Dans les statuts de Riculphe, évêque de Saissons, donnés en 889, il défend aux clercs de se servir dans les sacrés mystères, de l'aube qu'ils portent ordinairement ; ce qui prouve que jusque-là les ecclésiastiques portaient toujours une aube sur leur tunique pour marque de leur état ; c'est pourquoi il en fallait une particulière pour l'autel, afin qu'elle fût plus propre. Fleury, Histoire ecclés. tom. XI. (G)

AUBE, en Marine, c'est l'intervalle du temps qui s'écoule depuis le souper de l'équipage jusqu'à ce qu'on prenne le premier quart. Voyez QUART. (Z)

AUBE, s. f. (Hydraulique) les aubes sont par rapport aux moulins à eau, et aux roues que l'eau fait mouvoir, ce que sont les ailes des moulins à vent ; ce sont des planches fixées à la circonférence de la roue, et sur lesquelles s'exerce immédiatement l'impulsion du fluide, qui les chasse les unes après les autres, ce qui fait tourner la roue. Voyez PALETTE. (O)

* Si l'on considère que la vitesse de l'eau n'est pas la même à différentes profondeurs, et plusieurs autres circonstances, on conjecturera que le nombre et la disposition les plus favorables des aubes sur une roue, ne sont pas faciles à déterminer. 1°. Le nombre des aubes n'est pas arbitraire : quand une aube est entièrement plongée dans l'eau, et qu'elle a la position la plus avantageuse pour être bien frappée, qui est naturellement la perpendiculaire au fil de l'eau, il faut que l'aube qui la suit et qui vient prendre sa place, ne fasse alors qu'arriver à la surface de l'eau, et la toucher ; car pour peu qu'elle y plongeât, elle dérobait à la première aube une quantité d'eau proportionnée, qui n'y ferait plus d'impression ; et quoique cette quantité d'eau fit impression sur la seconde aube, celle qui serait perdue pour la première ne serait pas remplacée par-là ; car l'impression sur la première eut été faite sous l'angle le plus favorable, et l'autre ne peut l'être que sous un angle qui le soit beaucoup moins. On doit donc faire en sorte qu'une aube étant entièrement plongée dans l'eau, elle ne soit nullement couverte par la suivante ; et il est visible que cela demande qu'elles aient entr'elles un certain intervalle ; et comme il sera le même pour les autres, il en déterminera le nombre total.

Les aubes attachées chacune par son milieu à un rayon d'une roue qui tourne, ont deux dimensions, l'une parallèle, l'autre perpendiculaire à ce rayon ; c'est la parallèle que j'appellerai leur hauteur ; si la hauteur est égale au rayon de la roue, une aube ne peut donc plonger entièrement, que le centre de la roue, ou de l'arbre qui la porte, ne soit à la surface de l'eau ; et il est nécessaire qu'une aube étant plongée perpendiculairement au courant, la suivante, qui ne doit nullement la couvrir, soit entièrement couchée sur la surface de l'eau, et par conséquent fasse avec la première un angle de 90 degrés ; ce qui emporte qu'il ne peut y avoir que quatre aubes : d'où l'on voit que le nombre des aubes sera d'autant plus grand que leur largeur sera moindre. Voici une petite table calculée par M. Pitot, du nombre et de la largeur des aubes.

Nombre des aubes, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20.

Largeur des aubes, le rayon étant de 1000, 1000, 691, 500, 377, 293, 234, 191, 159, 134, 114, 99, 86, 76, 67, 61, 54, 49.

2°. Il faut distinguer deux sortes d'aubes : celles qui sont sur les rayons de la roue, et dont par conséquent elles suivent la direction selon leur largeur ; celles qui sont sur des tangentes tirées à différents points de la circonférence de l'arbre qui porte la roue, ce qui ne change rien au nombre : les premières s'appellent aubes en rayons ; les secondes, aubes en tangentes.

L'aube en rayon et l'aube en tangente entrent dans l'eau et en sortent en même temps, et elles y décrivent par leur extrémité un arc circulaire, dont le point de milieu est la plus grande profondeur de l'eau à laquelle l'aube s'enfonce. On peut prendre cette profondeur égale à la largeur des aubes. Si on conçoit que l'aube en rayon arrive à la surface de l'eau, et par conséquent y est aussi inclinée qu'elle puisse, l'aube en tangente qui y arrive aussi, y est nécessairement encore plus inclinée ; et de-là vient que quand l'aube en rayon est parvenue à être perpendiculaire à l'eau, l'aube en tangente y est encore inclinée, et par conséquent en reçoit à cet égard, et en a toujours jusque-là moins reçu d'impression. Il est vrai que cette plus grande partie de l'aube en tangente a été plongée ; ce qui semblerait pouvoir faire une compensation : mais on trouve au contraire que cette plus grande partie plongée reçoit d'autant moins d'impression de l'eau, qu'elle est plus grande par rapport à la partie plus petite de l'aube en rayon plongée aussi ; et cela à cause de la différence des angles d'incidence. Jusque-là l'avantage est pour l'aube en rayon.

