(Géographie moderne) ville d'Angleterre dans le comté de Middlesex, au bord de la Tamise, et à l'occident de Londres, avec laquelle elle ne fait plus qu'une même ville. Mais quoique Westminster soit jointe à Londres par une suite de maisons et d'hôtels sans interruption, et qu'on la comprenne ordinairement sous le nom de Londres, cependant elle fait un corps de ville qui a ses privilèges et ses droits séparés, aussi-bien que sa juridiction.

Dans le commencement du dix-septième siècle, il y avait encore un mille de distance entre l'une et l'autre de ces villes, et cet espace était rempli par des champs et par des prairies ; mais les habitants de Londres s'étant multipliés d'année en année depuis le règne de Charles I. cet espace de terrain a été rempli peu-à-peu par de belles et de magnifiques rues qu'on y a bâties, de sorte que les deux villes sont jointes aujourd'hui comme le fauxbourg S. Germain et Paris, et sans la différence de juridiction, elles seraient parfaitement confondues.

Anciennement Westminster s'appelait Thorney du dieu Thor qu'on y adorait avant la conversion des Saxons. Elle prit ensuite le nom de West-Minster, à cause d'un monastère bâti dans cet endroit, à l'ouest de la ville de Londres. Les trois principales choses qu'on y remarque, sont l'église, l'abbaye et les restes d'un vieux palais royal.

Le gouvernement de Westminster s'étend non-seulement sur la cité de ce nom, mais encore sur les fauxbourgs qui avancent du côté de Londres, jusqu'à Temple-Bar. Quoique la cité n'ait qu'une paraisse appelée Sainte-Marguerite, cette paraisse est d'une grande étendue, et ses dépendances consistent en cinq autres paroisses.

Il n'y a pour le gouvernement de Westminster, ni maire, ni échevins, ni shérifs ; c'est le chapitre qui est revêtu de toute la juridiction civîle et ecclésiastique. Il est vrai que le gouvernement civil a été mis entre les mains des laïcs choisis ou confirmés par le chapitre. Le chef de tous les magistrats s'appelle highsteward, qui est d'ordinaire un noble du premier rang, nommé par le chapitre. Il possède cette charge pendant sa vie, et en fait exercer les fonctions par un homme bien versé dans les lois. Cet homme, choisi par le high-steward, doit être confirmé par le chapitre, et pour lors il tient avec les autres magistrats la cour qu'on appelle lect.

Après lui est le bailli ou le sherif, car il convoque les jurés. Tous les sergens de Westminster lui sont soumis ; il règle les formalités au sujet de l'élection des membres du parlement pour la cité de Westminster, qui a droit de nommer deux députés. Toutes les amendes et les confiscations appartiennent au bailli, ce qui rend sa charge très-lucrative : il y a de plus un grand connétable, choisi par la cour de leet, et ce magistrat a sous ses ordres tous les autres connétables. Il est ordinairement deux années en charge.

Enfin, cette juridiction est composée de quatorze des principaux bourgeois qu'on appelle Burgesses, et dont sept sont pour la cité, et sept pour ses dépendances : leur office a beaucoup de rapport à celui des échevins de Londres, car ils ont chacun un ward ou quartier particulier sous leur juridiction. De ces quatorze burgesses, il y en a deux qui sont élus sous le nom de Heâd-Burgesses, ou chefs des bourgeois ; l'un d'eux est pour la cité, et l'autre pour ses dépendances, auxquelles dépendances on donne les noms de libertés et de franchises.

C'est à Westminster qu'est né vers l'an 1575, Benjamin Johnson, ou Jonson, illustre poète dramatique, et c'est dans l'abbaye de ce lieu, qu'il fut enterré en 1637 ; comme j'ai déjà donné le caractère de ce poète au mot tragédie, j'y renvoie le lecteur. J'ajouterai seulement qu'il possédait tout le savoir qui manquait à Shakespear, et manquait de tout le génie dont l'autre était partagé : tous deux étaient presque également dépourvus d'élégance, d'harmonie et de correction : Johnson, servîle copiste des anciens, traduisit en mauvais anglais leurs plus beaux passages : mais Shakespear créa et prévalut par son génie sur l'art grossier de ses contemporains.

