en Anatomie est un corps musculeux situé dans la cavité de la poitrine, où toutes les veines aboutissent, et d'où toutes les artères sortent ; et qui par sa contraction et sa dilatation alternative, est le principal instrument de la circulation du sang, et le principe de la vie. Voyez ARTERE, VEINE, SANG, VIE, etc.

Les parties principales du cœur sont la base ; c'est le côté droit du cœur. Sa pointe, c'est son extrémité gauche. Son bord antérieur et son bord postérieur, ce sont deux des côtés de sa figure triangulaire. Sa face antérieure supérieure convexe, c'est celle qui regarde un plan horizontal qui serait posé sur la tête. Sa face plate, c'est la face opposée à la précédente. Les deux vestibules, ce sont les cavités qui sont à la base : on y distingue deux parties, l'une plus évasée qu'on appelle sinus ; l'autre plus étroite figurée comme une petite oreille, qu'on appelle oreillette. Ses ventricules, ce sont les deux cavités creusées dans sa substance, et qui le constituent : on les distingue en droit ou antérieur, en gauche ou postérieur. Sa cloison, c'est la partie charnue qui sépare les deux ventricules. Ses valvules tricuspides, mitrales, sigmoïdes. La valvule d'Eustachi. La valvule du trou oval. Le tubercule de Lower, ou l'éminence qui se remarque dans les animaux entre le concours de la veine-cave supérieure et de l'inférieure, dans le parois interne. L'isthme de Vieussens, c'est une éminence que forment les trousseaux de fibres qui se croisent autour du trou oval dans l'oreillette droite. Les colonnes charnues, voyez COLONNES. Le réseau, ce sont des espèces de mailles que les trousseaux de fibres qui garnissent en-dedans les ventricules du cœur, forment par leur entrelacement. Les petites traverses, petits paquets de fibres situées transversalement dans le fond des ventricules du cœur, relativement à l'orifice de l'artere-aorte et de la pulmonaire auxquelles elles répondent. Le trou oval ou botal, par lequel le sang passe dans le foetus de l'oreillette droite dans la gauche. Le sac de Morgagni, c'est un espace qui s'observe entre la valvule du trou oval et son contour. Les orifices des veines de Thebesius et de Verheyen ce sont les orifices des veines qui s'ouvrent dans les ventricules.

Le corps musculeux entier est enfermé dans une capsule appelée péricarde, dont on expliquera la structure et les fonctions sous le mot PERICARDE.

Le cœur a en quelque sorte la figure d'un cone ou d'une pyramide renversée, dont la partie supérieure qui est la plus large est appelée base, et l'inférieure la pointe, qui est un peu tournée vers le côté gauche. La base est accompagnée de deux appendices nommés oreillettes, et de gros vaisseaux sanguins. Voyez OREILLETTE.

Sa grandeur n'est point déterminée, et elle varie dans les différents sujets. Il a pour l'ordinaire six pouces de long, quatre ou cinq de large à sa base, et quatorze de circonférence. Il est situé dans le milieu de la poitrine dans le médiastin, entre les deux lobes des poumons. Il est attaché au péricarde, et soutenu par les gros vaisseaux sanguins qui s'insèrent immédiatement dans sa substance, et il est par ce moyen à couvert des obstacles qui pourraient s'opposer à son mouvement. Il est enveloppé d'une membrane mince, et entouré de graisse vers sa base. Voyez MEMBRANE.

Le cœur est creux, et divisé en général en deux grandes cavités appelées ventricules, dont le droit qui est le plus grand, peut contenir deux ou trois onces de sang : ces ventricules sont séparés par une cloison charnue, composée des mêmes fibres musculaires que les parois : on l'appelle cloison ; sa figure est concave du côté du ventricule gauche, et convexe vers le droit. Ces ventricules n'ont aucune communication immédiate, et le sang ne peut se rendre de l'un dans l'autre, qu'en passant par les poumons.

Les parois de ces ventricules ne sont point également forts et épais ; le gauche l'est beaucoup plus que le droit, parce que sa fonction est de pousser avec force le sang dans toutes les parties du corps ; au lieu que le droit ne le pousse que dans les poumons, encore est-il aidé par d'autres parties.

Il parait en effet que le ventricule droit n'a été fait qu'en faveur des poumons, car l'on ne trouve que le ventricule gauche dans les animaux qui n'en ont point.

On trouve dans les ventricules des petits muscles appelés colonnes charnues, ou lacertuli, lesquels sortent des parois et vont s'attacher par des extrémités tendineuses aux valvules du cœur, dont nous parlerons ci-après.

On observe au-dessus de chaque ventricule une cavité dans chaque oreillette, composée de même qu'eux d'un double rang de fibres charnues. Voyez OREILLETTE.

Les vaisseaux qui sortent du cœur consistent en deux artères, savoir l'aorte et l'artère pulmonaire ; l'aorte sort du ventricule gauche, et l'artère pulmonaire du droit ; et les vaisseaux qui s'y rendent sont deux veines qui aboutissent aux oreillettes, savoir la veine-cave dans la droite, et la veine pulmonaire dans la gauche. Voyez AORTE, PULMONAIRE, etc.

Les artères ont à leur embouchure dans chaque ventricule trois valvules ou membranes semi-lunaires, situées de façon qu'elles s'opposent au retour du sang dans le cœur lors de sa dilatation. Voyez VALVULE.

Les oreillettes communiquent avec les ventricules. A l'orifice du ventricule droit, à l'oreillette droite, sont placées trois valvules appelées tricuspides, à cause qu'elles sont attachées par leurs trois pointes ou colonnes charnues, par plusieurs cordes tendineuses ; de sorte que dans la contraction ou systole du cœur elles ferment l'orifice, et empêchent le sang de rentrer dans l'oreillette droite.

Les deux valvules mitrales font les mêmes fonctions à l'entrée du ventricule gauche, et s'opposent au retour du sang dans l'oreillette gauche. Voyez TRICUSPIDE et MITRALE.

La substance du cœur est entièrement charnue ou musculeuse. Les anciens le prenaient généralement pour un parenchyme : mais Hippocrate a mieux pensé qu'eux là-dessus ; et Stenon, et ceux qui sont venus après lui, ont démontré qu'il est composé d'une suite continue de fibres musculeuses différemment entrelacées, qui aboutissent aux orifices de chaque ventricule, où elles forment leurs tendons.

Lorsqu'on disseque le cœur on découvre, après avoir ôté la membrane propre, sur la surface externe du ventricule droit, quelques fibres fort déliées qui tendent en ligne droite vers sa base. On trouve immédiatement sous celles-ci une double couche de fibres spirales, dont les extérieures montent obliquement depuis la cloison jusqu'à la base, et forment une espèce de vis. Les fibres intérieures prennent une route contraire, se portent obliquement de droite à gauche, et forment pareillement une vis dans un sens opposé : sous celles-ci paraissent les fibres du ventricule gauche, et premièrement une suite spirale qui se porte vers la gauche, sous laquelle, aussi-bien que dans l'autre ventricule, on en trouve une autre qui Ve du côté opposé, laquelle s'étend non-seulement jusqu'aux extérieures qui lui sont semblables, mais environne encore tout le ventricule, et fait que la cloison vient d'une partie du ventricule gauche ; quelques-unes d'elles, au lieu de se rendre comme les autres dans les tendons du cœur, rentrent en-dedans et forment les colonnes charnues, tandis que d'autres se portent vers la pointe qu'elles environnent, et forment le cercle appelé centre du cœur.

Les fibres du cœur paraissent les mêmes que celles des autres muscles ; ce qui fait regarder aujourd'hui cette partie comme un vrai muscle, quoique quelques-uns rejettent cette conséquence comme peu juste ; prétendant que si cela était, l'aorte devrait être regardée comme un muscle. Voyez MUSCLE et AORTE.

