S. f. (Astronomie et Physique) est le crépuscule du matin, cette lumière faible qui commence à paraitre quand le soleil est à 18 degrés de l'horizon, et qui continue en augmentant jusqu'au lever du soleil. Voyez CREPUSCULE.

Nicod fait venir ce mot du verbe auresco, dérivé d'aurum, quia ab oriente sole aer aurescit, parce que le soleil levant dore, pour ainsi dire, l'atmosphère.

Les Poètes ont personnifié l'aurore. Voyez plus bas AURORE, (Mythologie)

AURORE BOREALE ou LUMIERE SEPTENTRIONALE, aurora borealis, espèce de nuée rare, transparente et lumineuse, qui parait de temps en temps sur l'horizon, la nuit, du côté du nord. Ce phénomène n'a pas été inconnu aux anciens.

On en trouve la description dans Aristote, Météorol. l. I. ch. IVe 5. Pline, Histoire naturelle l. II. c. xxvj. Seneque, Quaest. nat. l. I. c. XVe et d'autres qui sont venus après eux. M. de Mairan nous a donné une liste exacte de ces auteurs, dans son traité de l'aurore boréale ; ouvrage plein de recherches curieuses, tant historiques que physiques et géométriques, et le plus complet que nous connaissions sur cette matière.

Mais les anciens ont en quelque sorte multiplié ce phénomène en lui donnant différents noms. On croyait autrefois qu'il y avait un grand mérite à savoir inventer des noms pour chaque chose. Ce talent s'est exercé sur le phénomène en question. On donne le nom de poutre à une lumière oblongue qui parait dans l'air, et qui est parallèle à l'horizon. Cette même sorte de lumière s'appelle flèche, lorsqu'une de ses extrémités forme une pointe en manière de flèche. La torche est une lumière qui se tient suspendue en l'air de toutes sortes de manières, mais qui a une de ses extrémités plus large que l'autre. On appelle chèvre dansante une lumière à laquelle le vent fait prendre diverses figures, et qui parait tantôt rompue et tantôt en son entier. Ce qu'on nomme bothynoè ou antre, n'est autre chose qu'un air qui parait creusé en-dedans, comme une profonde caverne, et qui est entouré comme d'une couronne. On appelle pythie ou tonneau, la lumière qui se manifeste sous la forme d'un gros tonneau rond qui parait brulant. Il est aisé de s'apercevoir que tous ces noms-là sont de peu d'importance, et qu'on en peut inventer suivant les différentes formes que prend la lumière, sans être plus habîle pour cela. Mussch. Essay de Physique.

Ces phénomènes ne paraissent pas souvent dans les pays de l'Europe qui sont un peu éloignés du pôle septentrional : mais ils sont à présent fort ordinaires dans les pays du nord. Il est certain, par les observations de MM. Burmann et Celsius, que les aurores boréales fort éclatantes n'avaient jamais été si fréquentes en Suède, qu'elles l'ont été depuis l'an 1716. On ne doit pourtant pas croire qu'il n'y en ait point eu avant ce temps-là, puisque M. Léopold rapporte dans son voyage de Suède, fait en 1707, qu'il avait Ve une de ces aurores dont la clarté était fort grande. Cet auteur, après nous avoir donné la description de cette lumière, cite un passage tiré du XIIe chap. de la Description de l'ancien Groenland par Thormodus Torfaeus, qui prouve que l'aurore boréale était alors connue ; et on en trouve même dans cet ouvrage une figure tout à fait curieuse. Comme ce phénomène était assez peu connu et assez rare avant l'an 1716, M. Celsius, habîle Astronome, prit alors la résolution de l'observer exactement, et de marquer le nombre de fois qu'il paraitrait. Quoique cet auteur n'ait commencé à faire des observations qu'après l'an 1716, il n'a pas laissé de trouver que cette lumière avait déjà paru 316 fois en Suède, et il a fait un livre où ces observations sont rassemblées : on a aussi Ve plusieurs fois ces sortes d'aurores boréales en Angleterre et en Allemagne : elles ont été moins fréquentes en France, et encore moins en Italie ; de sorte qu'elles n'avaient été vues de presque personne avant l'an 1722, et qu'après ce temps-là, on ne les avait encore vues que 2 ou 3 fois à Bologne. Celle qui a paru en 1726, a été la première qui ait été observée avec quelque soin en Italie. Comment. Bonon. p. 285. On a commencé à les voir fréquemment en Hollande depuis l'an 1716 ; de sorte que depuis ce temps-là jusqu'à présent, on a pu les y observer peut-être autant qu'on l'avait fait, en remontant de cette époque au déluge.