Johnson étant né fort pauvre, et n'ayant pas de quoi poursuivre ses études, travaillait au bâtiment de Lincolns-Inn avec la truelle à la main, et un livre en poche : Shakespear ayant Ve une de ses pièces, la recommanda, et cette recommandation introduisit Johnson dans le monde. Il donna la première édition de ses œuvres en 1616, in-fol. elles ont été réimprimées plus commodément à Londres en 1716, en 6 vol. in-8°. Dans cette collection, se trouve une pièce intitulée, humble requête du pauvre Ben au meilleur de tous les rais, de tous les maîtres, de tous les hommes, le roi Charles. Il y expose, à ce prince, que le roi son père lui a donné une pension annuelle de cent marcs, et le supplie d'en faire des livres sterlings. On sait sa réponse au sujet du présent modique qu'il reçut de Charles I. " Je suis logé à l'étroit (dit ce bel esprit lorsqu'on lui remit la somme), mais je vois par l'étendue de cette faveur, que l'âme de sa majesté n'est pas logée plus au large ". J am lodg'd in an Alley ; but j see from the extent of this bounty, that hers majesty's soul is too lodg'd in an Alley.

Il parle dans ses découvertes (discoveries) avec une vérité charmante, de toutes sortes de traverses auxquelles il avait été exposé de la part de ses ennemis. Ils me reprochaient, dit-il, de ce que je m'occupais à faire des vers, comme si je commettais un crime dans cette occupation : ils produisirent contre moi mes écrits par lambeaux ; odieuse méchanceté ! puisque les écrits de l'auteur le plus sage paraitront toujours dangereux, lorsqu'on en citera quelques périodes hors de leur liaison avec le reste. Ils m'ont aussi reproché ma pauvreté : j'avoue qu'elle est à mon service, sobre dans ses aliments, simple dans ses habits, frugale, laborieuse et me donnant de bons conseils qui m'empêchent de tomber dans les vices des enfants chéris de Plutus. Qu'on jette les yeux, continue-t-il, sur les plus monstrueux excès, on ne les trouvera guère dans les maisons de l'indigence. Ce sont les fruits des riches géants, et des puissants chasseurs ; tandis que tout ce qu'il y a de noble, de digne de louange et de mémoire, doit son origine à de chétives cabanes. C'est l'ancienne pauvreté qui a fondé les états, bâti les villes, inventé les arts, donné des lois utiles, armé les hommes contre les crimes ; c'est-elle qui a fait trouver aux mortels une récompense dans leur propre vertu, et qui a conservé la gloire et le bonheur des peuples jusqu'à ce qu'ils se soient vendus aux tyrants ambitieux.

Betterton (Thomas) estimé généralement le meilleur acteur qui ait paru sur le théâtre anglais, avant celui qui en fait aujourd'hui la gloire, le fameux Garik, qui est sans contredit le premier de l'Europe ; homme unique en son genre, et qui sous le siècle d'Auguste, eut partagé les suffrages des Romains entre Pylade et lui : je viens à Betterton. Il naquit dans le Tutle-Street à Westminster en 1635 ; son père, qui était sous-cuisinier de Charles I. voulut en faire un lib aire ; mais la plupart de ceux qui ont excellé dans les arts, y ont été conduits par leur génie, malgré les vues et les oppositions de leurs parents.

Comme la nature avait formé Betterton pour le théâtre, il s'y distingua bientôt avec éclat et enleva tous les suffrages dès l'âge de 22 ans. Il est le premier qui ait joué à Londres des rôles de femmes, et il s'en acquitta avec beaucoup d'applaudissement. Il entra d'abord dans la troupe du roi ; mais comme la plupart des comédiens avaient été chassés de leurs trônes imaginaires, lorsque Charles I. en perdit un réel, plusieurs d'entr'eux prirent les armes pour le service de leur souverain, et firent paraitre beaucoup de valeur pour sa défense. Entr'autres exemples, le fameux acteur Mohun se conduisit avec tant d'intrépidité, qu'on l'honora d'une commission de major, qu'il remit à la révolution, pour retourner au théâtre. Le chevalier Davenant avait marqué beaucoup de zèle pour Charles II. qui en récompense de ses services, lui accorda une patente pour former une troupe de comédiens, sous le titre de comédiens du duc d'Yorck ; et c'est dans cette troupe que se mit Betterton, et dont il fut le héros.