Ensuite l'aube en tangente parvient à être perpendiculaire à l'eau : mais ce n'est qu'après l'aube en rayon ; le point du milieu de l'arc circulaire qu'elles décrivent est passé ; l'aube en rayon aura été entièrement plongée, et l'aube en tangente ne le peut plus être qu'en partie ; ce qui lui donne du désavantage encore, dans ce cas même qui lui est le plus favorable. Ainsi l'aube en rayon est toujours préférable à l'aube en tangente.

3°. On a pensé à donner aux aubes la disposition des ailes à moulin à vent, et l'on a dit : ce que l'air fait, l'eau peut le faire. Au lieu que dans la disposition ordinaire des aubes, elles sont attachées à un arbre perpendiculaire au fil de l'eau, ici elles le sont à un arbre parallèle à ce fil. L'impression de l'eau sur les aubes disposées à l'ordinaire, est inégale d'un instant à l'autre : sa plus grande force est dans le moment où une aube étant perpendiculaire au courant, et entièrement plongée, la suivante Ve entrer dans l'eau, et la précèdente en sort. Le cas opposé est celui où deux aubes sont en même temps également plongées. Depuis l'instant du premier cas, jusqu'à l'instant du second, la force de l'impression diminue toujours ; et il est clair que cela vient originairement de ce qu'une aube pendant tout son mouvement y est toujours inégalement plongée. Mais cet inconvénient cesserait à l'égard des aubes mises en ailes de moulin à vent ; celles-ci étant tout entières dans l'air, les autres seraient toujours entièrement dans l'eau. Mais on voit que l'impression doit être ici décomposée en deux forces ; l'une parallèle, et l'autre perpendiculaire au fil de l'eau, et qu'il n'y a que la perpendiculaire qui serve à faire tourner. Cette force étant appliquée à une aube nouvelle, qu'on aurait faite égale en surface à une autre posée selon l'ancienne manière, il s'est trouvé que l'aube nouvelle qui reçoit une impression constante, en eut reçu une un peu moindre que n'aurait fait l'aube ancienne dans le même cas.

D'ailleurs, quand on dit que la plus grande vitesse que puisse prendre une aube ou aîle mue par un fluide, est le tiers de la vitesse de ce fluide, il faut entendre que cette vitesse réduite au tiers est uniquement celle du centre d'impulsion, ou d'un point de la surface de l'aube où l'on conçoit que se réunit toute l'impression faite sur elle. Si le courant fait trois pieds en une seconde, ce centre d'impulsion fera un pied en une seconde ; et comme il est nécessairement placé sur le rayon de la roue, il y aura un point de ce rayon qui aura cette vitesse d'un pied en une seconde. Si ce point était l'extrémité du rayon qui serait, par exemple, de dix pieds, auquel cas il serait au point d'une circonférence de soixante pieds, il ne pourrait parcourir que soixante pieds, ou la roue qui porter les aubes ne pourrait faire un tour qu'en soixante secondes, ou en une minute. Mais si ce même centre d'impression était posé sur son rayon à un pied de distance du centre de la roue et de l'arbre, il parcourait une circonférence de six pieds, ou ferait un tour en six secondes ; et par conséquent la circonférence de la roue ferait aussi son tour dans le même temps, et aurait une vitesse dix fois plus grande que dans le premier cas : donc moins le centre d'impression est éloigné du centre de la roue, plus la roue tourne vite. Quand une surface parallélogrammatique mue par un fluide, tourne autour d'un axe immobîle auquel elle est suspendue, son centre d'impression est, à compter depuis l'axe, aux deux tiers de la ligne qui la divise en deux selon sa hauteur. Si la roue a dix pieds de rayon, l'aube nouvelle qui est entièrement plongée dans l'eau, et dont la largeur ou hauteur est égale au rayon, a donc son centre d'impression environ à six pieds du centre de la roue. Il s'en faut beaucoup que la largeur ou hauteur des aubes anciennes ne soit égale au rayon, et par conséquent leur centre d'impression est toujours plus éloigné du centre de la roue ; et cette roue ne peut tourner que plus lentement. Mais cet avantage est détruit par une compensation presqu'égale : dans le mouvement circulaire de l'aube, le point immobîle ou point d'appui est le centre de la roue ; et plus le centre d'impression auquel toute la force est appliquée est éloigné de ce point d'appui, plus la force agit avantageusement, parce qu'elle agit par un long bras de levier. Ainsi quand une moindre distance du centre d'impression au centre de la roue fait tourner la roue plus vite, et fait gagner du temps, elle fait perdre du côté de la force appliquée moins avantageusement, et cela en même raison : d'où il s'ensuit que la position du centre d'impression est indifférente. La proposition énoncée en général eut été fort étrange ; et on peut apprendre par beaucoup d'exemples à ne pas rejeter les paradoxes sur leur première apparence. Si l'on n'a pas songé à donner aux ailes de moulin à vent la disposition des aubes, comme on a songé à donner aux aubes la disposition des ailes de moulin, c'est que les ailes de moulin étant entièrement plongées dans le fluide, son impression tendrait à renverser la machine, en agissant également sur toutes ses parties en même temps, et non à produire un mouvement circulaire dans quelques-unes. Voyez l'Histoire de l'Académ. et les Mém. ann. 1729. pag. 81. 253. 365. ann. 1725. pag. 80 et suiv.