On peut distinguer les aurores boréales en deux espèces ; savoir en celles qui ont une lumière douce et tranquille, et celles dont la lumière est resplendissante : elles ne sont pas toujours accompagnées des mêmes phénomènes.

On y peut observer plusieurs variations. Voici les principales. Dans la région de l'air qui est directement vers le nord, ou qui s'étend du nord vers l'orient, ou vers l'occident, parait d'abord une nuée horizontale qui s'élève de quelques degrés, mais rarement de plus de 40 au-dessus de l'horizon. Cette nuée est quelquefois séparée de l'horizon, et alors on voit entre-deux le ciel bleu et fort clair. La nuée occupe en longueur une partie de l'horizon, quelquefois depuis 5 jusqu'à 100 degrés, et même davantage. La nuée est blanche et brillante ; elle est aussi souvent noire et épaisse. Son bord supérieur est parallèle à l'horizon, et forme comme une longue trainée éclairée, qui est plus haute en certains endroits, et plus basse en d'autres : elle parait aussi recourbée en manière d'arc, ressemblant à un disque orbiculaire qui s'élève un peu au-dessus de l'horizon, et qui a son centre au-dessus. On voit quelquefois une large bande blanche ou luisante qui tient au bord supérieur de la nuée noire. La partie sombre de la nuée se change aussi en une nuée blanche et lumineuse, lorsque l'aurore boréale a brillé pendant quelque temps, et qu'elle a dardé plusieurs verges ardentes et éclatantes. Il part du bord supérieur de la nuée, des rayons sous la forme de jets, qui sont quelquefois en grand, quelquefois en petit nombre, tantôt les uns proches des autres, tantôt à quelques degrés de distance. Ces jets répandent une lumière fort éclatante, comme si une liqueur ardente et brillante sortait avec impétuosité d'une seringue. Le jet brille davantage, et a moins de largeur à l'endroit du bord d'où il part ; il se dilate et s'obscurcit à mesure qu'il s'éloigne de son origine. Il s'élève d'une large ouverture de la nuée une colonne lumineuse comme une fusée, mais dont le mouvement est lent et uniforme, et qui devient plus large en s'avançant. Leurs dimensions et leur durée varient. La lumière en est blanche, rougeâtre ; ou de couleur de sang, lorsqu'elles avancent, les couleurs changent un peu, et forment une espèce d'arc-enciel. Lorsque plusieurs colonnes, parties de divers endroits, se rencontrent au zénith, elles se confondent les unes avec les autres, et forment par leur mélange une petite nuée fort épaisse, qui se mettant d'abord en feu, brule avec plus de violence, et répand une lumière plus forte que ne faisait auparavant chaque colonne séparément. Cette lumière devient alors verte, bleue et pourpre ; et quittant sa première place, elle se porte vers le sud sous la forme d'un petit nuage clair. Lorsqu'il ne sort plus de colonnes, la nuée ne parait souvent que comme le crépuscule du matin, et elle se dissipe insensiblement. Voyez un plus grand détail dans Musschenbroeck, essai de Physique, p. 1658. et suiv.