Quelques-uns craient qu'il introduisit le premier en Angleterre le changement de décorations. Quoi qu'il en sait, il est certain qu'il contribua beaucoup à les embellir et à les perfectionner. Il épousa mademoiselle Sanderson, qui joignait aux talents naturels requis pour faire une excellente actrice, la beauté, les grâces et la vertu.

Le théâtre anglais subit diverses vicissitudes par les changements de troupes, de lieux et de directeurs. Un directeur de théâtre, par le commerce constant qu'il est obligé d'avoir, soit avec sa troupe d'acteurs et d'actrices, soit avec tout ce qu'il y a de gens frivoles, tant naturels qu'étrangers, est proprement dans son poste le Machiavel de l'empire de l'amour. Le théâtre est en lui-même l'image de la vie humaine ; les hommes qui font la plus grande figure dans le monde, ne sont pas plus ce qu'ils paraissent être, que cet acteur à qui vous voyez quitter ses habits de parade, n'est le héros qu'il vient de représenter.

Au milieu des révolutions du théâtre anglais, Betterton en éprouva dans sa fortune : il perdit par un prêt inconsidéré, la plus grande partie de ce qu'il avait gagné, 8 mille livres sterling. Un bon acteur n'est point à Londres dans la misere : Betterton réunissait en lui tous les talents, la figure, la beauté du geste et de la voix, la netteté de la prononciation et la sûreté de la mémoire ; son action était juste, touchante, admirable.

Je ne puis trop le louer, dit l'auteur du Tatler ; car c'était un homme étonnant, qui par son action, m'a fait sentir ce qu'il y a de grand dans la nature humaine, bien plus vivement que ne l'ont jamais fait les raisonnements des philosophes les plus profonds et les descriptions plus charmantes des poètes ; l'angoisse dans laquelle il paraissait, en examinant la circonstance du mouchoir dans Othello ; les mouvements d'amour que l'innocence des réponses de Desdémone excitait en lui, exprimaient dans ses gestes une si grande variété de passions qui se succédaient les unes aux autres, qu'il n'y avait personne qui n'apprit à redouter son propre cœur, et qui ne dû. être convaincu que c'est y mettre le poignard que de se livrer aux noirs accès de la jalousie.

Le comédien Booth, qu'on ne peut soupçonner de partialité dans le jugement qu'il portait de Betterton, disait souvent que la première fois qu'il lui avait Ve représenter le Spectre à la répétition de Hamlet, l'air, le ton et l'action qu'il y mit l'avaient saisi d'une telle horreur, qu'il s'était trouvé hors d'état pendant quelques moments de pouvoir jouer son propre rôle. Lorsque nos connaisseurs, dit le chevalier Steele, ont Ve cet auteur sur le théâtre, ils ont eu pitié de Marc-Antoine, de Hamlet, de Mithridate, de Théodore et de Henri VIII. On sait comme il revêtissait l'état de chacun de ces illustres personnages, et comme dans tous les changements de la scène, il se conduisait avec une dignité qui répondait à l'élévation de son rang.

Il réussissait également dans le comique et dans le tragique, et ce qu'il y a de plus singulier, faisait le libertin en perfection : caractère fort opposé au sien. On trouve assez de gens qui savent emprunter les manières d'un honnête homme, mais il y a peu d'honnêtes gens qui sachent contrefaire le faquin. Le dernier rôle qu'il fit, fut le personnage d'un jeune homme dans la pièce intitulée The Maid's tragedy ; et quoi qu'il eut déjà près de 70 ans, il joua son rôle avec tout le feu, l'audace et la vivacité d'un homme de 25 ans.

