'il ne faut pas confondre la natation, qui est l'action de nager, avec une sorte de natation, qui dans le sens des anciens, était une manière de se baigner dans un vase beaucoup plus grand que les baignoires ordinaires : c'est ce qui est désigné par les grecs sous le nom de , qui est aussi rendu en latin par le mot de natatio, selon qu'on le trouve dans les œuvres de Galien, lib. II. de tem. cap. IIe où cette sorte de vase est encore appelée dexamene. Voyez Gorrh. pag. 101.