S. m. pl. (Théologie et Histoire ecclésiastique) nom qu'on donne dans les écoles aux théologiens qui soutiennent que la grâce est efficace de sa nature absolument et moralement, et non pas relativement et par degrés. Voyez GRACE EFFICACE. On les appelle ainsi, parce que dans leurs opinions ils se fondent principalement sur l'autorité de Saint Augustin.

Le système des Augustiniens sur la grâce, se réduit principalement à ces points.

1°. Ils distinguent entre les œuvres naturelles et les œuvres surnaturelles ; entre l'état d'innocence, et l'état de nature tombée.

2°. Ils soutiennent que toutes les créatures libres dans l'un ou l'autre de ces deux états, ont besoin pour chaque action naturelle, du concours actuel de Dieu.

3°. Que ce concours n'est pas antécédent, ni physiquement prédéterminant, mais simultanée et flexible au choix de la volonté ; en sorte que Dieu concourt à telle ou telle action, parce que la volonté se détermine à agir, et si elle ne s'y détermine pas, Dieu ne prête pas son concours.

4°. Que quant aux œuvres surnaturelles, les mêmes créatures libres, en quelqu'état qu'on les suppose, ont besoin d'un secours spécial et surnaturel de la grâce.

5°. Que dans l'état de nature innocente, cette grâce n'a pas été efficace par elle-même et de sa nature, comme elle l'est maintenant, mais versatîle ; et c'est ce qu'ils appellent autrement adjutorium sine quo.

6°. Que dans ce même état de nature innocente, il n'y a point eu de decrets absolus, efficaces, antécédents au consentement libre de la volonté de la créature, et par conséquent nulle prédestination à la gloire avant la prévision des mérites, nulle reprobation qui ne supposât la prévision des démérites.

7°. Que dans l'état de nature tombée ou corrompue par le péché, la grâce efficace par elle-même, est nécessaire pour toutes les actions qui sont dans l'ordre surnaturel.

8°. Ils fondent la nécessité de cette grâce sur la seule faiblesse de la volonté humaine, considérée après la chute d'Adam, et non sur la subordination et la dépendance dans laquelle la créature doit être du créateur, comme le veulent les Thomistes.

9°. Ils font ordinairement consister la nature de cette grâce efficace dans une certaine délectation et suavité victorieuse, non pas par degrés et relativement, comme l'admettent les Jansénistes, mais simplement et absolument, par laquelle Dieu incline la volonté au bien, sans toutefois blesser sa liberté. Quoiqu'ils avouent que Dieu a d'ailleurs une infinité de moyens inconnus à l'homme, pour déterminer librement la volonté, suivant ce principe de saint Augustin : Deus miris ineffabilibusque modis homines ad se vocat et trahit. Lib. I. ad simplic.

10°. Outre la grâce efficace, ils en admettent encore une autre suffisante, grâce réelle, et proprement dite, qui donne à la volonté assez de force pour pouvoir, soit médiatement, soit immédiatement, produire des œuvres surnaturelles et méritoires, mais qui pourtant n'a jamais son effet sans le secours d'une grâce efficace.

11°. Quand Dieu appelle quelqu'un efficacement, il lui donne, selon eux, une grâce efficace ; et il accorde aux autres une grâce suffisante pour accomplir ses commandements, ou au moins pour obtenir des grâces plus abondantes et plus fortes, afin de les accomplir.

12°. Ils soutiennent que quant à l'état de nature tombée, il faut admettre des decrets absolus et efficaces par eux-mêmes, pour les œuvres qui sont dans l'ordre surnaturel.

13°. Que la prescience de ces mêmes œuvres est fondée sur ces decrets absolus et efficaces.

14°. Que toute prédestination soit à la grâce, soit à la gloire, est entièrement gratuite.

15°. Que la réprobation positive se fait en vue des péchés actuels, et la réprobation négative, en vue du seul péché originel.

Ce système approche fort du Thomisme pour l'état de nature innocente, et du Molinisme pour l'état de nature tombée. Voyez MOLINISME et THOMISME.

On divise les Augustiniens en rigides et rélchés. Les rigides sont ceux qui soutiennent tous les points que nous venons d'exposer. Les rélâchés sont ceux, qui dans les œuvres surnaturelles, en en distinguant de faciles et de difficiles, n'exigent de grâce efficace par elle-même, que pour ces dernières, et soutiennent que pour les autres, telles que la prière par laquelle on peut obtenir des grâces plus abondantes, la grâce suffisante suffit réellement, et a souvent son effet, sans avoir besoin d'autre secours. C'était le sentiment du cardinal Noris, du P. Thomassin, &, selon M. Habert évêque de Vabres, celui que de son temps on suivait le plus communément en Sorbonne. Tournely, tract. de grat. part. II. quaest. Ve parag. 11.

AUGUSTINIENS, est aussi, selon Lindanus, le nom de quelques hérétiques du XVIe siècle, disciples d'un sacramentaire appelé Augustin, qui soutenait que le ciel ne serait ouvert à personne avant le jugement dernier. (G)