On représenta pour son compte, quelques années après qu'il eut quitté le théâtre, la pièce intitulée, l'Amour payé d'amour. Cette représentation lui valut cinq cent livres sterling : l'affluence du monde qui y vint justifia la reconnaissance qu'on lui portait, et ce grand acteur eut lieu d'être content des comédiens et de l'assemblée. L'épilogue composé par M. Row, finit d'une manière pathétique. " C'est, dit-il, le souvenir des plaisirs qu'il vous a procurés, qui vous engage à consacrer avec gloire le cothurne de ce grand maître, et vous ne voulez pas permettre qu'un homme qui vous a tant de fois touché par de feintes douleurs, vous soit enlevé par des souffrances réelles ".

Il mourut en 1710 d'une goutte remontée à l'âge de 75 ans, et fut enterré dans le cloitre de l'abbaye de Westminster. Il a composé, traduit ou changé quelques pièces de théâtre, entr'autres dom Sébastien, tragédie de Dryden. Il supprima avec tant d'art dit le poète, un millier de vers de ma pièce, qu'elle y a tout gagné, et que c'est à ses soins et à la beauté de son jeu que je suis redevable du succès qu'elle a eu.

Le chevalier Steele honora sa mémoire par un beau tatler. Rien, dit-il, ne touche plus les gens de gout, que de voir les obseques de ceux qui ont excellé dans quelque art ou quelque science. M. Betterton exprimait avec tant de grâce et de force l'endroit d'Othello, où il parle de la manière de gagner le cœur de sa maîtresse, qu'en me promenant dans le cloitre je pensais à lui avec la même sensibilité que j'aurais eue pour une personne qui aurait fait pendant sa vie ce que je lui ai Ve représenter. L'obscurité du lieu et les flambeaux qui marchent devant le convoi, contribuèrent à me rendre rêveur et mélancolique : je me sentis vivement affligé, qu'il y eut quelque différence entre Brutus et Cassius, et que ses talents n'aient pu le garantir du cercueil. Considérant ensuite le néant des grandeurs humaines, je n'ai pu m'empêcher de voir avec douleur que tant d'hommes illustres, qui sont dans le voisinage du petit coin de terre où l'on a mis mon ancien ami, sont retournés en poudre, et qu'il n'y a dans la tombe aucune différence entre le monarque réel et le monarque imaginaire.

Madame Betterton survécut à son mari, et peut-être n'a-t-il jamais représenté des scènes aussi touchantes que celle qu'offrait l'état où il laissa ses affaires et son épouse : elle languit longtemps, séchant du chagrin de voir le délabrement de sa santé et de sa petite fortune. La mort de son mari jointe à son âge et à ses infirmités, rendait son état pitoyable ; mais l'excès de son malheur devint, en quelque façon, sa ressource, parce qu'il la priva de son bon sens et de sa raison.

Je me suis étendu sur cet homme célèbre en son genre, parce que tous ceux qui excellent dans quelqu'un des beaux-arts, méritent l'estime et les éloges des gens de lettres.

Lee (Nathanael), célèbre poète, naquit à Westminster vers le milieu du dernier siècle, et fit onze pièces de théâtre, qui ont été jouées avec beaucoup d'applaudissement. Sa dernière tragédie, intitulée le massacre de Paris, fut représentée sur le théâtre royal en 1690. Les pensées de cet auteur sont admirables pour le tragique, mais si noyées dans une multitude de paroles, qu'elles perdent la plus grande partie de leur beauté. Il réussit merveilleusement dans le pathétique, lorsqu'il ne s'abandonne point à la violence de son imagination. Le comte de Rochester dit plaisamment que ce poète ne chantait pas mal, mais qu'il forçait sa voix, de manière qu'il s'enrouait. Il perdit l'esprit à l'âge de cinquante ans, et fut confiné quelques années à l'hôpital de Bethlem. Il en sortit sans s'être parfaitement rétabli, et mourut pendant la nuit dans une des rues de Londres.

Beveridge (Guillaume), en latin Beverigius, né à Westminster en 1638, fut nommé évêque de S. Asaph en 1705, et s'attira la vénération de toute l'Angleterre par ses vertus et par son savoir. Il mourut en 1708, à 71 ans.