Quelques auteurs modernes, après avoir examiné la structure et la disposition des fibres spirales, ont mieux aimé regarder le cœur comme un double muscle, ou comme deux muscles joints ensemble. En effet, les deux ventricules avec leurs oreillettes, font deux corps, deux vaisseaux, deux cavités différentes qui peuvent être séparées sans cesser pour cela d'être des vaisseaux ; d'autant plus que la cloison que l'on croyait auparavant n'appartenir qu'au ventricule gauche, est composée de fibres qui appartiennent à tous les deux. D'ailleurs, si l'on en croit M. Winslow, les deux ventricules sont deux différents muscles, unis ensemble non-seulement par la cloison, mais encore par plusieurs plans de fibres qui partent de la base du cœur, se rencontrent à la pointe, et tapissent les parois du ventricule gauche.

Le cœur a encore des vaisseaux sanguins qui lui sont propres ; savoir deux artères qui sortent de la naissance de l'aorte, et une grande veine avec une ou deux plus petites, que l'on appelle artères et veines coronaires, parce que leurs troncs couronnent en quelque manière la base du cœur. Voyez CORONAIRE.

Les nerfs du cœur et de ses oreillettes viennent d'un plexus de la huitième paire, et du nerf intercostal appelé plexus cardiaque. Voyez NERF et PLEXUS.

Il y a aussi des vaisseaux lymphatiques qui portent la lymphe dans le canal thorachique. Voyez CONDUIT LYMPHATIQUE.

L'usage du cœur est de pousser le sang dans toutes les parties du corps, à quoi contribue principalement son mouvement alternatif de contraction et de dilatation. Par la dilatation, appelée diastole, ses cavités s'ouvrent et se dilatent pour recevoir le sang que les veines y apportent ; et par leur contraction appelée systole, ses cavités se resserrent et se contractent pour repousser de nouveau le sang dans les artères. Voyez OREILLETTE, SYSTOLE, ASTOLETOLE.

Ajoutez à cela, que ces mouvements alternatifs du cœur et de ses oreillettes sont opposés ; car les oreillettes se dilatent pendant que les ventricules se resserrent, et réciproquement.

Au moyen du ventricule droit ; le sang est poussé dans l'artère pulmonaire, d'où il passe dans la veine pulmonaire qui le rapporte dans le ventricule gauche, d'où il se distribue par le moyen de l'aorte dans toutes les parties du corps ; il retourne ensuite par la veine-cave dans le ventricule droit du cœur, ce qui acheve sa circulation. Voyez CIRCULATION.

Schenckius parle d'un homme qui n'avait point de cœur, ce que Molinetti traite de fable ; il nie même qu'il puisse y avait deux cœurs dans un même homme, quoique cela soit fort ordinaire dans divers insectes qui en ont naturellement plusieurs ; témoins les vers-à-soie qui ont une chaîne de cœurs qui s'étend depuis une extrémité de leur corps jusqu'à l'autre. Mais nous avons des preuves incontestables qu'on a trouvé deux cœurs dans la même personne ; on a même trouvé des cœurs que des vers avaient rongé et dévoré.

Muret a ouvert le cœur de quelques bandits, et l'a trouvé entièrement velu, ou du moins revêtu d'une espèce de duvet. Ce qu'il y a encore de plus extraordinaire, est qu'on a Ve des personnes dont le cœur était renversé ou tourné de haut em-bas ; témoin une femme qu'on pendit il y a quelque temps en Saxe, et un homme qui souffrit le même supplice à Paris. Journ. des sav.

Les animaux timides ont toujours le cœur plus grand que ceux qui sont courageux ; comme cela se voit dans le daim, le lièvre, l'âne, etc. On trouve un os dans la base du cœur de certains animaux, surtout du daim, qui parait n'être autre chose que les tendons fibreux du cœur endurcis et ossifiés.

L'histoire rapporte qu'on trouva un pareil os dans le cœur du pape Urbain VIII. lorsqu'on vint à l'ouvrir après sa mort. Le cas est assez ordinaire dans le tronc de l'aorte qui sort immédiatement du cœur. Voyez AORTE et OSSIFICATION.

Il y a plusieurs animaux amphibies, comme les grenouilles, dont le cœur n'a qu'un ventricule. Les académiciens français prétendent que celui de la tortue a trois ventricules ; mais M. Buissière réfute leur sentiment, et soutient qu'il n'en a qu'un. Ce point est encore indécis jusqu'aujourd'hui. Mém. de l'acad. ann. 1703. et Transact. philos. n°. 328.

Théorie du mouvement du cœur. Les Médecins et les Anatomistes modernes ne s'accordent point entre eux sur le principe du mouvement du cœur, ou sur les causes de sa contraction et de sa dilatation alternative.

L'expulsion du sang hors des ventricules, prouve qu'il se fait un mouvement considérable dans cette partie. Il est certain que la force motrice doit surmonter la résistance qu'elle rencontre ; et suivant le calcul de Borelli, la résistance que le sang rencontre dans les artères, est égal à 180000 livres qu'il faut que le cœur surmonte tant que la circulation dure. D'où le cœur peut-il donc recevoir tant de force ? et quelle est cette autre force qui après l'expulsion surmonte la première, et donne aux parties le moyen de se dilater pour produire un mouvement réciproque ? On a été dans de profondes ténèbres là-dessus jusqu'à ce que Lower ait publié son excellent traité du cœur, dans lequel il explique d'une manière admirable le mécanisme de la contraction ou systole de cette partie. Le docteur Drake qui est venu après lui, a heureusement expliqué la cause de sa dilatation ou diastole, que Lower avait entièrement négligée.

Lower et plusieurs autres ont suffisamment prouvé que le cœur est un muscle destiné à produire un mouvement de même que les autres ; et comme il est un muscle solitaire sans aucun antagoniste, et qu'il n'a point un mouvement volontaire, il approche de fort près du sphincter. Voyez SPHINCTER.

Le cœur diffère cependant de tous les autres muscles du corps humain, par l'uniformité et la régularité de ses dilatations et contractions alternatives. Voyez MUSCLE.

Cette vicissitude de mouvements a donné assez d'embarras aux savants, qui, ne découvrant rien dans sa structure qui put nécessairement l'occasionner, ni aucun antagoniste qui put le produire par sa réaction, n'ont su à quoi en attribuer la cause.

La raison et l'expérience prouvent que la contraction est l'action et l'état qui convient naturellement à tous les muscles. Car, dès qu'un muscle n'est plus surmonté par son antagoniste, il se contracte immédiatement ; la volonté ne saurait l'obliger à se dilater. Si l'on coupe, par exemple, le fléchisseur de quelque partie, les extenseurs n'étant plus surmontés par l'action contraire de leurs antagonistes, cette partie sera étendue aussi-tôt, sans que la volonté y ait part, et demeure dans cet état ; la même chose arrive, mais dans un sens contraire, lorsqu'on coupe les extenseurs.

Il s'ensuit donc que les muscles ordinaires n'ont d'autre mouvement de restitution, que celui qu'ils reçoivent de l'action de leurs antagonistes, par lesquels ils sont balancés. Les sphincters, par exemple, de l'anus, de la vessie, etc. qui n'ont point d'antagonistes propres, sont toujours dans un état de contraction, et ne laissent rien passer, à moins qu'ils n'y soient forcés par l'action contraire de quelques muscles plus forts, qui font toutes les fonctions d'antagonistes, sans en porter le nom, toutes les fois que cela est nécessaire. Voyez ANUS, VESSIE, etc.

Nous avons donc ici une cause adéquate de la contraction du cœur ; savoir la force motrice naturelle des fibres musculaires, qui tendent d'elles-mêmes à se contracter. Voyez MUSCULAIRES et FIBRES.

