S. f. (Ordre encyclopédique, Entendement, Raison, Philosophie ou Science, Science de la nature, Mathématiques, Mathématiques mixtes, Mécaniques, Hydrodynamique) est proprement la dynamique des fluides, c'est-à-dire, la science qui enseigne les lois de leur mouvement. Ainsi, on voit que l'Hydrodynamique ne diffère point, quant à l'objet, de la science qu'on appelait autrefois et qu'on appelle encore très-souvent Hydraulique. Voyez HYDRAULIQUE.

On appelle Dynamique, comme nous l'avons dit à ce mot, la partie de la mécanique qui enseigne à déterminer les mouvements d'un système de corps qui agissent de quelque manière que ce sait, les uns sur les autres. Or, tout fluide est un composé de particules faciles à se mouvoir, et qui sont liées entr'elles de manière qu'elles altèrent et changent réciproquement leurs mouvements. Ainsi l'hydraulique et l'hydrostatique, est la vraie dynamique des fluides.

Il parait que le premier qui se soit servi de ce terme, est M. Daniel Bernoulli, qui a donné ce titre à son Traité du mouvement des fluides, imprimé à Strasbourg en 1738. Si le titre était nouveau, il faut avouer que l'ouvrage l'était aussi. M. Daniel Bernoulli parait être le premier qui ait réduit les lois du mouvement des fluides à des principes surs et non arbitraires, ce qu'aucun des auteurs d'hydrauliques n'avait fait avant lui. Le même auteur avait déjà donné en 1727, dans les Mémoires de l'académie de Petersbourg, un essai de sa nouvelle théorie. On n'attend pas de nous que nous en donnions ici un extrait ; nous nous contenterons de dire qu'il se sert principalement du principe de la conservation des forces vives, reconnu aujourd'hui pour vrai par tous les Mécaniciens, et dont on fait un usage si fréquent dans la Dynamique, depuis qu'il a été découvert par M. Huygens sous un autre nom. M. Jean Bernoulli a donné une Hydraulique, dans laquelle il se propose le même objet que M. Daniel Bernoulli son fils ; mais il prétend y employer des principes plus directs et plus lumineux que celui de la conservation des forces vives ; et on voit à la tête de cet ouvrage, une lettre de M. Euler à l'auteur, par laquelle M. Euler le félicite d'avoir trouvé les vrais principes de la science qu'il traite. M. Maclaurin a aussi donné dans son Traité des fluxions un essai sur le mouvement des fluides qui coulent dans des vases, et cet essai n'est autre chose qu'une extension de la théorie de M. Newton, que cet auteur a perfectionnée. Enfin le dernier ouvrage qui ait paru sur cette matière, est celui que j'ai donné en 1744, sous le titre de Traité de l'équilibre et du mouvement des fluides ; j'aurais pu donner à cet ouvrage le titre d'Hydrodynamique, puisque c'est une suite du Traité de Dynamique que j'avais publié en 1743. Mon objet, dans ce livre, a été de réduire les lois de l'équilibre et du mouvement des fluides au plus petit nombre possible, et de déterminer par un seul principe général, fort simple, tout ce qui concerne le mouvement des corps fluides. J'y examine les théories données par M. Bernoulli et par M. Maclaurin, et je crois y avoir montré des difficultés et de l'obscurité. Je crois aussi avoir prouvé que dans certaines occasions, M. Daniel Bernoulli a employé le principe des forces vives dans des cas où il n'aurait pas dû en faire usage. J'ajoute que ce grand géomètre a d'ailleurs employé ce principe sans le démontrer, ou plutôt que la démonstration qu'il en donne n'est point satisfaisante ; mais cela n'empêche pas que je ne rende avec tous les savants, la justice dû. au mérite de cet ouvrage. Je traite aussi dans ce même livre de la résistance des fluides au mouvement des corps, de la refraction, ou du mouvement d'un corps qui s'enfonce dans un fluide, et enfin des lois du mouvement des fluides qui se meuvent en tourbillon.

