S. f. Astrologia. Ce mot est composé de , étoile, et de , discours ; ainsi l'Astrologie serait, en suivant le sens littéral de ce terme, la connaissance du ciel et des astres, et c'est aussi ce qu'il signifiait dans son origine. C'est la connaissance du ciel et des astres, qui faisait l'Astrologie ancienne ; mais la signification de ce terme a changé, et nous appelons maintenant Astronomie ce que les anciens nommaient Astrologie. Voyez ASTRONOMIE.

L'Astrologie est l'art de prédire les événements futurs par les aspects, les positions et les influences des corps célestes. Voyez ASPECT, INFLUENCE, etc.

On divise l'Astrologie en deux branches ; l'Astrologie naturelle, et l'Astrologie judiciaire.

L'Astrologie naturelle est l'art de prédire les effets naturels, tels que les changements de temps, les vents, les tempêtes, les orages, les tonnerres, les inondations, les tremblements de terres, etc. Voyez NATUREL ; voyez aussi TEMS, VENT, PLUIE, OURAGAN, TONNERRE, TREMBLEMENT DE TERRE, etc.

C'est à cette branche que s'en est tenu Goad, auteur Anglais, dans l'ouvrage en deux volumes, qu'il a intitulé l'Astrologie. Il prétend que la contemplation des astres peut conduire à la connaissance des inondations, et d'une infinité d'autres phénomènes. En conséquence de cette idée, il tâche d'expliquer la diversité des saisons par les différentes situations et les mouvements des planètes, par leurs rétrogradations, par le nombre des étoiles qui composent une constellation, etc.

L'Astrologie naturelle est elle-même, à proprement parler, une branche de la Physique ou Philosophie naturelle ; et l'art de prédire les effets naturels, n'est qu'une suite à posteriori, des observations et des phénomènes.

Si l'on est curieux de savoir quels sont les vrais fondements de l'Astrologie naturelle, et quel cas l'on peut faire de ses prédictions, on n'a qu'à parcourir les articles AIR, ATMOSPHERE, TEMS, BAROMETRE, ECLIPSE, COMETE, PLANETE, HYGROMETRE, ECOULEMENT, EMISSION. etc.

M. Boyle a eu raison quand il a fait l'apologie de cette Astrologie dans son histoire de l'Air. La génération et la corruption étant, selon lui, les termes extrêmes du mouvement ; et la raréfaction et la condensation, les termes moyens, il démontre conséquemment à ce principe, que les émanations des corps célestes contribuant immédiatement à la production des deux derniers effets, elles ne peuvent manquer de contribuer à la production des deux premiers, et d'affecter tous les corps physiques. Voyez GENERATION, CORRUPTION, RAREFACTION, CONDENSATION, etc.

Il est constant que l'humidité, la chaleur, le froid, etc. (qualités que la nature emploie à la production de deux effets considérables, la condensation et la raréfaction) dépendent presqu'entièrement de la révolution des mouvements, de la situation, etc. des corps célestes. Il n'est pas moins certain que chaque planète doit avoir une lumière qui lui est propre ; lumière distincte de celle de tout autre corps ; lumière qui n'est pas seulement une qualité visible en elle, mais en vertu de laquelle elle est douée d'un pouvoir spécifique. Le soleil, comme nous le savons, éclaire non-seulement toutes les planètes, mais il les échauffe encore par sa chaleur primordiale, les ranime, les met en mouvement, et leur communique des propriétés qui leur sont particulières à chacune. Mais ce n'est pas tout : ses rayons prennent sur ce corps une espèce de teinture ; ils s'y modifient ; et ainsi modifiés, ils sont réfléchis sur les autres parties du monde, et surtout sur les parties circonvoisines du monde planétaire. Ainsi selon l'aspect plus ou moins grand que les planètes ont avec cet astre, selon le degré dont elle en sont éclairées, le plus ou moins d'obliquitté sous laquelle elles reçoivent ses rayons, le plus ou moins de distance à laquelle elles en sont placées, les situations différentes qu'elles ont à son égard ; ses rayons en ressentent plus ou moins la vertu ; ils en partagent plus ou moins les effets ; ils en prennent, si on peut parler ainsi, une teinture plus ou moins forte : et cette vertu, ces effets, cette teinture, sont ensuite plus ou moins énergiques sur les êtres sublunaires. Voyez Mead, de imperio solis et lunae, &c.