Il est vrai cependant que, quoique les fibres musculaires du cœur mues par les nerfs, soient l'instrument immédiat de sa contraction ou systole, comme l'a fait voir Lower, il ne laisse pas d'y avoir une autre cause qui n'y contribue pas peu, et que Lower n'a pas connue ; savoir les muscles intercostaux et le diaphragme, qui aident et facilitent cette contraction, en ouvrant un passage au sang dans les poumons, lequel lui étant refusé, deviendrait un obstacle invincible. Ajoutez à cela, que l'artère et la veine pulmonaire se répandant dans toutes les divisions et soudivisions des branches des poumons, et y étant pour ainsi dire co-étendues, souffrent les mêmes altérations dans leurs dimensions superficielles, que les bronches dans l'élévation et la dépression des côtes. Dans le temps donc que les côtes sont dans un état de dépression, soit avant ou après leur communication avec l'air extérieur, les cartilages annulaires des bronches se raccourcissent et rentrent les uns dans les autres, et par ce moyen leurs dimensions se trouvent extrêmement contractées ; l'artère et la veine pulmonaire se contractent de même par le moyen de leurs tuniques musculaires, ou se plissent et se rident ; ce qui parait moins probable. D'un autre côté, lorsque les côtes s'élèvent et que le diaphragme s'affaisse, l'air s'introduit dans les poumons, pousse les anneaux cartilagineux, et écarte les bronches de la trachée-artère ; augmente par leur moyen les différentes divisions de l'artère et de la veine pulmonaire, et augmente par-là leurs cavités. C'est ainsi que leur action alternative continue et se communique au cœur, d'où elles sortent.

Par ce moyen le sang passe du ventricule droit du cœur dans le gauche par les poumons, ce qu'il ne pourrait faire autrement ; l'opposition que le sang contenu dans le ventricule eut nécessairement fait à sa contraction, cesse, et la systole devient par-là plus facile. Voyez SYSTOLE.

Quant à la diastole ou dilatation du cœur, M. Lower se contente de l'attribuer au mouvement que font les fibres pour se remettre dans l'état où elles étaient avant leur contraction. Voici ses propres termes : " Puisque tout le mouvement du cœur ne consiste que dans sa contraction, et que toutes ses fibres ne tendent qu'à lui imprimer ce mouvement ; il s'ensuit que tout le mouvement de cette partie consiste dans la systole : mais comme les fibres se raccourcissent au-delà de leur ton dans chaque contraction, il faut de toute nécessité qu'après que l'effort a cessé, le cœur se relâche de nouveau par un mouvement naturel de restitution, et qu'il se dilate pour recevoir le sang qui y est apporté par les veines. La diastole ne se fait donc par aucune nouvelle action du cœur ; elle n'est que la suite de la cessation de sa première tension et de l'affluence du sang dans ses cavités ".

S'il est vrai, comme Lower le prétend, que la contraction soit la seule action de ces fibres, comment se peut-il faire que leur distension, qu'on appelle communément, quoique mal-à-propos, leur relâchement, soit un mouvement de restitution ? car la nature et la disposition de ces fibres prouve clairement que le cœur est fait en forme de cone, et qu'il est dans un état violent pendant sa dilatation. Il s'ensuit donc que la contraction est le vrai mouvement de restitution, et le seul état dans lequel il retourne de lui-même lorsque l'action a cessé ; de sorte que nous sommes toujours obligés de chercher la véritable cause de la diastole, qui parait le phénomène le plus difficîle qu'on remarque dans le cœur.

M. Cowper, dans l'introduction à son anatomie, augmente la part que M. Lower donne au sang dans cette action, et le regarde comme le principal instrument de la dilatation du cœur ; M. Drake son sectateur ne s'accorde cependant pas avec lui sur la manière et la cause de cette dilatation.

" Le cœur de l'animal, dit M. Cowper, a beaucoup de rapport avec les pendules des automates artificiels, des horloges, et des montres portatives, en ce que son mouvement se fait comme celui des autres muscles, par le moyen du sang qui fait l'office d'un poids ". Supposé que cet auteur ait voulu dire que le sang en retournant dans les oreillettes et les ventricules du cœur, les oblige à se dilater en pesant sur eux, en agissant comme un contre-poids à sa contraction, entant que muscle, il est dommage qu'il n'ait pas donné une plus ample explication d'un phénomène aussi difficîle et aussi important ; la pesanteur spécifique du sang ne parait pas une cause adéquate de l'effet qu'on suppose qu'il produit dans cette occasion. Car, supposé que le sang n'agisse ici que comme un poids par une simple gravitation, il ne peut employer dans cette action, en descendant de la partie supérieure du cœur, qu'une force équivalente à cinq livres au plus, quoiqu'il ait à surmonter, suivant la supputation de Borelli, une résistance de 135000 livres. Quelle que soit la force qui dilate le cœur, et la cause de sa diastole, elle doit être égale à celle du cœur, des muscles intercostaux et du diaphragme, contre laquelle il agit comme un antagoniste.

Il est peut-être difficîle et même impossible de trouver une telle puissance dans la machine du corps animal ; et cependant, sans le secours d'un pareil antagoniste, il est impossible que la circulation du sang puisse continuer. Tous les ressorts qu'on a découverts jusqu'aujourd'hui dans le corps humain, concourent à la contraction du cœur, qui est un état de repos auquel il tend naturellement ; cependant nous les trouvons alternativement dans un état de violence ou de dilatation ; et c'est cependant de cette alternative que dépend la vie de l'animal.

Il est donc nécessaire de trouver quelque cause extérieure capable de produire ce phénomène, soit dans la qualité de l'air ou dans la pression de l'atmosphère, puisque nous n'avons point de commerce constant et immédiat avec d'autres milieux.

Quelques physiciens ayant observé que nous ne pouvons subsister, dès que la communication que nous avons avec l'air extérieur est interrompue, ont imaginé qu'il se mêle pendant l'inspiration certaines parties de l'air extrêmement pures avec le sang qui est dans les poumons, lesquelles passent avec lui dans le cœur, où elles entretiennent une espèce de flamme vitale, qui est la cause du mouvement réciproque de cette partie.

D'autres ont nié l'existence de cette flamme actuelle, et prétendu que les parties les plus subtiles de l'air venant à se mêler avec le sang dans les ventricules du cœur, produisent une effervescence qui l'oblige à se dilater.

Mais on a rejeté tous ces différents sentiments, et l'on est encore aujourd'hui dans le doute s'il se mêle quelques particules d'air avec le sang dans les poumons, ou non. Voyez POUMON, AIR, etc.

En supposant même qu'il s'insinue quelque portion d'air dans la veine pulmonaire, il ne peut autrement dilater le cœur que par une effervescence dans le ventricule gauche, qui ne serait point suffisante pour dilater le droit : mais la dissection anatomique de la partie ne suffit-elle point pour détruire ce sentiment, qui a été suffisamment réfuté par un grand nombre d'excellents auteurs ? Voyez RESPIRATION.

Quoi qu'il en sait, la masse de l'atmosphère parait être le véritable antagoniste de tous les muscles qui servent à l'inspiration ordinaire et à la contraction du cœur ; et cela se trouve confirmé non-seulement par sa puissance, mais encore par la nécessité de son action sur les corps animaux. Voyez ATMOSPHERE.

Le cœur, comme nous l'avons déjà observé, est un muscle solitaire d'une force extraordinaire, qui est encore augmentée par les muscles intercostaux et le diaphragme, qui n'ont point d'antagonistes ; de sorte qu'elle a besoin d'être contrebalancée par quelque force équivalente quelle qu'elle puisse être : car quoique l'action des muscles intercostaux soit volontaire, ils ne sont pas pour cela exempts de la condition des autres muscles qui servent aux mouvements volontaires, lesquels seraient dans une contraction perpétuelle, nonobstant l'influence de la volonté, sans le balancement des muscles antagonistes. Le poids de l'atmosphère qui presse sur la poitrine et sur toutes les autres parties du corps, supplée à ce balancement qui se trouve entre les autres muscles ; et comme dans tous les autres mouvements volontaires l'influence de la volonté ne fait qu'augmenter l'action de l'une des deux puissances qui étaient auparavant en équilibre ; de même elle ne sert ici qu'à donner à ces muscles assez de force pour soutenir un poids qui surmonterait leurs forces, s'ils n'étaient point secondés de la manière que je viens de le dire. Aussi-tôt que ce secours vient à manquer, les côtes s'abaissent de nouveau par la seule pesanteur de l'atmosphère ; ce qu'elles ne feraient point sans cela, malgré le penchant naturel qu'ont ces muscles à se contracter.