Ses ouvrages de piété sont en grand nombre. On a publié ses sermons en 1709, et ce recueil forme dix volumes in -8°. Ses pensées secrètes sur la religion ont souffert plusieurs éditions. La traduction française de cet ouvrage parut à Amsterdam en 1731 en deux volumes in -12.

En 1662, il publia à Londres ses institutionum chronologicarum libri duo, qui ont été réimprimés pour la troisième fois en 1721 ; c'est un traité simple et méthodique d'un grand usage classique, parce qu'il fournit un système abrégé de toute la chronologie. Dans le premier livre, l'auteur traite de la nature et des parties de la chronologie ; du temps, des heures, des minutes et des secondes ; des jours, des semaines, des mois, de l'année céleste, de l'année julienne, grégorienne, égyptienne, éthiopiennee, persane, syrienne et grecque ; de l'année astronomique, civîle et solaire des juifs ; de l'année des Arabes. Dans le second livre, il traite des syzygies ou mois lunaires, et des éclipses, des équinoxes et des solstices ; du cycle du soleil et de la lettre dominicale, du cycle de la lune et du nombre d'or ; de l'indiction ; de l'épacte ; du cycle de Méton et de Callippe ; de la période dionysienne et julienne ; de l'ère chrétienne et de Dioclétien ; des années du monde ou du comput des Grecs ; de l'ére judaïque ; de l'époque de la prise de Troie, de la fondation de Rome et de celle d'Antioche ; des olympiades et des jeux capitolins ; des années juliennes, de l'ére d'Espagne et de la victoire d'Actium ; des éres de Nabonassar, de Philippe, et de Yezdegird le dernier roi de Perse, de l'Hégire ou ére mahométane. Dans l'appendix, il donne les noms des mois hébreux, syriens, persans, éthiopiens et arabes, dans les caractères mêmes de ces langues, et autres choses pareilles.

En 1678, il fit imprimer son codex canonum ecclesiae primitivae vindicatus, recueil des canons de la primitive église justifiée. M. Daillé était dans une opinion différente ; car, dans son traité de pseudepigraphis, imprimé en 1652, il tâche de prouver que le recueil des canons n'a point été fait par des personnes qui aient vécu près du temps des apôtres, et qu'il n'a été publié que vers la fin du Ve siècle.

Le thesaurus theologicus, ou système de théologie du docteur Beveridge n'a paru qu'en 1710, in -8°. c'est-à-dire trois ans après la mort de l'auteur.

Un illustre savant a mis au jour en 1711 une courte revue des écrits du docteur Beveridge ; et l'on doit convenir qu'il y a trouvé un grand nombre d'erreurs en fait de systèmes et de raisonnements. Mais il faut oublier les erreurs spéculatives du vertueux évêque de S. Asaph, et considérer seulement les preuves éclatantes qu'il a donné de sa piété pendant sa vie et à sa mort, ayant légué la plus grande partie de son bien pour l'avancement de la religion chrétienne, tant au-dedans qu'au-dehors du royaume britannique.

Folkes (Martin) naquit à Westminster en 1690, et fut nommé de la société royale en 1714, à l'âge de 24 ans. Au retour de ses voyages, il lut à la société des antiquaires de Londres une savante dissertation sur le poids et la valeur des anciennes monnaies romaines, à laquelle était jointe une table des monnaies d'or d'Angleterre depuis le règne d'Edouard III. sous lequel on a commencé à en fabriquer de cette espèce, avec leurs poids et leurs valeurs intrinseques. On trouvera dans les transactions philosophiques les observations de M. Folkes sur les polypes d'eau douce découverts par M. Trembley ; sur les bouteilles de Florence, qui résistent au choc d'une balle de plomb, et ne peuvent soutenir celui d'un petit gravier sans se rompre ; comme aussi sur des os humains revêtus d'une couche pierreuse, et qu'il avait Ve près de Rome à Villa-Ludovisia.

Il succéda à M. Sloane à la place de président de la société royale ; et en 1742, il fut nommé associé étranger à l'académie des Sciences de Paris.