L'Astrologie judiciaire à laquelle on donne proprement le nom d'Astrologie, est l'art prétendu d'annoncer les événements moraux avant qu'ils arrivent. J'entends par événements moraux, ceux qui dépendent de la volonté et des actions libres de l'homme ; comme si les astres avaient quelque autorité sur lui, et qu'il en fût dirigé. Voyez VOLONTE, ACTION, etc.

Ceux qui professent cet Art prétendent que " le ciel est un grand livre où Dieu a écrit de sa main l'histoire du monde, et où tout homme peut lire sa destinée. Notre Art, disent-ils, a eu le même berceau que l'Astronomie. Les anciens Assyriens qui jouissaient d'un ciel dont la beauté et la sérénité favorisaient les observations astronomiques, s'occupèrent des mouvements et des révolutions périodiques des corps célestes : ils remarquèrent une analogie constante entre ces corps et les corps terrestres ; et ils en conclurent que les astres étaient réellement ces parques et ce destin dont il était tant parlé, qu'ils présidaient à notre naissance, et qu'ils disposaient de notre état futur ". Voyez HOROSCOPE, NAISSANCE, MAISON, PARQUE, DESTINEE, etc. Voilà comment les Astrologues défendaient jadis leur Art. Quant à présent, l'occupation principale de ceux à qui nous donnons ce titre, est de faire des almanachs et des calendriers. Voyez CALENDRIER et ALMANACH.

L'Astrologie judiciaire passe pour avoir pris naissance dans la Chaldée, d'où elle pénétra en Egypte, en Grèce, et en Italie. Il y a des auteurs qui la font Egyptienne d'origine, et qui en attribuent l'invention à Cham : quant à nous, c'est des Arabes que nous le tenons. Le peuple Romain en fut tellement infatué, que les Astrologues ou Mathématiciens, car c'est ainsi qu'on les appelait, se soutinrent dans Rome malgré les édits des empereurs qui les en bannissaient. Voyez GENETHLIAQUES.

Quant aux autres contrées ; les Brames ou Bramines qui avaient introduit cet art prétendu dans l'Inde, et qui l'y pratiquaient, s'étant donnés pour les dispensateurs des biens et des maux à venir, exercèrent sur les peuples une autorité prodigieuse. On les consultait comme des oracles, et on n'en obtenait des réponses qu'à grands frais : ce n'était qu'à très-haut prix qu'ils vendaient leurs mensonges. Voyez BRACHMANE.

Les anciens ont donné le nom d'Astrologie apotelesmatique ou sphère barbarique, à cette science pleine de superstition, qui concerne les effets et les influences des astres. Les anciens Juifs, malgré leur religion, sont tombés dans cette superstition, dont les Chrétiens eux-mêmes n'ont pas été exempts. Les Grecs modernes l'ont portée jusqu'à l'excès, et à peine se trouve-t-il un de leurs auteurs, qui, en toute occasion, ne parle de prédictions par les astres, d'horoscopes, de talismants ; en sorte qu'à peine, si on veut les en croire, il y avait une seule colonne, statue ou édifice dans Constantinople et dans toute la Grèce, qui ne fût élevée suivant les règles de l'Astrologie apotelesmatique ; car c'est de ce mot , qu'a été formé celui de talisman.

Nous avons été infectés de la même superstition dans ces derniers siècles. Les historiens François observent que l'Astrologie judiciaire était tellement en vogue sous la reine Catherine de Médicis, qu'on n'osait rien entreprendre d'important sans avoir auparavant consulté les astres : et sous le règne de Henri III. et de Henri IV. il n'est question dans les entretiens de la cour de France, que des prédictions des Astrologues.

Barclay a fait dans le second livre de son Argenis, une satyre ingénieuse du préjugé singulier qu'on avait pris dans cette cour. Un Astrologue qui s'était chargé de prédire au roi Henri l'évenement d'une guerre dont il était menacé par la faction des Guises, donna occasion à la satyre de Barclay.