Ce phénomène dure quelquefois toute la nuit ; on le voit même souvent deux ou trois jours de suite. M. Musschenbroeck l'observa plus de dix jours et dix nuits de suite en 1734, et depuis le 22 jusqu'au 31 Mars 1735. La nuée qui sert de matière à l'aurore boréale, dure souvent plusieurs heures de suite sans qu'on y remarque le moindre changement ; car on ne voit pas alors qu'elle s'élève au-dessus de l'horizon, ou qu'elle descende au-dessous. Quelquefois elle se meut un peu du nord à l'est ou à l'ouest ; quelquefois aussi elle s'étend beaucoup plus loin de chaque côté, c'est-à-dire vers l'est et l'ouest en même temps, et il arrive alors qu'elle darde plusieurs de ces colonnes lumineuses dont nous avons parlé. On l'a aussi Ve s'élever au-dessus de l'horizon, et se changer entièrement en une nuée blanche et lumineuse. Enfin la lumière nait et disparait quelquefois en peu de minutes.

Plusieurs philosophes croient que la matière de l'aurore boréale est dans notre atmosphère. Ils s'appuient, 1°. sur ce qu'elle parait le soir sous la forme d'un nuage, qui ne diffère pas des autres nuages que nous voyons communément : et ce n'est en effet qu'un nuage placé à la même hauteur que les autres, autant que la vue en peut juger. On peut l'observer même pendant le jour : il ressemble alors aux nuages à tonnerre, excepté qu'il est moins épais, d'un bleu tirant sur le cendré, et flottant doucement dans l'air. Lorsqu'on voit un pareil nuage au nord, au nord-est, ou au nord-ouest, il parait surement une aurore boréale. 2°. Comme la nuée lumineuse se tient plusieurs heures de suite à la même hauteur au-dessus de l'horizon, elle doit nécessairement se mouvoir en même temps que notre atmosphère ; car puisque la terre tourne chaque jour autour de son axe, cette nuée lumineuse devrait paraitre s'élever au-dessus de l'horizon, et descendre au-dessous, si elle était supérieure à l'atmosphère. Cette nuée étant donc emportée en même temps que notre atmosphère, il y a tout lieu de croire qu'elle s'y trouve effectivement. 3°. Il y a plusieurs aurores boréales que l'on ne saurait voir en même temps de deux endroits peu éloignés l'un de l'autre, ce qui prouve qu'elles ne sont pas toujours à une hauteur considérable, et qu'elles sont surement dans notre atmosphère. Quelques grands Mathématiciens ont entrepris de donner des règles pour déterminer cette hauteur, par la portion de la nuée lumineuse, vue en un seul endroit. D'autres ont eu recours à la hauteur du phénomène Ve en divers endroits à la fais. Mais il n'est pas bien certain si l'aurore boréale, qui a été si commune en 1716, 1726, 1729, 1736, et qui a paru dans la plupart des endroits de l'Europe, était toujours la même lumière qui se tenait et brillait à la même place ; de sorte qu'on ne saurait déterminer surement la parallaxe ni par conséquent la véritable distance de ce météore, par la hauteur où on l'a Ve de divers endroits.