En 1745, il publia son traité des monnaies d'argent d'Angleterre, depuis la conquête de cette île par les Normands, jusqu'au temps où il écrivait. Cet ouvrage, avec la seconde édition de celui qu'il avait déjà donné sur les monnaies d'or, était certainement le morceau de ce genre le plus parfait et le plus intéressant qu'on eut encore Ve ; il est même plus intéressant qu'il ne le parait au premier coup-d'oeil. Les monnaies sont les signes des valeurs de tout ce qui peut faire l'objet du commerce et des besoins de la société ; ces signes doivent donc eux-mêmes changer de valeur, suivant que la quantité du métal qui sert de signe, ou celle des choses représentées vient à changer, et encore, suivant la facilité qu'une nation trouve à se les procurer par son commerce ; d'où il suit qu'un tableau fidèle de la variation des monnaies d'une nation présente à ceux qui sont en état de connaître cette espèce d'hiéroglyphe, non les événements qui appartiennent aux histoires ordinaires, mais l'effet de ces mêmes événements sur le corps politique, et les avantages ou les maux intérieurs qu'ils y ont pu causer.

En 1750, M. Folkes fut nommé président de la société des antiquaires de Londres, et ce fut le dernier honneur qui lui fut déféré, étant mort en 1754. (D.J.)

WESTMINSTER, église de, (Topogr. de Londres) l'église de Westminster fut fondée dans le VIIe siècle par Sébert, roi des Saxons orientaux, qui s'étant converti au christianisme, changea le temple du dieu Thor qui était dans cet endroit en une église chrétienne, laquelle fut depuis ruinée par les Danois.

Edouard le confesseur rebâtit à neuf cette église dans le onzième siècle, et voulut qu'elle fût sous l'invocation de S. Pierre. Il employa à cette fondation la dixième partie de ses revenus, et joignit à sa nouvelle église un monastère ou une abbaye, dans laquelle il établit des religieux de l'ordre de saint Benait.

Au XIIIe siècle, Henri III. fit démolir l'église d'Edouard pour la rebâtir beaucoup plus belle qu'elle n'était auparavant ; mais son entreprise ne fut achevée que longtemps après sa mort. Henri VII. choisit cette église pour être sa sépulture, et celle des rois ses successeurs. Il fit construire dans le chœur à l'orient une superbe chapelle, qui lui couta quatorze mille livres sterling, somme très-considérable dans ce temps-là.

L'église de Westminster est un grand édifice, de goût gothique, fort élevé, construit en croix comme les églises cathédrales, long de cinq cent pieds, et large d'environ cent pieds. Aux deux côtés de la façade qui est à l'occident, paraissent deux tours carrées qui ne s'élèvent pas plus haut que le tait.

On entre dans un vaisseau long et étroit, dont la voute est suspendue sur deux rangs de piliers ; en avançant un peu plus loin, on voit dans diverses chapelles les tombeaux de quinze ou seize rois et reines d'Angleterre, et ceux de plusieurs personnes illustres, soit par leur mérite, soit par leur naissance. On trouve en face le chœur où est entr'autres le tombeau de Sébert, premier fondateur de l'église, et qui mourut en 616.

Du chœur, on passe dans la chapelle royale, où se trouve sur la droite la sépulture de Richard II. mort en 1399, et celle d'Edouard III. mort en 1377. Au fond de la chapelle, on voit le tombeau d'Henri V. mort en 1422, et celui de S. Edouard le confesseur, mort en 1065. Sur la gauche est inhumé le brave Edouard I. mort en 1308, et Henri III. mort en 1273. Ces tombeaux sont tous accompagnés d'épitaphes.

De la chapelle royale, on passe dans celle de Henri VII. où se voit le tombeau de ce prince en bronze massif, et où il est inhumé avec Elisabeth son épouse. Le roi Edouard VI. a son tombeau tout près de celui de son ayeul ; la reine Marie Stuard mère de Jacques I. et la princesse Marguerite de Richemond mère de Henri VII. sont ensevelies au-dehors de la chapelle, à la droite ; sur la gauche, on voit la sépulture de l'illustre reine Elisabeth.