" Vous dites, devin prétendu, dit Barclay, que c'est de l'influence des astres qui ont présidé à notre naissance, que dépendent les différentes circonstances heureuses ou malheureuses de notre vie et de notre mort ; vous avouez d'un autre côté que les cieux ont un cours si rapide, qu'un seul instant suffit pour changer la disposition des astres : comment concilier ces deux choses ? et puisque ce mouvement si prompt qu'on ne peut le concevoir, entraîne avec lui tous les corps célestes ; les promesses ou les menaces qui y sont attachées, ne doivent-elles pas aussi changer selon leurs différentes situations ? pour lors comment fixer les destinées ? Vous ne pouvez savoir (connaissance pourtant, selon vous, nécessaire) sous quel astre une personne sera née ; vous croyez peut-être que le premier soin des sages-femmes est de consulter à la naissance d'un enfant toutes les horloges, de marquer exactement les minutes, et de conserver à celui qui vient de naître ses étoiles comme son patrimoine : mais souvent le péril des mères ne laisse pas lieu à cette attention. Quand on le pourrait ; combien y en a-t-il qui négligent de le faire, étant au-dessus de pareilles superstitions ? En supposant même qu'on ait étudié ce moment, l'enfant peut ne pas paraitre dans l'instant ; certaines circonstances peuvent laisser un long intervalle : d'ailleurs les cadrants sont ils toujours justes et exacts ? les horloges, quelque bonnes qu'elles soient, ne se démentent-elles pas souvent par un temps ou trop sec ou trop humide ? qui peut donc assurer que l'instant auquel des personnes attentives auront placé la naissance d'un enfant, soit le véritable moment qui réponde à son étoîle ?

Je suppose encore avec vous qu'on ait trouvé ce point juste, l'étoîle qui a présidé, sa situation, sa force ; pourquoi considérer entre les étoiles celles qui dominaient pendant que le fruit s'animait dans le ventre de la mère, plutôt que celles qui paraissaient pendant que le corps encore tendre et l'âme ignorante d'elle-même apprenait dans sa prison à supporter patiemment la vie ?

Mais laissant toutes ces difficultés, je vous accorde que l'état du ciel était bien connu au moment de la naissance : pourquoi faire émaner des astres un pouvoir absolu, je ne dis pas seulement sur les corps, mais aussi sur les volontés ? il faut donc que ce soit d'eux que j'attende mon bonheur ; que ma vie et ma mort en dépendent. Ceux qui s'engagent dans le parti des armes, et qui périssent dans une même bataille, sont-ils nés sous la même constellation ? et peut-on dire qu'un vaisseau qui doit échouer ne recevra que ceux que leurs mauvaises étoiles auront condamnés en naissant à faire naufrage ? L'expérience nous fait voir tous les jours que des personnes nées dans des temps bien différents, se livrent au combat, ou montent un vaisseau où ils périssent, n'ayant de commun que l'instant de la mort. Tous ceux qui viennent au monde sous la même disposition du ciel, ont-ils pour cela une même destinée pour la vie et pour la mort ? Vous voyez ici le roi ; croyez-vous que ceux qui sont nés sous la même étoile, possèdent des royaumes, ou pour le moins des richesses, qui prouvent l'heureuse et favorable influence des astres dans leur naissance ? croyez-vous même qu'ils aient vécu jusqu'à présent ? Voilà M. de Villeroy ; ceux qui sont nés sous la même planète, ont-ils sa sagesse en partage ? sont-ils comme lui honorés de la faveur du prince ? Et ceux qui sont nés dans le même instant que vous, sont-ils tous Astrologues, pour ne rien dire de pis ? Que si quelqu'un périt par la main d'un voleur, son sort, dites-vous exigeait qu'il fût tué par la main de ce misérable. Quoi donc ces mêmes astres qui avaient destiné le voyageur dans le moment de sa naissance, à être un jour exposé au fer d'un assassin, ont aussi donné à l'assassin, peut-être longtemps avant la naissance du voyageur, l'intention et la force pour vouloir et pouvoir exécuter son mauvais dessein ? car les astres, à ce que vous prétendez, concourent également à la cruauté de celui qui tue, et au malheur de celui qui est tué. Quelqu'un est accablé sous les ruines d'un bâtiment ; est-ce donc parce qu'il est condamné par sa destinée à être enseveli dans sa propre maison, que les murs en sont tombés ? On doit raisonner de même à l'occasion des dignités où l'on n'est élevé que par suffrages. La planète ou les astres qui ont présidé à la naissance d'une personne, et qui dans vos principes lui ont destiné des grandeurs, ont-ils pu aussi étendre leur pouvoir jusque sur d'autres hommes qui n'étaient pas encore nés, de qui dépendaient toutefois tous les effets de ces heureuses influences ?

