S. m. pl. (Histoire ecclésiastique) hérétiques ainsi nommés de leur chef Berenger, archidiacre d'Angers, trésorier et écolâtre de S. Martin de Tours, dont il était natif, et qui vivait dans le XIe siècle. Cet hérésiarque fut le premier qui osa nier la présence réelle de Jesus-Christ dans l'eucharistie : condamné successivement par plusieurs papes et plusieurs conciles, il rétracta ses erreurs, et signa trois différentes fois des professions de foi catholique qu'il abjura autant de fois : mais enfin on croit qu'il mourut sincèrement converti et désabusé de ses erreurs. A celle dont nous venons de parler, et qui était la principale, il ajouta celles de combattre les mariages légitimes, soutenant que l'on pouvait user de toutes sortes de femmes. Il attaquait aussi le baptême des enfants, qu'il regardait comme nul.

Lanfranc et Guimond ses contemporains, écrivirent contre lui avec beaucoup d'avantage : ce dernier expose ainsi les sentiments et les variations des Berengariens sur le sacrement de l'eucharistie. " Tous, dit-il, s'accordent à dire que le pain et le vin ne sont pas changés essentiellement ; mais ils diffèrent en ce que les uns disent qu'il n'y a rien absolument du corps et du sang de Notre-Seigneur dans le sacrement, et que ce n'est qu'une ombre et une figure. D'autres cédant aux raisons de l'église, sans quitter leur erreur, disent que le corps et le sang de Jesus-Christ sont en effet contenus dans le sacrement, mais cachés par une espèce d'impanation, afin que nous les puissions prendre ; et ils disent que c'est l'opinion la plus subtîle de Berenger même. D'autres croient que le pain et le vin sont changés en partie ; quelques uns soutiennent que ces éléments sont changés entièrement, mais que quand ceux qui se présentent pour les recevoir, en sont indignes, alors la chair et le sang de Jesus-Christ reprennent la nature du pain et du vin " Guimond, contr. Bereng. bibliot. PP. pag. 327.

On voit clairement par cet exposé que les Berengariens ont été les précurseurs des Luthériens et des Calvinistes ; et par la conduite de l'Eglise, à l'égard des premiers, il est aisé de décider quelle était alors sa foi ; et qui est coupable d'innovation à cet égard, ou des Catholiques, ou des Protestants.

Au reste, quelques efforts qu'eussent fait les Berengariens pour répandre leur doctrine en France, en Italie, et en Allemagne, les auteurs contemporains remarquent que ces hérétiques étaient en fort petit nombre ; et il serait difficîle de prouver qu'il en restât encore lorsque Luther et Calvin parurent. On peut consulter le dictionnaire de Moréri, à l'article Berenger, sur ce qui concerne la personne et les diverses aventures de cet hérésiarque. (G)