Comme nous avons donné au mot FLUIDE les principales lois du mouvement des fluides, nous y renverrons ceux de nos lecteurs, qui voudront s'instruire des principales lois de l'Hydrodynamique. Nous ajouterons seulement ici quelques réflexions qui n'ont point été données dans cet article FLUIDES, et qui lui serviront comme de complément.

La première de ces réflexions aura pour objet la contraction de la veine d'eau qui sort d'un vase. M. Newton a observé le premier que l'eau qui sortait d'un vas, n'en sortait pas sous une forme cylindrique, mais sous une forme de cône tronqué, qui Ve en se rétrecissant depuis la sortie du vase. M. Daniel Bernoulli ajoute à cette observation (voyez son hydrodynamique, sect. 4.), que quand les eaux sortent, non par un simple trou, mais par un tuyau, la veine se contracte si les parois du tuyau sont convergens, et se dilate si ces parois sont divergens. La raison en est assez facîle à apercevoir, c'est que l'eau dans sa direction, au sortir du tuyau, suit pendant quelque temps la direction des parois du tuyau, le long desquels elle a coulé. Cette contraction et dilatation de la veine d'eau se varie donc suivant les différents cas, ce qui fait qu'il est très-difficîle de déterminer exactement le temps qu'un vase mer à se vider, même quand on connaitrait exactement la vitesse de l'eau au sortir du vase. Car il est encore nécessaire de connaître la figure de la veine d'eau, qu'on ne peut pas supposer cylindrique, et dont on ne peut pas supposer par conséquent que les parties se meuvent avec une égale vitesse, puisque la vitesse est en raison inverse de la largeur de la veine.

A l'occasion de cette veine d'eau, nous dirons un mot de la cataracte de M. Newton. Ce grand géomètre prétend dans le second livre de ses principes, que l'eau qui sort d'un vase cylindrique par un trou fait à la base de ce vase, en sort en formant depuis la partie supérieure du vase jusqu'au trou, une espèce de cataracte ou de veine qui Ve en se retrécissant, et dont la largeur à chaque endroit est en raison inverse de la vitesse de l'eau, c'est-à-dire en raison inverse de la racine carrée de la distance de cet endroit à la surface supérieure de l'eau ; de manière que cette cataracte est une espèce d'hyperbole du second genre, dans laquelle les carrés des ordonnées sont comme les abscisses. M. Jean Bernoulli dans son Hydraulique (voyez le tome IV. de ses œuvres) a très-bien prouvé l'impossibilité d'une pareille cataracte, parce que la partie du fluide qui serait hors de cette cataracte serait stagnante, et par conséquent agirait par sa pesanteur pour détruire cette cataracte, dans laquelle le fluide n'aurait aucune pression. Voyez un plus grand détail dans l'ouvrage cité.

Ma seconde observation aura pour objet la pression des fluides en mouvement. J'ai donné dans mon Traité des fluides en 1744, une méthode directe pour déterminer cette pression, et j'ai expliqué au mot FLUIDE, en quoi consiste cette méthode. Or il y a des cas où la formule qui exprime cette pression devient négative, et j'ai prétendu que dans ces cas, la pression ne doit pas se changer en suction, comme le dit M. Daniel Bernoulli, c'est-à-dire que les parois du canal ne doivent pas être pressés de dehors en dedans, mais qu'ils le sont toujours de dedans en dehors. Voyez l'article cxlix de mon ouvrage. En vain m'objecterait-on les expériences par lesquelles M. Bernoulli a prétendu confirmer sa théorie ; ces expériences prouvant seulement ce que je n'ai jamais nié, et ce qui est évident par soi-même, que quand la pression du fluide est négative, la pression totale de l'air et du fluide sur les parties intérieures du canal, est moins grande que celle qui est exercée par l'air seul sur les parties extérieures du même canal. Or, dans toute ma théorie du mouvement des fluides, j'ai fait abstraction de la pression de l'air, à l'exemple de tous les auteurs d'Hydraulique ; et j'avais jugé que M. Bernoulli en faisait abstraction lui-même en cet endroit, ainsi que dans tout le cours de son ouvrage. Si M. Bernoulli en disant p. 264 de son Hydrodynamique, pressio in suctionem mutatur, id est, latera canalis introrsùm premuntur, eut ajouté ces trois mots, ab aère circumambiente, nous étions pleinement d'accord, et je ne lui aurais fait sur cet article aucune objection ; mais il semble qu'il ait cherché à éloigner cette idée par la manière dont il explique immédiatement après cette pression changée en suction ; tunc autem, dit-il (c'est-à-dire, dans le cas où la pression est négative) res ità consideranda est, ac si loco columnae aqueae superincumbentis, et in aequilibrio positae cum aquâ praeterfluente, sit columna aquea appensa, cujus nisus descendendi impediatur ab attractione aquae praeterfluentis.