Ce qu'il pourrait y avoir de vrai, en supposant la réalité des influences des corps célestes, c'est que comme le soleil produit des effets différents sur les choses différentes de la terre, quoique ce soit toujours les mêmes rayons et la même lumière, qu'il échauffe et entretient quelques semences, qu'il en fait mourir d'autres ; qu'il desseche de petites herbes, tandis que d'autres qui ont plus de suc résistent davantage ; de même aussi plusieurs enfants qui naissent en même temps ressemblent à un champ préparé de différentes manières, selon la différence du naturel, du tempérament et des habitudes de ceux à qui ils doivent le jour. Cette puissance des astres qui est une pour tous ces enfants, ne doit point dans tous produire les mêmes effets. Si le naturel de l'enfant a quelque rapport avec cette puissance, elle y dominera : s'il est opposé, je doute même qu'elle le corrige. De façon que pour juger sainement quel doit être le caractère d'un enfant, il ne faut pas s'arrêter seulement à considérer les astres, il faut encore remonter aux parents, faire attention à la condition de la mère pendant qu'elle était enceinte, et à beaucoup d'autres choses qui sont inconnues.

Enfin, je vous demande, Chaldéen, si cette influence que vous regardez comme la cause du bonheur ou du malheur, demeurera toujours au ciel jusqu'au temps marqué, pour descendre ensuite sur terre, et y faire agir des instruments propres à ce que les astres avaient arrêté ; ou si renfermée dans l'enfant, entretenue et croissant avec lui, elle doit en certaines occasions se faire jour pour accomplir les decrets irrévocables des astres ? Si vous prétendez qu'elle demeure au ciel, il y a dans vos principes une contradiction manifeste ; car puisque le bonheur ou le malheur de celui qui vient au monde, dépend de la manière dont les astres étaient joints dans le moment de sa naissance, le cours de ces mêmes astres semble avoir détruit cette première forme, et en avoir donné une autre peut-être entièrement opposée. Dans quelle partie du ciel se sera conservée cette première puissance, qui ne doit paraitre et jouer, pour ainsi dire, son rôle que plusieurs années après, comme lorsque l'enfant aura quarante ans ? De croire d'un autre côté que le destin, qui ne doit avoir son effet, que quand cet enfant sera parvenu à un âge plus avancé, lui soit attaché dès son enfance, c'est une impertinente rêverie. Quoi donc, ce sera lui, qui, dans un naufrage où il doit périr, sera cause que les vents s'éleveront, ou que le pilote, s'oubliant lui-même, ira échouer contre des bancs ? Le laboureur, dans la campagne, aura été l'auteur de la guerre qui l'appauvrit, ou d'un temps favorable qui doit lui donner une moisson abondante ?

Il est vrai que quelques-uns parmi vous publient hautement des oracles, que l'évenement a justifiés : mais ces événements justifiés par l'expérience, sont en si petit nombre, relativement à la multitude des faux oracles que vous avez prononcés vous et vos semblables, qu'ils démontrent eux-mêmes le peu de cas qu'on en doit faire. Vous faites passer un million de mensonges malheureux, à la faveur de sept ou huit autres qui vous ont réussi. En supposant que vous agissez au hasard, vous avez conjecturé tant de fais, que s'il y avait à s'étonner de quelque chose, ce serait peut-être de ce que vous n'avez pas rencontré plus souvent. En un mot, vous qui prévoyez tout ce qui doit arriver à la Sicile, comment n'avez-vous pas prévu ce qui vous arrive à vous-même aujourd'hui ? Ignoriez-vous que je devais vous traverser dans votre dessein ? Ne deviez-vous pas, pour faire valoir votre art, prévenir le roi que telle personne, qui serait présente, chercherait à vous troubler ? Puisqu'enfin votre science vous découvre si le roi doit triompher de ses ennemis, dites-nous auparavant s'il ajoutera foi à vos oracles ".