La matière de l'aurore boréale est de telle nature qu'elle peut s'enflammer, et répandre ensuite une lumière faible. Cette matière est alors si raréfiée, qu'on peut toujours voir les étoiles à-travers ; de sorte que non-seulement les colonnes, mais aussi la nuée blanche, et même la nuée noire, transmettent la lumière de ces astres. On ne saurait déterminer avec certitude la nature de cette matière. La Chimie nous fournit aujourd'hui plusieurs matières qui peuvent s'enflammer, bruler par la fermentation, et jeter de la lumière comme le phosphore. Qu'on mêle du tartre avec le régule d'antimoine martial, et qu'on fasse rougir longtemps ce mélange dans un creuset, on en retire une poudre qui s'enflamme lorsqu'on l'expose à un air humide ; et si elle vieillit un peu, elle devient fort brulante. L'aurore boréale n'est pas une flamme comme celle de notre feu ordinaire : mais elle ressemble au phosphore, qui ne luit pas d'abord, et qui jette ensuite une lumière faible. Les colonnes que darde la nuée lumineuse, sont comme la poudre du phosphore que l'on souffle dans l'air, ou qu'on y répand en la faisant sortir du cou d'une bouteille ; de sorte que chaque parcelle jette à la vérité une lueur, mais elle ne donne pas de flamme ou de feu rassemblé ; et la lumière est si faible, qu'on ne peut la voir pendant le jour, ni lorsque nous avons en été le crépuscule du soir qui répand une trop grande clarté. Cette matière approche donc de la nature du phosphore : mais quoique nous en connaissions peut-être plus de cinquante espèces, nous n'oserions cependant assurer que la nature ne renferme pas dans son sein un plus grand nombre d'espèces de matières semblables, puisque l'art nous en fait tous les jours découvrir des nouvelles. Mussch.

Il est vraisemblable, selon quelques physiciens, que cette matière tire son origine de quelque région septentrionale de la terre, d'où elle s'élève et s'évapore dans l'air. Il s'en est évaporé de nos jours une plus grande abondance qu'auparavant ; parce que, disent-ils, cette matière renfermée dans les entrailles de la terre, s'est détachée et s'est élevée après avoir été mise en mouvement ; de sorte qu'elle peut à présent s'échapper librement par les pores de la terre, au lieu qu'elle était auparavant empêchée par les rochers, les voutes pierreuses, ou par des croutes de terres compactes et durcies, ou bien parce qu'elle était trop profondément enfoncée dans la terre. Ainsi nous ne manquerons point de voir des aurores boréales aussi longtemps que cette matière se rassemblera, et qu'elle pourra s'élever dans l'air : mais dès qu'elle sera dissipée, ou qu'elle viendra à se recouvrir par quelque nouveau tremblement de terre, on ne verra plus ces aurores, et peut-être cesseront-elles même de paraitre entièrement pendant plusieurs siècles. On peut expliquer par-là pourquoi l'on n'avait pas aperçu cette matière avant l'an 1716, temps auquel on fut tout surpris de la voir subitement se manifester, comme si elle sortait de la terre en grande quantité. Cette matière se trouve peut-être répandue en plusieurs endroits de notre globe ; et il y a tout lieu de croire que ces lumières, dont les anciens Grecs et Romains font mention, et dont ils nous donnent eux-mêmes la description, étaient produites par une matière semblable qui sortait de la terre en Italie et dans la Grèce. Si ces phénomènes eussent été alors aussi peu fréquents en Italie qu'ils le sont aujourd'hui, ni Pline, ni Seneque, n'en auraient pas parlé, comme nous voyons qu'ils ont fait. Il a paru plusieurs explications de l'aurore boréale : mais il n'y en a peut-être aucune qui soit pleinement satisfaisante. L'ouvrage de M. de Mairan, dans lequel il propose son hypothèse sur ce sujet, et rapporte plusieurs phénomènes tout à fait curieux, est le plus convenable à ceux qui veulent s'instruire à fond de tout ce qui concerne ce météore. M. de Mairan l'attribue à une atmosphère autour du soleil. Voyez LUMIERE ZODIACALE. Selon lui cette atmosphère s'étend jusqu'à l'orbite terrestre et au-delà, et le choc du pôle de la terre contre cette matière, produit l'aurore boréale. Mais c'est faire tort à son hypothèse, que de l'exposer si fort en abrégé. Nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer nos lecteurs à l'ouvrage même.