En effet, ce n'est point par l'attraction de l'eau qui coule dans le fluide que cette colomne est soutenue, mais par la pression de l'air inférieur, laquelle, dans le cas dont il s'agit, se trouve égale à la pression que l'air supérieur exerce sur la surface du fluide qui coule. Il parait donc que M. Bernoulli ne s'est pas suffisamment expliqué sur ce qu'il appelle la pression changée en suction : mais quoi qu'il en sait, il est certain que toute la théorie que j'ai établie est exactement vraie, en faisant abstraction, comme je l'ai supposé, de la pression de l'air environnant. C'est ce qui fait dire à M. Euler, dans une lettre du 29 Décembre 1746 : Je crois que vos raisons sont aussi bien fondées que celles de M. Bernoulli, et que c'est une circonstance étrangère, à laquelle il faut attribuer l'effet de la suction.... Si le tuyau était situé dans un espace vide d'air, il n'y a aucun doute que l'eau ne perdit sa continuité (lorsque la pression est négative) comme vous prétendez. Votre théorie sera donc vraie dans le cas où le tuyau est placé dans un espace vide d'air ; et celle de M. Bernoulli l'est également, quand le tuyau se trouve en plein air.

Au reste, quand on considère le tuyau en plein air, la théorie de M. Bernoulli demande encore, ce me semble, quelque modification. Car lorsque le fluide descend pour sortir du vase, l'air qui environne ce vase de toutes parts n'est pas en repos, puisque l'air descend dans le tuyau à mesure que le fluide s'abaisse ; ce qui ne peut se faire, sans qu'il y ait du mouvement dans tout l'air environnant ; ainsi la pression de l'air sur le tuyau, tant extérieurement qu'intérieurement, ne doit pas être la même que si l'air était en repos ; pour déterminer cette pression, il faudrait connaître le mouvement de l'air environnant ; et c'est ce qui parait très-difficile. Ne pourra-t-il donc pas y avoir des cas où la pression de l'air sur la surface extérieure du tuyau ne soit pas plus grande, ou même soit plus petite que la pression sur la surface intérieure ; auquel cas, les parois du tuyau ne seraient pas pressées de-dehors en-dedans, par l'air qui environne le tuyau, quoique la pression du fluide qui coule dans le tuyau fût négative ? Il parait donc que le meilleur parti à prendre dans la théorie de la pression des fluides qui sont en mouvement, est de faire abstraction de l'air qui environne le tuyau. C'est aussi le parti que j'ai pris.

