La loi ordonnait aux prêtres de s'abstenir de vin pendant tout le temps qu'ils étaient occupés au service du temple. La même défense était faite aux Nazaréens pour tout le temps de leur nazaréat. Les Juifs s'abstiennent de plusieurs sortes d'animaux, dont on trouve le détail dans le Lévitique et le Deutéronome. S. Paul dit que les athletes s'abstiennent de toutes choses pour obtenir une couronne corruptible, c'est-à-dire, qu'ils s'abstiennent de tout ce qui peut les affoiblir ; et en écrivant à Timothée, il blâme certains hérétiques qui condamnaient le mariage et l'usage des viandes que Dieu a créées. Entre les premiers Chrétiens, les uns observaient l'abstinence des viandes défendues par la loi, et des chairs immolées aux idoles ; d'autres méprisaient ces observances comme inutiles, et usaient de la liberté que Jesus-Christ a procurée à ses fidèles. S. Paul a donné sur cela des règles très-sages, qui sont rapportées dans les épitres aux Corinthiens et aux Romains. Lévit. Xe 9. Num. VIe 3. 1. Cor. IXe 25. Tim. I. c. IVe 3. 1. Cor. VIIIe 7. 10. Rom. XIVe 23.

Le concîle de Jérusalem tenu par les apôtres, ordonne aux fidèles convertis du paganisme de s'abstenir du sang des viandes suffoquées, de la fornication, et de l'idolatrie. Act. XVe 20.

S. Paul veut que les fidèles s'abstiennent de tout ce qui a même l'apparence du mal ; ab omni specie mala abstinete vos ; et à plus forte raison de tout ce qui est réellement mauvais, et contraire à la religion et à la piété. Thessal. Ve 21. Calmet, Diction. de la Bible, lett. A. tom. I. p. 32. (G)

ABSTINENCE, s. f. Orphée après avoir adouci les mœurs des hommes, établit une sorte de vie, qu'on nomma depuis Orphique ; et une des pratiques des hommes qui embrassaient cet état, était de ne point manger de la chair des animaux. Il est plausible de dire qu'Orphée ayant rendu sensibles aux lois de la société les premiers hommes qui étaient antropophages :

Silvestres homines sacer interpresque deorum,

Caedibus et faedo victu deterruit Orpheus. Horat.

il leur avait imposé la loi de ne plus manger de viande du tout, et cela sans doute pour les éloigner entièrement de leur première férocité ; que cette pratique ayant ensuite été adoptée par des personnes qui voulaient embrasser une vie plus parfaite que les autres, il y eut parmi les payens une sorte de vie qui s'appela pour lors vie Orphique, , dont Platon parle dans l'Epinomis, et au sixième livre de ses lais. Les Phéniciens et les Assyriens, voisins des Juifs, avaient leurs jeunes sacrés. Les Egyptiens, dit Hérodote, sacrifient une vache à Isis, après s'y être préparés par des jeunes ; et ailleurs il attribue la même coutume aux femmes de Cyrene. Chez les Athéniens, les fêtes d'Eleusine et des Tesmophores étaient accompagnées de jeunes rigoureux, surtout entre les femmes, qui passaient un jour entier assises à terre dans un équipage lugubre, et sans prendre aucune nourriture. A Rome il y avait des jeunes réglés en l'honneur de Jupiter ; et les historiens font mention de ceux de Jules César, d'Auguste, de Vespasien, de Marc Aurele, etc. Les athletes en particulier en pratiquaient d'étonnans : nous en parlerons ailleurs. Voyez ATHLETE. (G)

* ABSTINENCE des Pythagoriciens. Les Pythagoriciens ne mangeaient ni chair, ni poisson, du moins ceux d'entr'eux qui faisaient profession d'une grande perfection, et qui se piquaient d'avoir atteint le dernier degré de la théorie de leur maître. Cette abstinence de tout ce qui avait eu vie, était une suite de la métempsycose : mais d'où venait à Pythagore l'aversion qu'il avait pour un grand nombre d'autres aliments, pour les fèves, pour la mauve, pour le vin, etc. On peut lui passer l'abstinence des œufs ; il en devait un jour éclore des poulets : où avait-il imaginé que la mauve était une herbe sacrée, folium sanctissimum ? Ceux à qui l'honneur de Pythagore est à cœur, expliquent toutes ces choses ; ils démontrent que Pythagore avait grande raison de manger des choux, et de s'abstenir des fèves. Mais n'en déplaise à Laerte, à Eustathe, à Aelien, à Jamblique, à Athenée, etc. on n'aperçoit dans toute cette partie de sa philosophie que de la superstition ou de l'ignorance : de la superstition, s'il pensait que la fève était protégée des dieux ; de l'ignorance, s'il croyait que la mauve avait quelque qualité contraire à la santé. Il ne faut pas pour cela en faire moins de cas de Pythagore : son système de la métempsycose ne peut être méprisé qu'à tort par ceux qui n'ont pas assez de philosophie pour connaître les raisons qui le lui avaient suggéré, ou qu'à juste titre par les Chrétiens, à qui Dieu a révélé l'immortalité de l'âme et notre existence future dans une autre vie.

ABSTINENCE, en Médecine, a un sens très-étendu. On entend par ce mot la privation des aliments trop succulents. On dit communément qu'un malade est réduit à l'abstinence, quand il ne prend que du bouillon, de la tisane, et des remèdes appropriés à sa maladie. Quoique l'abstinence ne suffise pas pour guérir les maladies, elle est d'un grand secours pour aider l'action des remèdes. L'abstinence est un préservatif contre beaucoup de maladies, et surtout contre celles que produit la gourmandise.

On doit régler la quantité des aliments que l'on prend sur la déperdition de substance qu'occasionne l'exercice que l'on fait, sur le temps où la transpiration est plus ou moins abondante, et s'abstenir des aliments que l'on a remarqué contraires à son tempérament.

On dit aussi que les gens faibles et délicats doivent faire abstinence de l'acte vénérien.

On apprend par les lois du régime, tant dans l'état de santé que dans l'état de maladie, à quelle sorte d'abstinence on doit s'astreindre. Voyez REGIME. (N)