L'église de Westminster est le lieu où se fait ordinairement la cérémonie du couronnement des rais, et l'on a suivi cet usage depuis Guillaume le conquérant, qui montra l'exemple. La reine Elisabeth ayant ôté cette église aux religieux bénédictins qui la possédaient, y mit à leur place douze chanoines, avec un doyen. Le doyen est d'ordinaire un évêque, lequel a sous certaines restrictions une juridiction ecclésiastique et civîle dans la ville de Westminster, et dans les lieux qui dépendaient autrefois de l'abbaye.

Les revenus de cette maison servent actuellement à entretenir trente chanoines, un organiste, douze pauvres, et quarante écoliers, avec leurs maîtres, et divers officiers de collège, qui ont tous de gros appointements. Il y a dans le cloitre une bibliothèque publique, qui s'ouvre soir et matin pendant les séances des cours de justice de Westminster.

C'est dans l'église de Westminster qu'on enterre les têtes couronnées, les personnes du plus haut rang, et celles d'un mérite rare. Mais au milieu de tant d'hommes illustres dont l'église est le tombeau, l'histoire nous apprend que Cromwel y fit ensevelir sa mère avec beaucoup de pompe et de magnificence. Elle vécut assez pour le voir élevé au protectorat, et solennellement installé en 1653 dans ce grand office, équivalent à celui de la royauté. Cependant elle n'avait jamais pu se persuader que le pouvoir ou la vie de son fils fussent en sûreté ; et d'un jour à l'autre, elle doutait qu'il fût vivant s'il ne l'en assurait par sa présence. C'était une femme de bonne famille du nom de Stuart, et d'un caractère décent, qui, par son économie et son industrie, avait tiré parti d'une fortune bornée pour l'éducation d'une nombreuse famille. Elle s'était vue dans la nécessité d'établir une brasserie à Huntingdon, et sa conduite lui en avait fait tirer de l'avantage. De-là vient que Cromwel, dans les libelles du temps, est quelquefois désigné sous le nom de brasseur. Ludlow le raille du surcrait considérable que son revenu royal allait recevoir par la mort de sa mère, qui possédait un douaire de soixante livres sterling sur son bien. (D.J.)

WESTMINSTER, salle de, (Topographie de Londres) en anglais, Westminster-hall ; grande salle que fit construire le roi Guillaume II. dit le roux, vers l'an 1098. Cette salle est voutée, et la voute est lambrissée d'une espèce de bois qui croit en Irlande, et auquel les araignées n'attachent point leurs toiles. C'est dans cette salle que s'assemble le parlement d'Angleterre ; et pour emprunter ici la poésie de l'auteur de l'Henriade :

Aux murs de Westminster on voit paraitre ensemble

Trais pouvoirs étonnés du nœud qui les rassemble,

Les députés du peuple, et les grands, et le roi,

Divisés d'intérêt, réunis par la loi ;

Tous trois membres sacrés de ce corps invincible,

Dangereux à lui-même, à ses voisins terrible.

Heureux, lorsque le peuple instruit par son devoir,

Respecte autant qu'il doit, le souverain pouvoir !

Plus heureux, lorsqu'un roi, doux, juste et politique,

Respecte autant qu'il doit, la liberté publique !

Quoique cette salle soit longue de deux cent soixante et dix pieds, et large de soixante et dix, elle est moitié trop petite pour un corps si nombreux que l'est celui du parlement d'Angleterre, et elle demanderait sans-doute d'être tout autrement décorée pour l'assemblée de cette auguste compagnie. Aussi prétend-on que cette salle n'est qu'un débris du palais qu'Edouard le confesseur éleva près de l'abbaye, et qu'acheva Guillaume II. Ce palais fut réduit en cendres vers le milieu du XVIe siècle, sous le règne de Henri VIII. et l'on ne put sauver de l'incendie que cette grande salle, où le parlement s'assemble, et quelques chambres voisines, entr'autres, celle qu'on nomme vulgairement la chambre peinte de S. Edouard. (D.J.)