Cela est suffisamment prouvé par les expériences de Torricelli, et par celles qu'on a faites sur des animaux dans le vide, où dès que la pression de l'air est ôtée, les muscles intercostaux et le diaphragme sont contractés, les côtes s'élèvent dans le moment, et la volonté ne peut plus les obliger à s'abaisser, à moins que l'air ne vienne à son secours, et ne les y force par sa pression.

Comme dans l'élévation des côtes le sang est en quelque sorte obligé d'entrer dans les poumons par le passage qu'il trouve ouvert ; de même lorsqu'elles viennent à s'abaisser, il est forcé, par l'affaissement des poumons et par la contraction des vaisseaux sanguins, de passer par la veine pulmonaire dans le ventricule gauche du cœur : cela joint au poids de l'atmosphère qui presse sur toute la surface du corps qu'il entoure de tous côtés, est cette puissance qui oblige le sang à monter dans les veines, après que la force que le cœur lui avait imprimée a cessé ; et elle suffit même pour obliger le cœur à sortir de son état naturel, et à se dilater.

Lorsqu'on vient à supputer la pesanteur d'une colonne d'air égale à la surface du corps, on s'aperçoit qu'elle suffit pour produire les effets qu'on lui attribue. Si l'on considère outre cela que les corps des animaux sont des machines capables de céder à la pression, on connaitra sans peine qu'elle doit agir sur eux de la manière que nous l'avons dit. Cependant quoique nos corps soient entièrement composés de petits tubes ou vaisseaux remplis de fluides, cette pression, quelque grande qu'elle sait, étant la même par-tout, ne pourrait les affecter, à moins que les dimensions superficielles ne variassent également ; à cause qu'étant également pressés par-tout avec le même degré de force, les fluides qu'ils contiennent ne pourraient se retirer dans aucun endroit, et faire place à ceux qui les suivent, mais demeureraient aussi fixes et aussi immobiles que s'ils étaient actuellement solides. Voyez FLUIDE et AIR.

Mais la dilatation de la poitrine fournit assez d'espace aux fluides pour se mouvoir, et son resserrement leur imprime un nouveau mouvement ; ce qui est le principe de la circulation continuelle du sang.

Cette dilatation et cette contraction réciproque des dimensions superficielles du corps paraissent si nécessaires à la vie de l'animal, qu'il n'y en a aucun, quelqu'imparfait qu'il sait, dans lequel elles ne se trouvent ; pour le moins on n'en a encore découvert aucun dans lequel elles n'aient existé.

Quoique les côtes et les poumons d'un grand nombre de poissons et d'insectes n'aient aucun mouvement, et que leur poitrine par une suite nécessaire ne puisse point se dilater, ce défaut est cependant réparé par un mécanisme analogue qui supplée autant qu'il faut aux besoins de la vie. Les poissons, per exemple, qui n'ont point de poumons, ont des ouies qui font les mêmes fonctions qu'eux ; car elles reçoivent et rejettent l'eau alternativement ; de sorte que les vaisseaux sanguins souffrent la même altération dans leurs dimensions, que dans les poumons des animaux les plus parfaits. Voyez OUIES.

Quoique les poumons des insectes diffèrent autant que ceux des poissons de ceux des animaux parfaits, ils ont cependant la même action et le même usage qu'eux, c'est-à-dire qu'ils servent à chasser l'air et à varier les dimensions et la capacité des vaisseaux sanguins. Comme ils n'ont point de poitrine ou de cavité séparée pour le cœur et les vaisseaux qui reçoivent l'air, ces derniers se distribuent dans tout le tronc, par le moyen duquel ils communiquent avec l'air extérieur par différents soupiraux, auxquels sont adaptés différents sifflets qui envoyent des rameaux dans tous les muscles et dans tous les viscères, et paraissent accompagner les vaisseaux sanguins par tout le corps, de même que dans les poumons des animaux parfaits. Par cette disposition le corps s'enfle dans chaque inspiration, et se resserre dans chaque expiration ; ce qui doit causer dans les vaisseaux sanguins une vicissitude d'extension et de contraction, et imprimer un plus grand mouvement dans les fluides qu'ils contiennent, que ne le ferait le cœur qui ne parait point musculeux dans ces animaux.

Le foetus est le seul animal qui soit exempt de la nécessité de recevoir et de chasser alternativement quelque fluide ; mais pendant qu'il est enfermé dans la matrice, il ne parait avoir tout-au-plus qu'une vie végétative, et ne mérite point d'être mis au nombre des animaux ; et sans cette petite portion de mouvement musculaire qu'il exerce dans la matrice, on pourrait sans absurdité le regarder comme une greffe ou une branche de la mère. Voyez FOETUS, EMBRYON, etc.

On peut objecter contre la doctrine que nous venons d'établir, que le cœur de plusieurs animaux ne bat pas avec moins de régularité et moins de force dans le vide que dans l'air, comme M. Boyle l'a expérimenté avec ceux des grenouilles. Trants. phil. n°. 62.

Estimation de la force du cœur. La quantité de la force du cœur a été différemment estimée, et sur divers principes, par plusieurs auteurs ; mais particulièrement par Borelli, Morland, Keill, Jurin, etc.

On peut déterminer la force du cœur par le mouvement avec lequel il se contracte, ou par le mouvement d'un poids qui étant opposé au sang tel qu'il existe hors du cœur, soit capable de le balancer et d'en arrêter le cours. Nous n'avons aucun moyen de pouvoir en venir à-bout à priori, à cause que nous ne connaissons qu'imparfaitement la structure interne de cette partie, et la nature et la force de la cause d'où dépend la contraction ; de sorte que le seul moyen qui nous reste est de l'apprécier par les effets.

Toute l'action du cœur consiste dans la contraction de ses ventricules ; à mesure que ceux-ci se contractent, ils pressent le sang ; et lui communiquant une partie de leur mouvement, ils le poussent avec violence dans les passages qu'il trouve ouverts. Le sang ainsi poussé dans l'aorte et dans l'artère pulmonaire, fait effort de toutes parts, partie contre les tuniques des artères qui étaient devenues flasques dans la dernière diastole, et en partie contre le sang qui le précède, et dont le mouvement est trop lent. Par ce moyen les tuniques des artères se tendent peu-à-peu, et le mouvement du sang dont nous venons de parler, devient plus rapide.

Il est bon d'observer en passant, que plus les artères sont flasques, moins elles font de résistance au sang qui veut les dilater ; et que plus elles sont tendues, plus aussi s'opposent-elles avec force à une plus grande dilatation ; de sorte que toute la force du sang au sortir du cœur est d'abord plutôt employée à dilater les artères, qu'à pousser le sang qui le précède ; au lieu que dans la suite il agit moins sur les artères, que sur le sang qui s'oppose à son cours.

Borelli, comme nous l'avons déjà observé, dans son oeconom. anim. suppose les obstacles qui s'opposent au mouvement du sang dans les artères, équivalents à 180000 livres, et la force du cœur à 3000 ; ce qui n'est qu'un 1/60 de la résistance qu'il rencontre. Si l'on déduit 45000 livres pour le secours fortuit qu'il reçoit de la tunique musculaire élastique des artères, il reste pour le cœur une force de 3000 livres, avec laquelle il doit surmonter une résistance de 135000 livres, c'est-à-dire écarter avec une livre de force un obstacle de quarante-cinq livres ; ce qu'il fait, à ce que suppose cet auteur, par la force de percussion.

S'il eut poussé son calcul jusqu'aux veines, qu'il prétend contenir quatre fois plus de sang que les artères, et dans lesquelles cette force de percussion ne se fait point sentir du tout, ou du moins que très-foiblement, il n'eut pas eu de peine à reconnaître l'insuffisance du système de percussion.

On accuse même son calcul de fausseté, et l'on prétend que la force qu'il attribue au cœur est infiniment trop grande.

Le docteur Jurin fait voir que si Borelli ne se fût point trompé dans son calcul, il eut trouvé la résistance que le cœur est obligé de surmonter beaucoup plus grande, même suivant ses principes, et qu'elle eut été de 1 076 000, au lieu de 135000 ; ce qui passe toute vraisemblance.