Comme les nuées qui forment l'aurore boréale paraissent au nord, il n'est pas difficîle de comprendre qu'elles peuvent être poussées par un vent dans notre atmosphère vers l'est, le sud ou l'ouest, où nous pourrons les voir, de sorte que nous devons alors leur donner le nom d'aurores méridionales. M. Musschenbroeck croit avoir aperçu deux de ces lumières méridionales en 1738. Le savant M. Weidler nous a aussi donné la description d'une semblable lumière qu'il avait vue lui-même entre l'ouest et le sud-ouest le soir du 9 Octobre de l'année 1730, entre 8 1/2 et 9 heures 47'. Elle paraissait comme un arc blanc et lumineux, élevé de onze degrés au-dessus de l'horizon, et dont le diamètre était de trois degrés. On trouve aussi deux semblables lumières méridionales dans les Mémoires de l'Academie royale des sciences. Le phénomène que vit le père Laval à Marseille en 1704, était apparemment une lumière de cette nature ; car il parut dans l'air une poutre lumineuse, poussée de l'est à l'ouest assez lentement : le vent était à l'est. A Montpellier on vit le même soir dans l'air deux poutres lumineuses poussées de la même manière. Concluons toutes ces observations par celle-ci : c'est que cette lumière ne produit dans notre atmosphère aucun changement dont on puisse être assuré, et qu'elle n'est cause d'aucune maladie, ni du froid qui survient, ni d'un rude hiver, comme quelques savants l'ont cru, puisqu'on a eu des hivers doux après qu'elle avait paru. Mussch.

La figure première Pl. Phys. représente la fameuse aurore boréale de 1726, telle qu'elle parut à Paris le 19 Octobre 1726 à 8 heures du soir dans tout l'hémisphère septentrional : et la figure 2 en représente une autre vue à Giessen le 17 Février 1731, dépouillée des rayons et jets de lumière.

M. de Maupertuis, dans la relation de son voyage au nord, décrit en cette sorte les aurores boréales qui paraissent l'hiver en Laponie. " Si la terre est horrible alors dans ces climats, le ciel présente aux yeux les plus charmants spectacles. Dès que les nuits commencent à être obscures, des feux de mille couleurs et de mille figures éclairent le ciel, et semblent vouloir dédommager cette terre, accoutumée à être éclairée continuellement, de l'absence du soleil qui la quitte. Ces feux dans ces pays n'ont point de situation constante comme dans nos pays méridionaux. Quoiqu'on voie souvent un arc d'une lumière fixe vers le nord, ils semblent cependant le plus souvent occuper indifféremment tout le ciel. Ils commencent quelquefois par former une grande écharpe d'une lumière claire et mobile, qui a ses extrémités dans l'horizon, et qui parcourt rapidement les cieux, par un mouvement semblable à celui du filet des pêcheurs, conservant dans ce mouvement assez sensiblement la direction perpendiculaire au méridien. Le plus souvent après ces préludes, toutes ces lumières viennent se réunir vers le zénith, où elles forment le sommet d'une espèce de couronne. Souvent des arcs semblables à ceux que nous voyons en France vers le nord, se trouvent situés vers le midi ; souvent il s'en trouve vers le nord et vers le midi tout ensemble : leurs sommets s'approchent, pendant que leurs extrémités s'éloignent en descendant vers l'horizon. J'en ai Ve d'ainsi opposés, dont les sommets se touchaient presqu'au zénith ; les uns et les autres ont souvent au-delà plusieurs arcs concentriques. Ils ont tous leurs sommets vers la direction du méridien, avec cependant quelque déclinaison occidentale, qui ne parait pas toujours la même, et qui est quelquefois insensible. Quelques-uns de ces arcs, après avoir eu leur plus grande largeur au-dessus de l'horizon, se resserrent en s'approchant, et forment au-dessus plus de la moitié d'une grande ellipse. On ne finirait pas, si l'on voulait dire toutes les figures que prennent ces lumières, ni tous les mouvements qui les agitent. Leur mouvement le plus ordinaire, les fait ressembler à des drapeaux qu'on ferait voltiger dans l'air ; et par les nuances des couleurs dont elles sont teintes, on les prendrait pour de vastes bandes de ces taffetas que nous appelons flambés. Quelquefois elles tapissent d'écarlate quelques endroits du ciel ". M. de Maupertuis vit un jour à Ofwer-Tornea° (c'était le 18 Décembre 1736) un spectacle de cette espèce, qui attira son admiration, malgré tous ceux auxquels il était accoutumé. On voyait vers le midi une grande région du ciel teinte d'un rouge si vif, qu'il semblait que toute la constellation d'Orion fût trempée dans du sang. Cette lumière fixe d'abord, devint bientôt mobîle ; et après avoir pris d'autres couleurs de violet et de bleu, elle forma un dome, dont le sommet était peu éloigné du zénith vers le sud-ouest ; le plus beau clair de lune n'effaçait rien de ce spectacle. M. de Maupertuis ajoute qu'il n'a Ve que deux de ces lumières rouges, qui sont rares dans ce pays, où il y en a de tant de couleurs, et qu'on les y craint comme le signe de quelque grand malheur. Enfin lorsqu'on voit ces phénomènes, on ne peut s'étonner que ceux qui les regardent avec d'autres yeux que les philosophes, y voient des chars enflammés, des armées combattantes, et mille autres prodiges.