Quoique l'Astrologie judiciaire ait été solidement combattue, tant par Barclay que par d'autres auteurs célèbres, qui en ont démontré la vanité ; on ne peut pas dire qu'ils aient entièrement déraciné cette ridicule prévention ; elle règne encore, et particulièrement en Italie. On a Ve sur la fin du siècle dernier un Italien envoyer au pape Innocent XI. une prédiction en manière d'horoscope sur Vienne, alors assiégée par les Turcs, et qui fut très-bien reçue. De nos jours le comte de Boulainviliers, homme d'ailleurs de beaucoup d'esprit, était infatué de l'Astrologie judiciaire, sur laquelle il a écrit très-sérieusement. (G)

Tacite, au VI. liv. de ses Annales, ch. xxj. rapporte que Tibere, dans le temps qu'il était exilé à Rhodes, sous le règne d'Auguste, se plaisait à consulter les devins sur le haut d'un rocher fort élevé au bord de la mer ; et que si les réponses du devin donnaient lieu à ce prince de le soupçonner d'ignorance ou de fourberie, il le faisait à l'instant précipiter dans la mer par un esclave. Un jour ayant consulté dans ce même lieu un certain Thrasyllus fort habîle dans cet art, et ce devin lui ayant promis l'empire et toutes sortes de prospérités : Puisque tu es si habile, lui dit Tibere, pourrais-tu me dire combien il te reste de temps à vivre ? Thrasyllus, qui se douta apparemment du motif de cette question, examina ou fit semblant d'examiner, sans s'émouvoir, l'aspect et la position des astres au moment de sa naissance : bien-tôt après il laissa voir au prince une surprise qui ne tarda pas à être suivie de frayeur ; et il s'écria, qu'autant qu'il en pouvait juger, il était à cette heure même menacé d'un grand péril. Tibere, charmé de cette réponse, l'embrassa, le rassura, le regarda dans la suite comme un oracle, et le mit au nombre de ses amis.

On trouve dans ce même historien, l'un des plus grands génies qui furent jamais, deux passages qui font voir que quand un préjugé est général, les meilleurs esprits ne peuvent s'empêcher de lui sacrifier, mais ne le font pourtant qu'avec plus ou moins de restriction, &, pour ainsi dire, avec une sorte de répugnance. Le premier de ces passages se lit dans le liv. VI. chap. xxij. où après avoir fait des réflexions sur les différents sentiments des Philosophes au sujet de l'Astrologie, il ajoute ces paroles : Caeterum plerisque mortalium nom eximitur, quin primo cujusque ortu ventura destinentur : sed quaedam secus quàm dicta sint cadere, fallaciis ignara dicentium ; ita corrumpi fidem artis, cujus praeclara documenta, et antiqua aetas et nostra tulerit. Ce qu'on peut traduire ainsi : " Il ne parait pas douteux que tout ce qui doit nous arriver ne soit marqué des le premier moment de notre naissance : mais l'ignorance des devins les induit quelquefois en erreur dans les prédictions qu'ils nous font ; et par-là elle décrédite en quelque manière un art, dont la réalité est clairement prouvée par l'expérience de notre siècle, et par celle des siècles précédents ".

L'autre passage se trouve dans le IV. liv. des Annal. ch. lviij. " Tibere étant sorti de Rome, dit Tacite, les Astrologues prédirent qu'il n'y reviendrait jamais. Cette prédiction occasionna la perte de plusieurs citoyens, qui en conclurent que ce prince n'avait plus que peu de temps à vivre, et qui furent assez imprudents pour le publier. Car ils ne pouvaient se douter qu'en effet Tibere vivrait encore onze ans sans rentrer dans Rome, et dans une espèce d'exil volontaire. Mais au bout de ce temps, ajoute l'historien, on aperçut les limites étroites, qui dans la science des devins séparaient l'art de la chimère, et combien de nuages y obscurcissaient la vérité : car la prédiction qu'ils firent que Tibere ne reviendrait point à Rome, n'était pas faite au hasard et sans fondement, puisque l'évenement la vérifia : mais tout le reste leur fut caché ; et ils ne purent prévoir que ce prince parviendrait à une extrême vieillesse sans rentrer dans la ville, quoiqu'il dû. souvent s'en approcher de fort près ". Mox patuit breve confinium artis et falsi ; veraque quàm obscuris tegerentur. Nam in urbem non venturum, haud forte dictum : caeterorum nescii egère, cum propinquo rure aut littore, et saepe maenia urbis adsidents, extremam senectam compleverit. Il me semble voir dans ce passage un grand génie qui lutte contre le préjugé de son temps, et qui pourtant ne saurait totalement s'en défaire. (O)