Au reste, le problème pour la solution duquel on vient de donner d'après M. Pitot quelques principes, demanderait une physique très-exacte, et une très-subtîle géométrie, pour être résolu avec précision.

En premier lieu, l'effort du fluide contre chaque point de l'aîle dépend de deux choses ; de la force d'impulsion du fluide, et du bras de levier par lequel cette force agit : ces deux choses varient à chaque point de l'aile. Le bras de levier est d'autant plus grand, que le point de l'aîle est plus éloigné du centre de rotation ; et à l'égard de la force d'impulsion, elle dépend de la vitesse respective du fluide par rapport au point de l'aîle ; or cette vitesse respective est différente à chaque point : car en supposant même que la vitesse absolue du fluide soit égale à tous les points de l'aile, la vitesse des points de l'aîle est plus grande ou plus petite, selon qu'ils sont plus loin ou plus près du centre de rotation. Il faut donc prendre l'impulsion du fluide sur chaque point de l'aîle (ce qui demande encore quelqu'attention pour ne point se tromper), et multiplier par cette impulsion le bras de levier, ensuite intégrer. Dans cette intégration même il y a des cas singuliers où l'on doit prendre des précautions que la Géométrie seule ne suffit pas pour indiquer. Voyez le traité des Fluides, Paris 1744, art. 367.

En second lieu, quand on a trouvé ainsi l'effort du fluide contre l'aube, il ne faut pas croire que la Physique ne doive altérer beaucoup ce calcul : 1°. les lois véritables de l'impulsion des fluides sont encore très-peu connues : 2°. quand une aîle est suivie d'une autre, le fluide qui est entre deux n'agit pas librement sur celle des deux qui précède, parce qu'il est arrêté par son impulsion même sur la suivante. Toutes ces circonstances dérangent tellement ce calcul, d'ailleurs très-épineux sans cela même, que je crois qu'il n'y a que l'expérience seule qui soit capable de résoudre exactement le problème dont il s'agit.

Une des conditions que doit avoir une roue chargée d'aubes, c'est de tourner toujours uniformément ; et pour cela, il faut qu'elle soit telle que dans quelque situation que ce soit de la roue, l'effort du fluide contre toutes les aubes ou parties d'aubes actuellement enfoncées soit nul, c'est-à-dire que la somme des efforts positifs pour accélerer la roue, soit égale à la somme des efforts négatifs pour la retarder. Ainsi le problème qu'il faudrait d'abord résoudre, ce serait de savoir quel nombre d'aubes il faut donner, pour que dans quelque situation que ce soit de la roue, l'effort du fluide soit nul. Il y a ici deux inconnues ; la vitesse de la roue, et le nombre d'aubes ; et la condition de la nullité de l'effort devrait donner une équation entre la vitesse de la roue et le nombre des aubes, quelle que fût la situation de la roue : c'est un problème qui parait digne d'exercer les Géomètres. On pourrait ensuite tracer une courbe, dont les abscisses exprimeraient le nombre des roues, et les ordonnées de la vitesse ; et la plus grande ordonnée de cette courbe donnerait la solution du problème. Je ne donne ici pour cela que des vues fort générales, et assez vagues : mais quand la solution de ce problème serait possible mathématiquement, ce que je n'ai pas suffisamment examiné, je ne doute pas que les considérations physiques ne l'altérassent beaucoup, et peut-être même ne la rendissent tout à fait inutile. (O)

* AUBE, (Géographie) rivière de France qui a sa source à l'extrémité méridionale du bois d'Auberive, traverse une partie de la Champagne, et se jette dans la Seine.