Le même savant dont nous venons de citer ce passage, a donné dans les Mémoires de l'Académie de 1733, la solution très-élégante d'un problème géométrique sur l'aurore boréale.

M. le Monnier, dans ses Institutions astronomiques, croit que la formation des aurores boréales est dû. à une matière qui s'exhale de notre terre, et qui s'élève dans l'atmosphère à une hauteur prodigieuse. Il observe, comme M. de Maupertuis, que dans la Suède il n'y a aucune nuit d'hiver où l'on n'aperçoive parmi les constellations ces aurores, et cela, dans toutes les régions du ciel ; circonstance bien essentielle pour apprétier les explications qu'on peut donner de ce phénomène. Il croit que la matière des aurores boréales est assez analogue à celle qui forme la queue des cometes. Voyez COMETE.

Presque tout cet article est de M. Formey. (O)

* AURORE, s. f. (Mythologie) déesse du Paganisme qui présidait à la naissance du jour. Elle était fille d'Hyperion et d'Aethra, ou Thea, selon quelques-uns ; et selon d'autres, du soleil et de la terre. Homère la couvre d'un grand voile, et lui donne des doigts et des cheveux couleur de rose ; elle verse la rosée, et fait éclore les fleurs. Elle épousa Persée, dont elle eut pour enfants les vents, les astres, et Lucifer. Tithon fut le second objet de sa tendresse : elle l'enleva, le porta en Ethiopie, l'épousa et en eut deux fils, Emathion et Memnon. Tithon fut rajeuni par Jupiter à la prière de l'Aurore. On peut voir les conditions de cette faveur du père des dieux, et la courte durée de la seconde vie de Tithon, dans une petite pièce de M. de Montcrif, écrite avec beaucoup d'esprit et de legereté. Le jeune Céphale succéda au vieux Tithon entre les bras de la tendre Aurore, qui n'eut jamais été infidèle, si Tithon n'eut jamais vieilli. Aurore arracha Céphale à son épouse Procris, et le transporta en Syrie, où elle en eut Phaéton. Apollodore l'accuse encore d'un troisième rapt, celui du géant Orion. Au reste la théologie des payens justifie tous ces enlevements ; et il parait que tous ces plaisirs de l'Aurore n'étaient qu'allégoriques.

AURORE, (Teinture) jaune doré et éclatant comme celui dont les nuées sont ordinairement colorées au lever du soleil. Pour avoir l'aurore, les Teinturiers alunent et gaudent fortement, et rabattent ensuite avec le raucoux dissous en cendre gravelée. L'aurore doit être aussi garencée ; c'est l'ordonnance de 1669, article 24 du règlement sur les teintures. Voyez TEINTURE.