Enfin, ma dernière observation aura pour objet l'application du calcul au mouvement des fluides. J'ai donné dans le chapitre VIII. de mon essai sur la résistance des fluides en 1752, une méthode générale pour appliquer le calcul à ce mouvement. Cette méthode a cet avantage qu'elle ne suppose absolument aucune hypothèse, et qu'elle est en même temps assez simple ; mais je n'ai donné dans ce chapitre qu'un essai de cette méthode, très-analogue à celle que j'ai employée dans le même ouvrage à la détermination de la résistance des fluides. M. Euler, dans les Mémoires de l'acad. des Sciences de Prusse, pour l'année 1755, a donné une méthode fort semblable à celle-là, pour déterminer le mouvement des fluides, et parait faire entendre que la mienne n'est pas générale. Je crois qu'il se trompe sur ce point, et je me flatte d'avoir prouvé dans un écrit particulier, que je publierai à la première occasion, que ma méthode est aussi générale qu'on le peut désirer, à-moins qu'on ne suppose le fluide indéfini et sans limites ; ce qui n'a point lieu, et ne saurait avoir lieu dans la nature. Il est vrai que je n'ai traité du mouvement du fluide que dans un plan ; mais il est si aisé d'étendre la théorie que j'ai donnée au mouvement d'un fluide dans un solide, que je n'attache absolument aucun mérite à cette généralisation ; et il me semble que M. Euler aurait dû rendre plus de justice à mon travail sur ce sujet, et convenir de l'utilité qu'il en avait tirée. L'écrit que j'ai composé sur ce sujet n'étant pas de nature à pouvoir être inséré dans l'Encyclopédie, je me contenterai de donner une légère idée de ce qu'il contient. Je suppose pour fixer les idées, le vase plein et vertical, et je nomme x les abscisses verticales et z les ordonnées horizontales ; je démontre 1°. que la vitesse verticale doit être exprimée par

q, et l'horizontale par

p,

étant une fonction du seul temps t écoulé depuis le commencement du mouvement, et q, p, des fonctions de x et de z. Ces fonctions de x et de z doivent être telles, 1°. que p d z + q d x soit une différencielle complete ; 2°. que p d x - q d z en soit aussi une ; 3°. que lorsque z = y, c'est-à-dire, lorsque z devient égale à l'ordonnée de la courbe qui exprime la figure du vase, on ait p d x - q d y = 0 ; c'est-à-dire que p d x - q d y = 0 soit l'équation de la courbe qui exprime la figure du vase. M. Euler parait avoir cru qu'il était toujours possible que ces trois conditions eussent lieu à la fois ; je crois avoir démontré le contraire. Mais la démonstration n'est pas de nature à pouvoir être rapportée ici.

Je donne ensuite une méthode pour trouver la fonction

du temps t, et une méthode pour déterminer la courbe que la surface supérieure du fluide forme à chaque instant. L'équation de cette courbe est aussi déterminée par différentes conditions qui doivent toutes s'accorder à donner la même courbe : si cet accord n'a pas lieu, le problème ne peut se résoudre analytiquement. D'où il est aisé de conclure qu'il y a bien peu de cas où l'on puisse trouver rigoureusement par une méthode analytique le mouvement d'un fluide dans un vase. On peut donc s'en tenir, ce me semble, dans le plus grand nombre des cas à la méthode que j'ai donnée en 1744, dans mon Traité des fluides, méthode qui donne des résultats assez conformes à l'expérience, quoiqu'elle ne soit pas dans la rigueur mathématique.

Lorsque le fluide a une masse finie et un mouvement progressif, alors le temps t doit nécessairement entrer dans l'expression de sa vitesse, et les conditions précédentes doivent nécessairement avoir lieu. Il n'y a que le cas où le fluide se meut suivant une ligne qui rentre en elle-même, sans être animé par aucune force accélératrice, dans lequel on puisse supposer que le temps t n'affecte point l'expression de la vitesse. Dans ce cas on a toujours p d x - q d z = à une différencielle complete ; mais au lieu de l'autre condition p d z + q d Xe égale à une différencielle complete , qui donnerait = , on a d () = d ().

Voilà le précis des lois du mouvement des fluides, telles qu'elles sont exposées dans l'écrit dont j'ai fait mention, et qui contient différentes autres recherches sur le mouvement des fluides, dont il serait trop long de parler ici.

A l'égard de la résistance des fluides au mouvement des corps, laquelle fait une partie essentielle de l'Hydrodynamique, Voyez les articles FLUIDE, RESISTANCE. Voyez aussi le chap. j. du troisième livre de mon Traité des fluides, et mon Essai sur la résistance des fluides, Paris, 1752. (O)