Le plus grand défaut de la solution consiste, suivant le docteur Jurin, en ce qu'il a apprécié la force motrice du cœur par un poids en repos ; en ce qu'il a supposé dans une de ses expériences que le poids que soutient un muscle est entièrement soutenu par sa force de contraction ; que les muscles qui ont la même pesanteur sont également forts ; enfin que la force du cœur augmente à chaque systole, etc.

Le docteur Keill, dans ses essais sur l'oecon. anim. a le premier abandonné le calcul de Borelli, auquel il en a substitué un autre infiniment plus petit. Voici comment il estime la force du cœur. Supposant que l'on connaisse la vitesse d'un fluide, et faisant abstraction de la résistance qu'il rencontre de la part d'un autre fluide, on détermine la force qui le met en mouvement comme il suit. Sait la ligne a la hauteur de laquelle doit tomber un corps pour avoir une vitesse égale à celle du fluide, la force qui met ce fluide en mouvement sera égale au poids d'une colonne du même fluide, dont la base serait égale à l'orifice, et la pesanteur à 2 a. Coroll. 2. prop. 36. lib. II. des principes de Newton.

Maintenant le sang qui sort du cœur trouve une résistance qui retarde son mouvement de la part de celui qui circule dans les veines et les artères ; ce qui l'empêche de couler avec toute la vitesse que le cœur lui imprime, une partie de cette force étant employée à surmonter la résistance de la masse du sang. Supposé donc que l'on connaisse de combien la vitesse du sang est diminuée par cette résistance, ou quelle est la proportion entre la vitesse du sang qui rencontre cette résistance, et celle du sang qui n'en trouve aucune ; il ne sera pas difficile, après avoir déterminé la première, de trouver la seconde, et par conséquent la force absolue du cœur. L'auteur s'est servi, pour la découvrir, de l'expérience suivante.

Après avoir découvert l'artère et la veine iliaque dans la cuisse d'un chien près du tronc, et y avoir fait les ligatures convenables, il coupa les vaisseaux et reçut pendant dix secondes le sang qui en sortit. Il fit la même chose sur l'artère pendant le même espace de temps, et il pesa avec soin la quantité de sang qui sortit de ces deux différents vaisseaux : il réitéra la même expérience, et il trouva enfin que la quantité de sang qui était sortie de l'artère, était à celle qu'avait donnée la veine dans le même espace de temps, à-peu-près comme 7 1/2 à 3.

La vitesse du sang dans l'artère iliaque si près de l'aorte, doit être à-peu-près la même que dans l'aorte ; d'où il suit que la vitesse avec laquelle il sort par l'artère iliaque après qu'on l'a coupée, est égale à celle qu'il aurait au sortir du cœur lorsqu'il ne trouve aucune résistance ; ou, ce qui revient au même, le sang sort par l'ouverture de l'artère iliaque avec toute la vitesse qu'il a reçue du cœur. Tout le sang qui passe dans l'artère iliaque, y revient de nouveau par la veine iliaque, et par conséquent la quantité de sang qui passe dans toutes les deux dans le même temps doit être égale. Il s'ensuit donc que la quantité de sang qui sort par l'ouverture de la veine iliaque, est égale à celle qui a passé dans l'artère iliaque avant qu'on l'ait coupée, dans le même espace de temps. Puis donc que nous connaissons la quantité de sang qui passe dans l'artère iliaque lorsqu'elle est coupée et avant qu'elle le sait, il s'ensuit que nous avons leur vitesse ; car la vitesse d'un fluide qui coule dans le même tuyau dans un espace de temps égal, est directement comme sa quantité : mais la vitesse du sang lorsque l'artère est coupée, est égale à celle qu'il reçoit du cœur ; et la vitesse lorsqu'elle n'est point coupée, est celle avec laquelle le sang coule dans l'aorte, dans laquelle il trouve de la résistance : d'où l'on voit que ces deux vitesses sont l'une à l'autre comme 7 1/2 à 3.

Si l'on suppose maintenant que le cœur jette deux onces de sang à chaque systole, ce qui est assez vraisemblable, le sang doit parcourir dans l'aorte 156 pieds en une minute ; de sorte que la vitesse absolue avec laquelle il est poussé dans l'aorte, est capable de lui faire courir 390 pieds en une minute, ou 6 pieds 1/2 en une seconde, s'il ne trouvait aucune résistance.

Recherchons maintenant de quelle hauteur doit tomber un corps pour acquérir la vitesse que nous lui avons donnée ; car cette hauteur étant doublée, donne la hauteur d'un cylindre dont la base est égale à l'orifice de l'aorte, et la pesanteur à la force absolue du cœur.

L'on sait par expérience que la force de gravité fait parcourir à un corps 30 pieds en une seconde, ce qui est la vitesse qu'il acquiert en tombant de la hauteur de quinze pieds ; d'où il suit que cette vitesse est à celle du sang qui coule sans trouver de la résistance dans l'aorte, comme 30 à 65. Mais comme les espaces qui font acquérir aux corps les vitesses que nous leur avons données, sont comme les carrés de ces mêmes vitesses, c'est-à-dire comme 900 à 4225, il s'ensuit qu'il y a même rapport de 900 à 4225, que de 15 à 0 74. Cette hauteur étant doublée, donne 148 ou 1776 pouces ; ce qui est la hauteur d'une colonne de sang dont la base est égale à l'aorte que nous avons supposée égale à 04187 ; et par conséquent le solide qu'elle contient est 7 436112, dont la force est égale à la force absolue du cœur. Cette force est de cinq onces ; d'où il suit que la force du cœur est égale à un poids de cinq onces.

Ce même auteur a trouvé par un calcul fondé sur les lois des corps mis en mouvement, que la force du cœur est presque égale à huit onces ; et quoique cette quantité diffère quelque peu de la précédente, elle n'est rien, eu égard au calcul de Borelli, dont l'erreur ne vient, à ce que prétend le Docteur Keill, que de ce qu'il n'a mis aucune différence entre le sang qui est en repos, et celui qui était déjà en mouvement. Il est certain que la force du cœur n'est point employée à donner du mouvement au sang qui est en repos, mais seulement à l'entretenir dans le mouvement qu'il avait déjà : de savoir maintenant d'où il a reçu ce premier mouvement, c'est ce qui n'est pas au pouvoir de l'homme de déterminer. Il est facîle de démontrer que le cœur n'a jamais pu mettre le sang en mouvement, supposé que la résistance de ce dernier ait toujours été telle qu'on la trouve aujourd'hui. Si le sang était toujours mu en-avant avec le mouvement qu'il a d'abord reçu, et que les tuniques des vaisseaux ne fissent aucune résistance, le sang qui le précède ne pourrait le retarder, et sa force serait toujours égale à la force absolue du moteur : mais comme il trouve de la résistance de la part des tuniques des vaisseaux sanguins, et qu'il est obligé d'employer une partie de la force qu'il a reçue pour les dilater, son mouvement est continuellement retardé, et s'anéantirait à la fin si le cœur ne lui en communiquait un nouveau : c'est pourquoi la force du cœur doit nécessairement être égale à la résistance que le sang rencontre lorsqu'il se meut : si elle était plus grande, la vitesse du sang augmenterait continuellement ; et elle diminuerait sans-cesse si elle était moindre : d'où il suit que si la circulation du sang venait une fois à cesser, toute la force du cœur serait incapable de le mettre de nouveau en mouvement.

Mais c'est assez nous arrêter au système du docteur Keill. Le docteur Jurin ne le trouve pas exempt de défauts, et condamne la supposition qu'il fait, que la pesanteur qui peut donner le mouvement à l'eau qui sort d'un vaisseau, est la cause de ce même mouvement : ce dernier auteur croit que Keill a mal entendu le corollaire de M. Newton, et il prétend que l'eau qui tombe par sa propre pesanteur acquiert son mouvement d'elle-même, et que le poids qui tombe en même temps, ne reçoit qu'un mouvement égal à celui qu'a l'eau hors du vaisseau. Il fait encore plusieurs autres objections contre ce système, auxquelles l'auteur a répondu dans les transactions philosophiques. Son antagoniste n'a pas demeuré sans replique ; et cette dispute n'en fût pas restée-là, si la mort de l'auteur ne l'eut terminée.

