S. f. (Critique sacrée) ; oratoire des juifs, bâti dans leurs maisons des fauxbourgs, ou sur des lieux élevés, pour y faire leurs prières.

Les anciens hébreux qui demeuraient trop loin du tabernacle ou du temple, ne pouvant pas s'y rendre en tout temps, bâtirent des cours sur le modèle de la cour des holocaustes, pour y offrir à Dieu leurs hommages. On donna dans la suite à ces cours, le nom de proseuches. Juvenal, Satyre III. en parle sur ce ton-là, et emploie le mot proseucha. L'Evangîle nous apprend que Notre Seigneur entra dans une de ces proseuches pour y faire ses prières, et qu'il y passa toute la nuit ; c'est ce que nous lisons dans S. Luc, ch. VIe . 12. L'original qu'on a traduit, et il fut toute la nuit en prières à Dieu, porte, , ce qui signifie, et il passa la nuit dans l'oratoire de Dieu. Ce fut dans un autre de ces oratoires que S. Paul enseigna Philippe, Actes, ch. XVIe Dans ce même chapitre, nous avons traduit par prière, . 13. et 16. le mot , qu'il fallait rendre par oratoire.

Les proseuches étaient différentes des synagogues à plusieurs égards ; car 1°. dans les synagogues les prières se faisaient en commun, au nom de toute l'assemblée ; mais dans les oratoires chacun faisait la sienne en particulier, telle qu'il lui plaisait : et c'est ainsi que J. C. en usa dans celui où il est dit qu'il entra, et qu'il passa la nuit.

2°. Les synagogues étaient couvertes : les oratoires étaient de simples cours tout à découvert, faits, à ce que rapporte Epiphane, comme les places romaines qu'on appelait forum, qui n'étaient autre chose qu'un enclos découvert, où autrefois à Rome et dans les autres états républicains, le peuple s'assemblait pour les affaires publiques. Le même Epiphane dit que de son temps les Samaritains avaient encore un de ces oratoires près de Sichem.

3°. Les synagogues étaient toujours bâties dans les villes, et les oratoires toujours dans les fauxbourgs, et d'ordinaire sur des lieux élevés ; et celui où pria Notre Seigneur était sur une montagne. Il y a même beaucoup d'apparence que c'est ce qui est souvent appelé dans le vieux Testament des hauts lieux : car ces hauts lieux ne sont pas toujours condamnés dans l'Ecriture. Ils ne le sont que lorsqu'on y rendait quelque culte à d'autre qu'au vrai Dieu, ou quand des schismatiques y élevaient des autels par opposition à celui qui était établi dans le lieu destiné à cet usage ; les Prophètes et d'autres saints hommes s'en servaient sans scrupule, comme on le voit par plusieurs exemples que l'Ecriture rapporte.

Ce qui confirme encore cette opinion, c'est que ces oratoires avaient ordinairement des bois aussi-bien que les hauts-lieux. Sans doute que le sanctuaire de l'Eternel où Josué éleva sa colonne sous le chêne ou le bois de chêne, à Sichem, était un de ces oratoires ; et il est clair qu'il y avait un bois de chêne par les termes du texte. Les proseuches d'Alexandrie dont parle Philon, avaient des bois sacrés ; et celui qui était à Rome dans le bocage d'Egérie était de la même espèce. Peut-être que quand le psalmiste parle d'oliviers verdoyans dans la maison de Dieu, il faut l'entendre de ces oratoires. Il y en avait aussi un autrefois à Mispha, comme le marque l'auteur du I. liv. des Macchabées. Tout cela était des moadhé, et peut fort bien avoir été désigné par ces expressions.

Au reste, on ne peut pas disconvenir que les synagogues, qui servaient au même usage que les oratoires dont il y avait encore quelques-uns du temps de Notre-Seigneur, ne portassent aussi quelquefois le même nom. Josephe et Philon semblent employer le mot de proseuque ou d'oratoire en ce sens. Cependant il y a lieu de penser que quelques-unes des synagogues des juifs d'Alexandrie, étaient à découvert comme les oratoires d'autrefois ; d'autant plus qu'il ne pleuvait presque jamais en Egypte, et qu'on y avait bien plus besoin d'air dans les assemblées, et d'arbres pour garantir de l'ardeur du soleil, que de toits contre la pluie. (D.J.)