* ALEXANDRIN ; épithète qui désigne dans la Poésie française, la sorte de vers affectée depuis longtemps, et vraisemblablement pour toujours, aux grandes et longues compositions, telles que le poème épique et la tragédie, sans être toutefois exclue des ouvrages de moindre haleine. Le vers alexandrin est divisé par un repos en deux parties qu'on appelle hémistiches. Dans le vers alexandrin, masculin ou féminin, le premier hémistiche n'a jamais que six syllabes qui se comptent : je dis qui se comptent, parce que s'il arrive que cet hémistiche ait sept syllabes, sa dernière finira par un e muet, et la première du second hémistiche commencera par une voyelle, ou par une h non aspirée, à la rencontre de laquelle l'e muet s'élidant, le premier hémistiche sera réduit à six syllabes. Dans le vers alexandrin masculin, le second hémistiche n'a non plus que six syllabes qui se comptent, dont la dernière ne peut être une syllabe muette. Dans le vers alexandrin féminin, le second hémistiche a sept syllabes, dont la dernière est toujours une syllabe muette. Voyez RIME MASCULINE, RIME FEMININE, HEMISTICHE. Le nombre et la gravité forment le caractère de ce vers ; c'est pourquoi je le trouve trop éloigné du ton de la conversation ordinaire pour être employé dans la comédie. Le vers alexandrin français répond au vers hexamètre latin, et notre vers marotique ou de dix syllabes, au vers iambique latin. Il faudrait donc faire en français de notre alexandrin et de notre marotique, l'usage que les Latins ont fait de leur hexamètre et de leur iambique. Une loi commune à tout vers partagé en deux hémistiches, et principalement au vers alexandrin, c'est que le premier hémistiche ne rime point avec le second ni avec aucun des deux du vers qui précède ou qui suit. On dit que notre vers alexandrin a été ainsi nommé, ou d'un poème français de la vie d'Alexandre, composé dans cette mesure par Alexandre de Paris, Lambert Licor, Jean le Nivelais, et autres anciens Poètes, ou d'un poème latin intitulé l'Alexandriade, et traduit par les deux premiers de ces Poètes, en grands vers, en vers alexandrins, en vers héroïques ; car toutes ces dénominations sont synonymes, et désignent indistinctement la sorte de vers que nous venons de définir.