Le docteur Jurin n'a pas laissé que de donner un autre calcul, fondé sur des principes auxquels il n'y a rien à redire ; mais son adversaire a pris de-là occasion de rentrer en lice avec lui.

Il considère un des ventricules du cœur qui pousse le sang, comme un corps donné qui en pousse un autre qui est en repos avec une vitesse donnée, et qui après lui avoir communiqué une partie de son mouvement, marche avec lui avec une vitesse commune. Sur ce principe, la quantité de la force du cœur doit être égale au produit du nombre qui désigne le poids du ventricule, par celui qui désigne sa vitesse avant qu'il pousse le sang, ou à la somme du mouvement du ventricule et du sang qui en sort, et de celui qu'il communique aux tuniques des artères et au sang qui le précéde.

On peut démontrer 1°. que le mouvement de contraction d'une machine creuse qui se contracte inégalement, est égal à la somme ou nombre qui exprime les différentes parties de la machine, multiplié par celui qui marque leurs vitesses respectives, d'où il suit que le mouvement de la machine est égal au nombre qui désigne la quantité de son poids par quelqu'autre nombre qui indique la vitesse moyenne entre les particules qui se meuvent avec le plus de vitesse, et celles qui se meuvent plus lentement. 2°. Que lorsque l'eau comprimée sort par l'orifice d'une telle machine, son mouvement est égal à la somme de chaque section transversale de tous les filets d'eau multipliés par leurs hauteurs et leurs vitesses respectives ; d'où il suit que le mouvement de l'eau est égal à la somme de l'eau qui s'écoule par quelque longueur moyenne entre celle du plus long filet d'eau, et celle du plus court. Supposé donc que l'on ait plusieurs machines semblables pleines d'eau, et pressées de même, soit également ou inégalement, le mouvement de l'eau qui sort par l'orifice d'une d'elles, sera en raison composée de la raison quadruplée de tout diamètre homologue de la machine, et de la raison réciproque du temps dans lequel la contraction se fait.

Ces principes une fois posés, il est aisé d'en déduire la solution du problème, dans lequel on demande de trouver la force du cœur. Car, appelant la pesanteur du ventricule gauche, ou la quantité du sang qui lui est égale, p ; la surface interne du ventricule, s ; la longueur moyenne des filets du sang qui en sortent, l ; la section de l'aorte, s ; la quantité de sang contenue dans le ventricule gauche, q ; le temps que le sang met à sortir du cœur égal à la résistance des artères, et du sang qui le précède, t ; la vitesse variable avec laquelle le sang sortirait de l'aorte, s'il ne trouvait aucune résistance, v ; la longueur variable de l'aorte que le sang parcourt, x ; et le temps pendant lequel cette longueur est parcourue, z ; la vitesse variable moyenne du sang contigu au ventricule, ou la vitesse moyenne du ventricule même sera = (s v)/S ; le mouvement du ventricule = p x (s v)/S ; le mouvement du sang qui en sort = s v x l + x ; et leur somme ou la force du ventricule = s v x (P/s + l + x). Mais v = x/z ; d'où l'on trouve par la méthode inverse des fluxions, que la force du ventricule est = s x/z x (P/s + x/2 + l) : mais puisque z = t, s x = q, il s'ensuit donc que la force du ventricule = q/t x (P/s + q/2 s + l) : on trouve de la même manière, en se servant de lettres grecques, au lieu de lettres italiques, la force du ventricule droit = q/t x (/Sigmagrec> + q/2 + ) ; de sorte que la force entière du cœur est = q/t x (p/S + / + q/ 2 s + q/ 2 + l + ) C. Q. F. D.

Si l'on suppose maintenant que p soit égal à 8 onces, et à 4, S 10 pouces carrés ; et = la même quantité ; l = 2, et = 1 1/2 pouce ; q = 2 onces ; s = 0, 4185 pouces carrés ; = 0, 583 ; et t = 1": les forces des ventricules seront égales aux poids ci-dessous : savoir,

Ces poids ont une vitesse qui leur ferait parcourir un pouce en une seconde.

Coroll. Il suit de là que lorsque le pouls est plus vite qu'à l'ordinaire, il faut que la résistance soit moindre, ou que la force du sang ait augmenté, ou qu'il sorte une moindre quantité de sang à chaque contraction du cœur, et vice versâ. Il suit encore, que si la résistance augmente ou diminue, il faut que le pouls ou la quantité de sang que le cœur pousse à chaque contraction, augmente ou diminue respectivement ; et que lorsque la force du cœur augmente ou diminue, le pouls doit être plus vite, ou la résistance moins grande. Voyez POULS.

Le docteur Jurin entreprend de démontrer par ces principes les théorèmes suivants.

1°. Que le mouvement total de résistance que le sang rencontre en sortant du cœur dans chaque systole, ou le mouvement qu'il communique au sang qui le précéde, et aux tuniques des artères, est à-peu-près égal à la force totale du cœur.

2°. Que le mouvement communiqué au sang qui précède celui qui sort du cœur dans le systole, est au mouvement communiqué aux tuniques des artères, comme le temps de la systole est à celui de la diastole. Supposons donc, avec M. Keill, que la systole s'acheve dans le tiers de l'intervalle qui s'écoule entre deux pouls, le mouvement communiqué au sang qui devance celui qui sort du cœur, sera le tiers de tout le mouvement du cœur ; et celui qui est communiqué aux artères, les deux tiers de ce même mouvement.

3°. Dans les différents animaux, la force du cœur est en raison composée de la raison quadruplée du diamètre de quelque vaisseau homologue que ce sait, et de la raison inverse du temps pendant lequel le cœur se contracte ; ou en raison composée de la raison de la pesanteur du cœur, ou de l'animal entier, de la raison soudoublée de la même pesanteur, et de la raison réciproque du temps.

Nous allons finir cet article par une table qui contient le résultat de plusieurs expériences que M. Halles a faites sur la vitesse du sang dans les animaux, et sur d'autres considérations de la même nature L'appareil de ces expériences est simple. Il faut avoir un tuyau de cuivre recourbé assez court, et d'un 1/6 de pouce de diamètre ; un tuyau de verre de neuf à dix pieds de longueur, et du même diamètre que celui de cuivre ; un troisième tuyau de cuivre qui joigne et affermisse ensemble les deux tubes précédents, en les embrassant : quand ils sont adaptés l'un à l'autre, on commence par lier le vaisseau destiné à l'expérience ; on le perce, on insere dans l'incision le petit tuyau du cuivre recourbé ; on acheve le reste de l'appareil : tous ces tuyaux sont gradués par des divisions très-petites.

On voit par ces tables qu'en comparant les poids des animaux, et les quantités correspondantes de sang qui passent dans leurs cœurs dans un temps donné, on n'en peut rien tirer de fixe.

Que ces quantités dans les grands animaux sont fort disproportionnées à leurs corps, en comparaison de ce qu'elles sont dans les petits animaux.

Que le sang ayant dans les grands animaux une plus grande course à faire et plus de résistance à vaincre, en comparant les hauteurs perpendiculaires du sang dans les tubes fixés aux artères, la force du sang artériel est particulièrement plus grande dans les animaux les plus grands.

Qu'en supposant les vaisseaux sanguins de l'homme et du cheval distribués également dans toutes leurs parties homologues, alors le sang se devrait mouvoir dans ces animaux avec des vitesses réciproques aux temps durant lesquels des quantités de sang égales à leurs poids relatifs passent dans leur cœur, et par conséquent dans le rapport de 60 à 18, 15 minutes.

Et que, quoique le sang artériel du cheval soit poussé avec une plus grande force que celui de l'homme, cependant il se meut plus lentement dans le cheval, à raison du plus grand nombre de ramifications et de la longueur des vaisseaux plus grande dans les plus grands animaux, etc.

Le savant physicien que nous citons, a fait les mêmes expériences sur les vaisseaux des muscles et sur ceux des poumons. Voyez dans son ouvrage le détail de ces expériences, des expériences précédentes, et des inductions qu'il en tire sur la force du cœur.

Une des principales différences entre l'homme et les bêtes, consiste en ce qu'il y a beaucoup plus de correspondance entre la tête et le cœur de l'homme que dans les autres animaux. Or cette correspondance est produite par le grand nombre de nerfs que le cerveau envoye au cœur et aux parties circonvoisines : dans les bêtes, il ne vient des nerfs du cerveau aux parties circonvoisines du cœur, que par les branches de la paire vague ; au lieu que dans l'homme il en vient encore par la paire intercostale.

La raison de cette difference, selon le docteur Willis, c'est que les brutes n'ayant point de discernement et peu de passions, elles n'ont pas besoin comme l'homme d'un double passage pour les esprits ; l'un pour l'usage des fonctions vitales, l'autre pour l'impression réciproque des affections. Voyez NERF, ESPRIT, CERVEAU, etc.

COEUR. (maladie du) On ne peut rien ajouter à l'exactitude et à la précision avec laquelle M. de Senac a exposé les maladies du cœur, dans son savant traité sur la structure de cette partie. Nous allons donner un extrait de sa doctrine sur cette matière.

L'auteur commence par faire un détail des causes qui augmentent ou qui diminuent l'action du cœur : il entre à cet égard dans des examens fort importants, et qu'il est très-nécessaire que ceux qui suivent les théories les plus répandues, et qui en font les fondements de leur pratique, lisent avec attention. Nous exposerons l'action générale de toutes ces causes aux articles EPAISSISSEMENT DES HUMEURS, OBSTRUCTION, PLETHORE, SPASME, IRRITATION.

M. de Senac donne ensuite une idée générale des maladies propres du cœur, pour conduire à un détail particulier sur chacune de ces maladies. Les mouvements du cœur, dit-il, sa structure, la délicatesse de ses oreillettes, celle des valvules artérielles et veineuses, les frottements du cœur, et le nombre et l'action continuelle de ses nerfs, sont autant de causes apparentes de la possibilité des maladies propres du cœur ; sans oublier les efforts des passions, les obstacles que le sang peut trouver dans le poumon, l'action des corps externes, et les écoulements des matières âcres dont le sang lui-même est souvent chargé : mais, ajoute l'auteur, la nature trompe souvent nos craintes comme nos espérances. On peut dire en général que les maladies du cœur sont rares.

Mais quelque rares qu'elles soient, elles ne sont que trop fréquentes, ne fût-ce que parce qu'elles sont difficiles à connaître. En effet, il n'est pas aisé de donner, dans les recherches si épineuses, des règles fixes pour distinguer ces maladies d'avec celles qui ont quelques symptômes communs avec elles ; tels sont les mouvements irréguliers de nerfs, l'affection hypocondriaque, l'affection hystérique, et les différentes maladies de la poitrine qui portent singulièrement sur le cœur, et qui causent des palpitations et des variations dans le pouls : or les palpitations et les changements du pouls sont les premiers signes auxquels on doit s'attacher pour s'orienter sur les maladies du cœur.

Il y a pourtant des indices qui peuvent faire distinguer les cas où ces symptômes dépendent essentiellement de cet organe ; car si les accidents cessent en divers temps, ou dans de longs intervalles ; si tous les mouvements du cœur rentrent ensuite dans l'ordre naturel, on peut assurer qu'en tous ces cas différents les maladies ne sont que des maladies sympathiques ou qui n'appartiennent pas, à proprement parler, au cœur.

Au contraire, si le pouls est constamment irrégulier et variable, s'il change ainsi que le mouvement du cœur au plus leger exercice, on peut prononcer en général qu'il y a quelque vice ou quelque obstacle dans le cœur ; mais ces vices ou ces obstacles étant quelquefois compliqués avec des dérangements à-peu-près semblables de la base de l'aorte ; et les dérangements de l'artère, lorsqu'ils sont seuls, étant très-difficiles à distinguer d'avec ceux du cœur, il est fort heureux que le danger où l'on est de se tromper dans ces cas-là, ne soit pas de grande conséquence.

Telles sont les règles nécessaires pour ne pas confondre les maladies propres du cœur avec les maladies sympathiques. Il n'est pas moins essentiel de distinguer ces maladies propres les unes des autres. Premièrement, les dilatations des diverses cavités du cœur peuvent être discernées par les signes suivants ; en général, les battements du cœur ne sont pas violents, dit M. de Senac : quand le ventricule droit ou le sac de ce ventricule sont extrêmement dilatés, à peine les dilatations produisent-elles des palpitations ; dans beaucoup de cas les malades sentent seulement un grand poids dans la région du cœur, ils sont sujets à des syncopes, à des étouffements, autre signe constant, selon Lancisi : outre cela, les dilatations du ventricule droit et de son oreillette, produisent toujours des battements dans les veines du cou.

L'absence de ces battements, lorsqu'une dilatation est d'ailleurs soupçonnée, indique que cette dilatation, si elle existe, est dans le ventricule gauche. Cette dilatation a encore d'autres signes : les battements des artères sont très-violents, si ces artères sont libres ; c'est ce que M. de Senac a observé dans plusieurs maladies : l'auteur ne parle pas de la dilatation seule de l'oreillette gauche ; elle est rare, et les signes distincts de cette maladie nous manquent.

Pour ce qui est des autres vices du cœur, tels que les retrécissements, les corps étrangers, les tumeurs, les ossifications, il faut n'en former qu'une classe, et les réduire en général aux obstacles qui s'opposent à l'entrée ou à la sortie du sang.

Il est des principes généraux qui doivent régler la cure des maladies du cœur : en général, l'ignorance crédule peut espérer de certains succès qu'elle n'a jamais vus ; et dans les dilatations du cœur, dans les ossifications, et lorsqu'il contient des polypes qui résistent à tous les dissolvants, les ressources de l'art sont plutôt entre les mains des malades, que dans les pharmacies.

Il faut se borner à arrêter les progrès de ces maladies, à modérer leurs accidents, à prévenir ou à éloigner leurs suites ; à moins qu'on ne puisse saisir ces maladies dans leur commencement, car alors il y en aurait plusieurs qui peut-être ne résisteraient pas aux remèdes.

Quoiqu'il en sait, il faut dans la cure palliative que nous venons de proposer, diminuer le volume du sang par les saignées, à laquelle la petitesse du pouls ne doit pas empêcher d'avoir recours, à moins qu'il n'y eut des syncopes actuelles : l'exercice, les efforts, les mouvements violents doivent être interdits, parce qu'ils s'opposent même aux bons effets des saignées ; non que les mouvements doux, dans des voitures ou à cheval, ne soient des remèdes utiles, puisque le sang croupit surtout dans le bas ventre dans la vie sédentaire.

La diete, et même l'usage du lait, ou celui des aliments doux et faciles à digérer, sont aussi utiles que les saignées ; et il ne faut pas oublier d'avoir recours aux lavements, aux laxatifs doux, et aux eaux minérales ferrugineuses, ainsi qu'à l'esprit anodyn minéral de Hoffman, la poudre tempérante de Stahl, l'eau de fleur d'orange, de tilleul, etc.

Telle est l'idée générale que l'on peut prendre des maladies propres du cœur, suivant M. de Senac. On trouvera des connaissances du détail sur les cas particuliers, aux mots PERICARDE, POLYPE, PALPITATION, SYNCOPE. Voyez ces différents articles.

Outre les maladies propres du cœur dont nous venons de parler, cette partie est exposée à des maladies générales, c'est-à-dire qui peuvent attaquer toutes les diverses parties du corps. Nous observerons d'abord en deux mots, à-propos de ses blessures, qu'elles ne sont pas toutes et toujours mortelles par elles-mêmes ; leur cours est souvent aussi long que le cours des blessures des autres parties ; elles suppurent quelquefois, surtout si elles sont petites. C'est ce que M. de Senac démontre par un grand nombre d'autorités.

Il y a des plaies ou des déchirures du cœur faites par l'effort du sang, ou qui sont la suite des contusions du cœur, qui sont aussi dangereuses, quoique plus rares, que les plaies par cause externe et récente.

Quant au diagnostic des plaies du cœur, la place sur laquelle l'instrument perçant a porté, la profondeur jusqu'à laquelle il a été enfoncé, peuvent donner des soupçons sur l'existence des plaies du cœur ; mais ces soupçons ne peuvent être confirmés que par des accidents : telles sont les défaillances, la petitesse et l'inégalité du pouls, les sueurs froides, les anxiétés, la douleur vers le sternum. Pour ce qui est de la fièvre, c'est un accident général dans les blessures ; il n'est pas douteux qu'elle ne s'allume lorsque le cœur est blessé.

Les lavages, les saignées lorsqu'il n'y a point une hémorrhagie considérable, l'eau de Rabel ou l'esprit de sel, les acides végétaux qui ont quelque austérité, et une diete très-sévère, sont les seuls remèdes auxquels on doive avoir recours dans les plaies du cœur ; observant qu'il est important de ne pas fermer l'ouverture extérieure de la plaie, et qu'il convient même quelquefois de l'agrandir, suivant que les accidents pourront faire soupçonner un épanchement.

Le cœur est sujet, comme les autres parties du corps, à l'inflammation, aux abcès, et aux ulcères. Voyez INFLAMMATION, ABCES, ULCERE. Les fièvres violentes sont quelquefois la cause ou l'effet de la première de ces maladies. Les observations incontestables de plusieurs auteurs, démontrent que le cœur est sujet à des abcès et à des ulcères ; la douleur, les syncopes, les palpitations, ne doivent donner que des soupçons au sujet de l'inflammation. Pour ce qui est des signes des abcès et des ulcères, ils sont à-peu-près les mêmes que ceux des plaies.

Mais si la nature nous permet quelquefois d'apercevoir ses démarches, elle nous cache les secours qui pourraient les arrêter ou les corriger. L'art ne peut dans les inflammations du cœur, s'il n'y est pas entièrement inutile, que hâter les remèdes que demandent les autres inflammations. Pour ce qui est des abcès et des ulcères du cœur, les Médecins ne peuvent se conduire dans ces cas que par l'analogie, puisque l'expérience n'a rien appris là-dessus.

Le volume du cœur peut se resserrer ou s'étendre. Le cœur se concentre ; on l'a trouvé flétri, desséché, durci et pour ainsi dire skirrheux, à la suite de quelques maladies chroniques, et même dans un homme qui périt de la rage : s'il en faut croire Pline, les rois d'Egypte avaient observé la phtisie du cœur. La concentration du cœur ne peut être appliquée à l'absence de la liqueur péricardine, selon M. de Senac.

Le cœur peut se dilater beaucoup, tant à la suite des pleurésies et des fièvres violentes, que par les efforts du sang causés par des mouvements violents, ou par les passions, par la présence des polypes, les anevrismes des grosses artères. Il n'arrive pas toujours que les parois du cœur qui se dilate, s'épaississent ; cette dilatation appartient aussi souvent, au moins, aux oreillettes qu'aux ventricules : elle a des signes fort équivoques, elle est quelquefois mortelle ; et tous les remèdes auxquels on puisse avoir recours, sont la saignée, la diete et les calmants. On ne connait aucun remède pour le retrécissement ou la diminution du cœur, dont les signes sont aussi fort obscurs.

Quelques bornées que soient nos connaissances à l'égard des maladies du cœur dont nous venons de parler, il en est d'autres qu'on ne saurait même se flatter de connaître par aucun signe ; tels sont les cœurs velus, et ceux dans lesquels il se forme des couches d'une matière qui se condense, et qui n'est autre chose que de la lymphe. On a aussi trouvé dans le cœur, des pierres, et souvent des concrétions osseuses aux artères, aux valvules et aux parois ; on y a trouvé des vers, quelques observateurs le prétendent au moins : mais M. de Senac ne reçoit pas de telles observations sans soupçon ; et il faut porter le même jugement des poux, qu'on dit avoir trouvé dans le cœur, et peut-être de son hydropisie venteuse. Enfin le cœur change quelquefois de place, etc.

Telle est, dit M. de Senac, l'histoire des faits répandus dans divers ouvrages : si on ne se proposait que la guérison des maladies auxquelles ce viscère est sujet, on pourrait négliger ces observations ; mais on ne conçoit ce qui est soumis à la Médecine, qu'en connaissant ce qui lui résiste ; on ne peut distinguer les maux si on les ignore.

COEUR, (Grammaire) La position du cœur, sa fonction dans le corps humain, l'importance de ce viscère, etc. ont fort multiplié les acceptions figurées de ce mot, tant au moral qu'au physique. Voyez les articles suivants.

COEUR, (Géométrie). Quelques géomètres, entr'autres M. Varignon, dans les mém. de l'acad. des Sc. an. 1692, ont donné ce nom au solide que formerait une demi-ellipse en tournant, non autour de son axe, mais autour d'un de ses diamètres ; et en effet un tel solide aurait assez la figure d'un cœur pointu par le bas, et enfoncé par le haut. M. Varignon a cherché la dimension de ce solide ; mais il s'est trompé, comme il serait aisé de le faire voir. On peut trouver facilement la dimension du cœur par la méthode suivante.

Sait imaginée une demi-ellipse dont les deux axes soient égaux aux deux diamètres de l'ellipse donnée ; chaque ordonnée sera aussi égale de part et d'autre, excepté que dans l'ellipse formatrice du cœur les ordonnées seront obliques à l'axe, et que dans l'autre elles lui seront perpendiculaires ; celles-ci dans la rotation formeront des cercles, et les autres formeront des surfaces coniques qui seront aux cercles dans le rapport du sinus de l'angle des deux diamètres à l'angle droit : rien n'est plus facîle à démontrer. De plus, dans le cœur les surfaces coniques seront obliquement posées par rapport à l'axe ; au lieu que dans le solide formé par l'autre ellipse, les cercles seront perpendiculaires à l'axe : donc l'élément du cœur est encore à l'élément de l'autre solide, envisagé sous ce point de vue, comme le sinus de l'angle des deux diamètres est au sinus total. Donc, puisque ce rapport entre deux fois dans le rapport total des deux éléments, il s'ensuit que l'élément du cœur est à l'élément de l'autre solide, comme le carré du sinus de l'angle des diamètres est au carré du sinus total : donc les deux solides sont aussi entr'eux dans ce rapport. En voilà assez pour mettre sur la voie ceux qui voudront aller plus loin, faire de cette proposition une démonstration en forme, et reconnaître en quoi peche celle de M. Varignon. (O)

COEUR DU LION ou REGULUS, (Astronomie) étoîle de la première grandeur, dans la constellation du Lion. Voyez LION. (O)

COEUR DE CHARLES, en Astronomie, est une étoîle de l'hémisphère septentrional, non comprise dans aucune constellation, située entre la chevelure de Bérénice et la grande Ourse, à qui M. Halley a donné ce nom en l'honneur du roi d'Angleterre Charles II. Voyez ETOILE et CONSTELLATION. (O)

COEUR DE L'HYDRE, en Astronomie, étoîle de la seconde grandeur dans le cœur de la constellation de l'Hydre, la douzième dans le catalogue de Ptolomée, la onzième dans celui de Tycho, et la vingt-cinquième dans celui d'Angleterre. Voyez ETOILE et HYDRE. (O)

COEUR, en termes de Blason. Parti en cœur, signifie une ligne courbe de partition en pal au centre de l'écusson, qui ne s'étend que fort peu, très-courte du haut et du bas, et qui est rencontrée par d'autres lignes qui forment une partition irrégulière de l'écu ; ainsi qu'il est représenté dans nos Planches de Blason.

COEUR, (Horlogerie) pièce qui en a la forme, qui est placée sur la seconde roue d'une horloge, et dont la fonction est de dégager le pied de biche de la détente de la sonnerie.

COEUR, cheval de deux cœurs, en termes de Manège, est celui qui ne manie que par contrainte, et n'obéit pas volontairement aux aides du cavalier. Ces chevaux tiennent quelque chose des ramingues. Voyez RAMINGUE.